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Etude de la Biat : Les industries culturelles ont un avenir en Tunisie

En marge des Journées cinématographiques de Carthage et un mois avant l’inauguration à Tunis de son multiplexe dédié au cinéma, la Banque arabe internationale de Tunisie (Biat) publie une étude sur les industries culturelles et créatives en Tunisie.

Par Zohra Abid

Cette étude portant sur les questions culturelles (cinéma, musique, édition, théâtre, beaux arts, audiovisuel…), effectuée par une institution privée, a été présentée lors d’une rencontre avec les médias organisée mardi 6 novembre 2018 au siège social de la banque, en présence notamment d’une représentante de l’Agence de promotion des investissements (API), car le sujet porte aussi sur la création d’entreprises à vocation culturelle.

Viabilité de l’économie créative

Mohamed Elyes Ben Rayana, responsable ‘Banque de Financement et d’Investissement’ au sein de la Biat, qui était entouré de ses collègues Khansa Bouassida et Seddika Ben Hassine Khlif (de la direction Communication institutionnelle), ainsi que Malek Ellouze, Héla Hana Garnaoui et leurs collaborateurs de la Fondation Biat, a rappelé que la banque a toujours investi dans le secteur culturel, en soutenant plusieurs projets, actions et événements.

En plus de l’accompagnement des compétences et du soutien aux porteurs d’idées dans le domaine des nouvelles technologies apportés par la Fondation Biat, créée au printemps 2014, l’établissement bancaire a toujours répondu présent à chaque fois qu’il s’est agi de promotion des arts dans leur diversité. La Biat, souvenons-nous, a contribué à la restauration et à la réhabilitation du Théâtre municipal de Tunis, sponsorisé des galeries de peinture et des artistes peintres, des photographes, des sculpteurs (les œuvres de Rym Karoui qui égayent le siège de la banque en témoignent), ainsi que diverses manifestations, comme le festival Rouhanyet de Nefta, dédié à la musique et au chant mystique, Dream City, Manarat, ou encore les journées de théâtre au Kef…

La Biat est de plus en plus convaincue que l’économie culturelle représente un levier de croissance pour le pays. «La culture est un élément fondamental pour le développement du pays. En tant que banque, on pense également que la culture peut être une industrie qui peut fonctionner grâce à un business model viable. Car la rentabilité économique est importante dans ce genre d’industrie et peut être garantie», a indiqué M. Ben Rayana, en donnant l’exemple de Walt Disney dans l’industrie culturelle, qui est l’une des plus importantes ressources de l’économie des Etats-Unis.

Etats des lieux et potentiel des industries culturelles

Sans pousser la comparaison avec les Etats-Unis, qui sont très avancés dans ce domaine, l’industrie culturelle en Tunisie a un potentiel qu’il s’agit d’explorer, d’identifier et d’exploiter. Et ce sont les hommes et femmes du secteur qui doivent s’y mettre.

«On parle beaucoup aujourd’hui de créativité, de talents mais aussi d’obstacles. Et c’est la raison pour laquelle on a lancé en 2018 cette étude avec Ahmed Amine Azouzi, expert dans les questions des médias et des industries culturelles, ancien consultant Media & Entertainment dans les cabinets Accenture et BearingPoint à Paris et actuellement directeur de Pathé Tunis City (comme l’a présenté  Khansa Bouassida, Ndlr). Pour développer cette industrie, le partenariat entre public et privé s’impose. C’est l’une des recommandations qui ressortent de cette étude que nous avons soumise au ministère des Affaires culturelles», expliquera encore M. Ben Rayana.

M. Azouzi a fait remarquer que la matière première de cette industrie ne se trouve ni dans les fils du textile ni dans le pétrole, mais dans les idées des hommes et des femmes et leurs imaginaires foisonnants et intarissables. C’est, d’ailleurs, la raison pour laquelle l’Unesco s’intéresse de plus en plus aux produits culturels, tous secteurs confondus.

Où se place l’industrie culturelle tunisienne ?

L’économie de la créativité est très présente, enchaîne M. Azouzi, surtout aux Etats-Unis où elle représente 10% du PIB, en Union européenne où ce taux est de 6%, mais aussi au Liban avec 4,75%. Ce pays du Proche-Orient est le 1er exportateur de livres dans le monde arabe et notamment vers la Tunisie. Au Brésil les industries culturelles sont également en très forte croissance. «Notre industrie culturelle, qui représente seulement 0,6% de notre PIB, reste en-deçà des attentes et, surtout, du potentiel existant. Et c’est pour cette raison qu’on a rencontré une trentaine d’experts (acteurs économiques, culturels, gouvernementaux, locaux et internationaux) pour étudier le cas tunisien, évaluer le potentiel de développement et identifier les actions prioritaires à mettre en place. L’analyse des statistiques disponibles est venue compléter ces entretiens avec un travail de benchmarking de pays aux configurations comparables à la Tunisie», a ajouté M. Azouzi.

