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Les Gilets jaunes et le risque de contagion en Tunisie

Béji Caid Essebsi, Youssed Chahed ainsi que tous leurs courtisans seraient bien avisés de regarder avec appréhension ce qui se passe en France, avec la radicalisation du mouvement des Gilets jaunes.

Par Wael Mejrissi

Voilà qui devrait donner à réfléchir pour nos gouvernants. Une révolte d’une ampleur et d’une forme inédites est en train de prendre forme dans toutes les villes de France pour défendre le pouvoir d’achat et dénoncer les injustices sociales, fiscales et un système politique devenu au fil du temps antidémocratique.

L’économie est littéralement asphyxiée par les blocages des principales artères et les pillages qui ébranlent sérieusement le pouvoir exécutif depuis l’élection du président Emmanuel Macron.

Des indicateurs économiques et sociaux calamiteux

Béji Caid Essebsi, Youssed Chahed ainsi que tous leurs courtisans seraient bien avisés de regarder ce qui se passe en France avec appréhension. Les indicateurs économiques et sociaux sont au moins aussi calamiteux en Tunisie alors que les gouvernements se succèdent les uns aux autres sans véritable résultat. Le taux de chômage avoisine les 15% de la population active et à ce jour, aucune politique économique digne de ce nom n’a été proposée pour endiguer ce fléau qui pousse tous les chômeurs, les travailleurs pauvres, les exclus à défier la mer Méditerranée au péril de leur vie dans l’espoir d’une vie meilleure.

La révolte qui secoue le pays des Lumières risque bien de donner des idées aux classes populaires de la Tunisie dont le pouvoir d’achat, déjà bien éprouvé par des salaires très bas, suit son inexorable descente aux enfers avec le concours d’une inflation qu’aucune autorité politique ni économique ne peut contenir.

D’ailleurs la contagion a déjà commencé dans la capitale belge et la Tunisie pourrait très bien devenir le prochain théâtre d’un nouveau soulèvement populaire pour revendiquer la dignité, la liberté ayant déjà été acquise après le soulèvement de 2011. Cette dignité que les Tunisiens d’en bas n’ont finalement jamais obtenue alors que la chute du président Ben Ali était l’œuvre des classes modestes et des très pauvres dans les régions délaissées par les pouvoirs publics en matière de santé, de sécurité et d’emploi.

Une caste politique qui se sert au lieu de servir

La révolution du 14 janvier 2011 n’a que sept ans et là voilà déjà un lointain souvenir pour le président de la république, le chef du gouvernement, Rached Ghannouchi, le chef d’Ennahdha, le parti le plus puissant du pays, et tous les politiciens chevronnés guidés par l’appât du gain et non par le souci permanent de l’intérêt général.

Un climat insurrectionnel est loin d’être un scénario de politique-fiction au pays du jasmin alors que la situation socio-économique s’est considérablement dégradée depuis le départ précipité du président déchu.

Les tractations internes aux partis politiques, les jeux de chaises musicales ministérielles, les compromissions au service des ambitions personnelles sont autant d’ingrédients capables de nous conduire encore une fois vers un climat insurrectionnel qui chasserait toute une caste politique qui se sert au lieu de servir.

La nomination de Slim Riahi à la tête de Nidaa Tounes, le parti présidentiel, donne d’ailleurs beaucoup de grains à moudre aux contestataires et aux adeptes d’une contre-révolution qui, rappelons le, se sont soulevés avec comme mot d’ordre l’arrêt de la corruption massive devenue un mode de gestion incontournable de notre économie.

L’omniprésence de cet homme d’affaires au passé trouble sur la scène politique tunisienne révèle que nos gouvernants, en plus d’avoir la mémoire courte, n’ont en réalité pas pris la pleine mesure des attentes populaires et citoyennes exprimées le 14 janvier 2011.

Au lieu de faire des plans sur la comète en vue des élections présidentielles de l’année prochaine, il serait plus opportun de méditer les événements menaçant les institutions d’un pays qui n’a pas hésité à couper la tête de son roi en 1793.

Que dit le mouvement des gilets jaunes sur notre époque?

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