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Le poème du dimanche : «Mer» de Mamdouh Adwan

J’ai rencontré le poète syrien Mamdouh Adwan en l’an 2000, lors d’un Printemps de poètes, consacré à l’espérance, qui se déroulait à l’Institut du monde arabe (IMA), à Paris, et auquel prenaient part, des poètes arabes et français. Il m’avait confié ce poème. Le voici traduit…

Né en 1941 dans la province de Hama, il poursuit des études de littérature anglaise à Damas. Il devient journaliste et reporter de guerre. Il décède en 2004.

Poète, dramaturge, romancier, critique. Auteur prolixe, au ton parfois provocateur, il commence à publier dès 1966. Comme poète, il appartient à la seconde génération dite de «La vision», mouvement poétique arabe commencé dès les années cinquante-soixante, exprimant la désillusion de l’être arabe et le sentiment de l’échec. Portant un regard critique sur la société. S’installant dans la modernité et l’engagement politique.

Parmi ses œuvres (poésie en arabe) : L’ombre verte, 1967; Le sang frappe aux fenêtres, 1974; Ma mère poursuit son assassin, 1976; La nuit m’habite, 1987; Le vent a une mémoire première, 1997; L’écriture de la mort, 2000; Vie dispersée, 2004.

C’est la mer

qui répandait le duvet soyeux de sa robe

sur le sable du golfe.

C’est la mer,

qui se retire

ivre de désirs

et œuvre pour atteindre ses fins

dans l’obscurité allègre

Le vent est passé brûlant

révéla le secret de ses amours…

la mer ne visait pas ce tumulte

***

Toute de la nuit je l’observe sans me lasser

Les rochers de la nuit la séduisent

Elle leur arrive à toute allure

Ils en sont épris

Elle en est éprise

L’enfance l’atteint

puis s’étale avant d’arriver

aux sources de ses soupirs sans espoir

Elle coule sur leurs côtés blanchis

revient roucoulant tout doucement.

Le rocher brille d’un autre désir…

Elle en est éprise

surprend son mal d’échine

vieillesse cachée et années

La nuit s’en va parmi les désirs soucieux

Les pas brûlants

Les rochers se drapent

pour éclairer sa flamme

endorment leur silence

déclarent leurs désirs

de séduction en pudeur

deviennent inaccessibles

Ni l’enfant ne les atteint

Ni ce jeune homme n’a retrouvé leur chemin

Ni le vieillard qui est dans l’eau

qui reste en feu comme la lumière dans la flamme

Ils feignent de l’attendre

comme une timide

qui se défend par la ruse voile protecteur

comme la mer ivre qui se protège

derrière l’innocence du manque comme l’agneau

justifiant ce qui s’est passé : j’ai vu une preuve.

Devance son ombre vers les extrêmes

laissant la brillance de sa chemise sur ses traits

flots coulant à la hâte

La mer serre sa chemise aquatique

aux lisières blanches bien ajustées

de postérieurs et de baisers

revient portant le goût de la féminité

entre les vagues du désir

et des confidences

cachant l’infortune de quelques soupirs

Toute la nuit elle s’éprend follement

puis revient vaincue

par ce qu’elle appela preuve d’ennui

Toute la nuit elle s’essouffle

sans se lasser

se rassemble

pour grandir dans le rêve de l’enfance

puis l’observe tremblante

comme un oiseau battant les ailes sous les pièges

Toute la nuit…

Les gémissements des rochers

La respiration de la vierge dans les rêves

sous l’ondulation des baisers

Toute la nuit…

J’étais celui qui désirait

la mer dans le rêve

pour me délivrer de ma bêtise

Comme nous la nuit observait

Les rochers des soupirs

La mer épuisée essoufflée

Sans feintes

***

C’est la mer dans l’ébullition du vacarme

Houleuse sur les plages,

Une fièvre l’embrase dans le golfe.

bout avec ses vagues et ses tempêtes,

soupire ou se retourne brûlante

pour dissimuler ses déceptions

sa lubricité

tandis que nous aux rochers de ses abords

nous recevons sa fragrance.

Texte de présentation et traduction de l’arabe par Tahar Bekri

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