L’étude a démontré que les industries culturelles et créatives représentent un secteur porteur en Tunisie où les potentiels restent peu exploités. «Il y a demande même si elle est latente. Il suffit de l’activer et surtout dans les régions, où les populations ont du mal à accéder aux produits culturels. La carte géographique montre une forte concentration des salles de cinéma dans certaines régions. On compte 50% des salles à Tunis dont 7 sont au centre-ville. On ne peut donc pas demander aux Tunisiens d’aller au cinéma quand il n’y a pas de salles près de chez eux», explique l’expert, qui montre, par la même occasion, une voie intéressante de développement et un filon pour d’éventuels investisseurs.

Plus on consomme, plus on a envie d’en consommer

Côté consommation, le Tunisien consacre 1,1% de son budget aux dépenses culturelles, alors qu’il en réserve 4% pour les cafés, hôtels et restaurants. Mais une chose est sûre, à chaque fois qu’il y a un événement culturel, le Tunisien répond présent, insiste l’expert, ajoutant que le Tunisien préfère consommer tunisien. C’est ce que prouvent les sondages et les études effectués sur le sujet. «Plus on consomme des produits de création, plus on a envie d’en consommer davantage, mais lorsqu’on ne consomme pas, il n’y a plus de marché, et c’est un cercle vicieux», insiste M. Azouzi, qui souligne l’effet multiplicateur de l’investissement culturel, lequel génère des retombées économiques dépassant souvent les attentes.

Sur un autre plan, les médias, a tenu à préciser M. Azouzi, n’accordent pas d’importance pour la promotion de la créativité artistique et culturelle. «Pour les radios, à part Misk, qui se spécialise dans la culture, toutes les autres sont généralistes et n’accordent pas beaucoup d’intérêt à la culture. Pourtant, il y a bien des projets qui ont pu être financés grâce à une amorce apportée par le mécénat et qui se sont imposés. Comme la Maison de l’Image, qui a fait sa percée dans la promotion des photographes tunisiens lors d’une rencontre internationale à New York. Cette réussite confirme la viabilité de ce projet», explique M. Azouzi.

L’expert évoque également le potentiel de développement qu’offre aujourd’hui internet et l’univers digital qui a propulsé des chansons comme « Ya Lili » du rappeur tunisien Balti, dont le nombre de vues sur Youtube a explosé et même dépassé des chansons de grands artistes américains. «On a un potentiel énorme. Il suffit de structurer et de financer l’offre. On est vraiment assis sur une mine d’or, mais qui est mal exploitée. On se contente du fait que l’Etat finance quelques projets, mais ceci est dépassé depuis les années 1960 et n’est plus d’actualité», souligne M. Azouzi, qui évoque un autre aspect important, l’arsenal juridique, qui n’est plus adapté aux exigences de la situation actuelle et doit être revu car l’Etat, qui joue parfois le rôle de concurrent, doit se contenter d’être un incitateur. Parmi les obstacles mis par l’Etat au développement des industries culturelles, l’expert cite, à titre d’exemples, l’interdiction de la sortie d’une œuvre d’art contemporain du territoire tunisien ou la complexité de la procédure d’exportation du livre.

Sept recommandations ressortent de cette étude, dont une portant sur les avantages qu’offre le canal digital pour promouvoir les talents et diffuser les biens créatifs. Autre recommandation importante: l’Etat, qui reste le 1er investisseur dans la culture, est appelé à jouer un rôle de régulateur et de facilitateur à travers la révision du cadre juridique et organisationnel et, surtout, du système de subvention et d’aide à la création.

L’étude intitulée «Etat des lieux des industries culturelles et créatives en Tunisie» est téléchargeable dans la rubrique « Recherche économique » sur le site web de la Biat.

La BIAT impliquée dans l’accompagnement des talents

La Biat, qui compte 203 agences à travers le pays et constitue un groupe bancaire solide avec ses filiales dans les domaines de l’assurance, de la gestion d’actifs, du capital-investissement, de l’intermédiation boursière et du conseil, ne cesse de parrainer des projets.

Depuis quelques mois, des offres ont été mises en place pour financer les productions cinématographiques dont un crédit d’accompagnement à la trésorerie à court terme, un crédit d’investissement à hauteur de 10% du budget global du film avec un plafond de 150.000 dinars et une formule de prise de participation dans le film à hauteur de 10% du coût global plafonnée à 50.000 dinars.

Rappelons aussi que la Fondation Biat pour la jeunesse, qui s’est donné pour principale mission la promotion de la jeunesse à travers une quinzaine de projets concrets, s’apprête à lancer un projet visant à identifier, soutenir et accompagner les meilleures initiatives créatives. L’objectif est de contribuer activement au développement de ce secteur à fort potentiel. A ce jour, plus de 35.000 jeunes tunisiens ont bénéficié de ses actions.

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