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Pour une réelle démocratie participative en Tunisie

Le concept de société citoyenne est né de la profonde déception provoquée chez les citoyens tunisiens par les partis politiques et les groupes associatifs qui leur sont souvent associés, s’ils ne sont pas franchement à leur service exclusif.

Par Abdallah Jamoussi *

1- Identification du mouvement citoyen

Rendez-vous à Borj Dhiafa à Sfax, sur invitation de Dr. Mounir Charfi, membre fondateur d’un collectif d’activistes connus pour leur action pacifique à vocation progressiste imprégnée de principes de droit, de liberté et de dignité. Pour ce faire, ils avaient vu utile de recourir à la mobilisation citoyenne et de s’inscrire dans le cadre d’une démocratie participative.

Je ne citerais que Soumoud, mouvement sorti des crépuscules des temps de la Troïka (la coalition gouvernementale conduite par Ennahdha, de janvier 2012 à janvier 2014, Ndlr) d’une façon spontanée et qui avait réussi à s’entourer d’indépendants fermes et décidés, malgré le règne de la peur qui sévissait à cette époque.

Convaincus de la loyauté de leur cause et dévoués pour la patrie, ces jeunes avaient pu vaincre le silence et braver le danger. Massés en bouclier dans les rues et les places de la capitale, par un froid sibérien et démunis de moyens leur permettant de résister, ils avaient, tant bien que mal dénoncé le crime, l’oppression, la xénophobie religieuse et la spoliation du patrimoine du pays.

Il faut avouer, qu’on ne pouvait pas espérer mieux qu’un événement rassembleur, une pensée nouvelle et une entreprise en mesure de mettre fin à un long calvaire sous la poigne de l’étau.

2- Localisation

Nous fûmes, donc, au rendez-vous, dans un hôtel calme et d’aspect accueillant. Traversée d’une spacieuse piste attenante à une vaste cour surplombée par une architecture alliant le baroque à la simplicité moderniste. On se sent bien familier dans ce cadre attractif.

Parmi nous, certains sont venus de loin; on devrait être fatigué en cette fin de journée torride qui enfreint la modération de la méditerranée; peine sitôt consolée par une ambiance détendue afférente à une pulsion grégaire du fait de notre rassemblement.

Outre le motif de notre réunion, il s’agissait d’une rare occasion de constituer une idée sur la nature et le caractère de «l’action citoyenne» : centre d’intérêt de notre réunion. Voici en gros, ce qui fît qu’avant le commencement des travaux, on eût voulu savoir si oui ou non, notre rassemblement devait s’inscrire dans le cadre classique d’une association de société civile.

3- Conceptualisation

Pas forcément, répliqua un participant, mû par une volonté d’effectuer une percée dans le rituel caduque et avachi, afin d’entrevoir, au-delà des associations de façade et des partis d’intérêt, une force capable de fédérer réellement les citoyens et de les mener sur la voie du salut. Pour plusieurs la connotation : «Société civile» est devenue, depuis longtemps, une arrière-boutique au service des partis. Certaines associations seraient impliquées dans la mobilisation des jeunes de chez-nous pour aller guerroyer, ailleurs – en Syrie.

Jusqu’à ce qu’on fût au niveau du seuil de l’entrée de l’enceinte, tout donnait l’impression qu’on avait les mêmes motivations; étant donné la situation inquiétante de notre pays. Mais ce à quoi nous tenons en tant qu’individus libre d’engagement partisans, c’est d’aboutir à une vision claire des moyens préconisés et de s’accorder sur leur efficacité.

Toutefois, malgré l’esprit ouvert et la bonne volonté, on pouvait avoir des points de vue différents quant à la notion de société citoyenne par opposition à la société civile? Deux modes, deux structures deux concepts. On était dans la tourmente. S’agit-il de définir le collectif d’indépendants ? Par rapport à quoi ? À qui ? Le considérer comme groupe insolite et passer ?

Bien qu’on ait pu considérer notre hôte d’entité politique insolite ou tout simple de groupe de pression, le souci de la modestie de l’auditoire dut ne pas se prononcer en dépit d’une opposition qui a tenu à accuser la société citoyenne d’empiéter sur le terrain des associations de la société civile.

4- L’action sera l’ultime juge

Je pense que, vu la notoriété de certains présents, le verdict en faveur de l’authenticité de la définition de la société citoyenne aura besoin d’une rallonge de temps, pour qu’il soit de fait et de force reconnu comme phénomène natif d’une profonde déception des partis politiques et de leurs groupes associatifs inhérents. Une fois la brume dissipée, on verra dans l’embellie que les définitions ne sont que des étiquettes et que ce qui compte c’est le produit.

Cette présence à l’appel de l’Initiative citoyenne, ne représente-t-elle pas en elle-même une reconnaissance ? Quoi qu’il en soit : ce nouveau concept ayant réellement son référent dans les marches de protestation, dans les sit-in de contestation et dans les mouvements de revendication, ne devrait pas choir. De même qu’il fallait avouer, que sur l’autre rive, la société civile y est et reste – autrement dit – l’univers associatif civil réputé pour ses préoccupations humanitaires, caritatives, pour sa défense des droits de l’homme et pour ses diverses campagnes sanitaires et environnementales…

L’important est qu’on ne confonde pas les deux rives; car chacune d’elle bifurque dans un sens. D’autant que pour l’association à caractère société civile, le volet politique n’y est pas est inclus; par opposition à la société citoyenne où l’action tend à redresser sinon à transformer le modèle politique.

* Universitaire.

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