Accueil » Au 1er jour des projections des JCC, le cinéma maghrébin frappe fort

Au 1er jour des projections des JCC, le cinéma maghrébin frappe fort

Les cinémas algérien et marocain ont toujours brillé aux JCC avec des films réalistes qui font échos à des thématiques sociétales très semblables aux nôtres. Cette année encore, ils frappent fort avec deux films de haute facture : ‘‘Sofia’’ et ‘‘Vent divin’’.

Par Fawz Ben Ali

Après le tapis rouge réservé aux stars dans une soirée d’ouverture pailletée tenue pour la première fois à la Cité de la Culture de Tunis, samedi soir 3 novembre 2018, le coup d’envoi des projections a été donné le lendemain, dimanche 4 novembre, pour cette nouvelle édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC).

Le public a répondu présent dès la première journée et une ambiance particulière s’est installée sur la mythique avenue Habib Bourguiba à l’occasion du festival le plus populaire du pays depuis 1966.
Le calme habituel des dimanches a laissé place à des ruelles envahies de festivaliers, de longues files d’attentes, et des projections données à guichets fermés.

Pour ce premier jour de projections, la salle du Colisée a accueilli les premiers films fictions de la compétition officielle. Et c’est le cinéma maghrébin qui a ouvert le bal avec ‘‘Sofia’’ de Meryem Benm’Barek (Maroc) et ‘‘Vent divin’’ de Merzak Allouache (Algérie). Deux projections qui ont affiché «complet» et qui ont annoncé une meilleure organisation pour cette nouvelle édition, grâce notamment au nouveau système de billetterie et à la décentralisation de certaines projections vers la Cité de la Culture.

‘‘Sofia’’ ou les relations sexuelles hors mariage

‘‘Sofia’’ de la jeune cinéaste marocaine est l’un des plus attendus par les cinéphiles puisqu’il avait fait beaucoup parler de lui au dernier Festival de Cannes dans la section «Un certain regard» où il avait remporté le Prix du meilleur scénario.

Pour son premier long-métrage, Meryem Benm’Barek a choisi de s’attaquer à une série de sujets épineux au Maroc, notamment les relations sexuelles hors mariage qui sont passibles de prison, mais aussi à la corruption, à la misère sociale, aux libertés individuelles, au déni de grossesse et à la maternité… des questions qu’elle a réussi à traiter à travers le personnage de Sofia et de sa famille.

Enceinte hors mariage, Sofia, une jeune fille marocaine, se voit accoucher en cachette avec l’aide de sa cousine, étudiante en médecine, et se trouve victime d’un système judiciaire absurde qui menace de l’envoyer en prison.

‘‘Sofia’’ s’inscrit dans la lignée d’un cinéma socio-féministe où la question de la femme et des libertés individuelles est fortement liée aux problèmes sociaux et économiques; d’ailleurs la jeune cinéaste nous livre un récit surprenant fait de rebondissements inattendus, grâce notamment au caractère taciturne et énigmatique de l’héroïne du film qui refuse de s’attribuer de rôle de victime et qui s’engage dans une lutte seule contre tous, qui nous rappelle en quelque sorte le film tunisien ‘‘La belle et la meute’’ de Kaouther Ben Hania, où il s’agit aussi de lutte féminine contre un système pourri.

‘‘Vent divin’’ : dans la tête de deux terroristes

D’autre part, le public tunisien avait aussi rendez-vous avec le dernier film du grand cinéaste algérien Merzak Allouache, grand habitué des JCC où il avait reporté deux Tanit d’or pour ‘‘Les aventure d’un héros’’ (1978) et ‘‘Salut cousin !’’ (1996).

Pour son nouveau film, Merzak Allouache a mené une sorte de suite fictionnelle de son dernier documentaire ‘‘Enquête au paradis’’ qu’on a récemment vu dans les salles tunisiennes et où il analyse la perception des musulmans de l’au-delà et la radicalisation des jeunes algériens.

Comme ‘‘Enquête au paradis’’, ‘‘Vent divin’’ est aussi entièrement filmé en noir et blanc pour nous raconter l’histoire d’un couple de terroristes (Amine et Nour) caché dans une maison au milieu de nulle par dans désert algérien et qui s’apprêtent à se faire exploser une raffinerie de pétrole. Le film est un portrait psychologique très juste des islamistes qui s’engagent dans des actes terroristes, où il s’agit d’explorer leurs doutes, leurs faiblesses, et leurs désirs, à la veille de l’élaboration de leur mission.

‘‘Vent divin’’ tient son excellence avant tout du jeu d’acteur incroyable de Sarrah Layssac qu’on a aussi connue dans ‘‘À mon âge je me cache encore pour fumer’’ (sélection officielle des JCC 2016); un rôle des plus complexes sublimé par une direction photographique inédite qui nous fait fortement penser à l’univers esthétique d’Ingmar Bergman surtout dans son chef-d’œuvre ‘‘Le septième seau’’ où rôde aussi le fantôme de la mort tout au long du film.

Les cinémas algérien et marocain ont toujours brillé aux JCC avec des films réalistes qui font échos à des thématiques sociétales très semblables aux nôtres. Cette année encore, le cinéma maghrébin frappe fort dans la compétition autant avec les vétérans que la nouvelle génération des cinéastes.

Donnez votre avis

Votre adresse email ne sera pas publique.

error: Contenu protégé !!