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Daêch, l’alibi politique de Rached Ghannouchi

Rached-Ghannouchi-et-Abou-Baker-Al-Baghdadi

Rached Ghannouchi et Abou Baker Al-Baghdadi, le calife de Daêch.

Rached Ghannouchi fait chanter les Occidentaux : «Vous avez le choix entre Daêch et nous» (traduire : les islamistes d’Ennahdha).  

Par Marwan Chahla

«La compétition la plus importante à laquelle le monde assiste aujourd’hui est celle qui oppose le modèle proposé par Daêch et le modèle tunisien», a déclaré Rached Ghannouchi, hier, au ‘‘Washington Post’’.

En visite aux Etats-Unis depuis dimanche, le président du parti islamiste Ennahdha a tenté d’expliquer à son interviewer, Fareed Zakaria, qu’«il ne s’agit pas d’une confrontation entre l’islam et l’Occident, mais plutôt d’un face-à-face entre l’Etat islamique et nous.»

Et c’est ce «nous» trompeur, tricheur et menteur que le gourou islamiste est allé vendre aux Etats-Unis. C’est ce «nous» illusionniste qui fera écrire à Fareed Zakaria, dans le paragraphe introductif de son interview que «Ghannouchi est le dirigeant intellectuel d’Ennahdha, le parti islamiste tunisien qui, malgré sa victoire aux premières élections libres du pays (le 23 octobre 2011, Ndlr) a accepté de négocier avec ses rivaux politiques, d’en arriver à s’entendre avec eux sur un compromis, de céder le pouvoir et faire, par conséquent, du parcours tunisien l’unique réussite des soulèvements du Printemps arabe.»

Résistance de la société civile à l’islamisation

La suite, pour l’éditorialiste du ‘‘Washington Post’’, est on ne peut plus logique et plus limpide: «C’est ainsi que l’histoire de ce petit pays (la Tunisie, Ndlr) devient un élément crucial dans cette lutte que le monde mène contre l’islam extrémiste de Daêch.»

C’est ainsi, surtout, qu’une certaine manière de voir occidentale – même lorsqu’elle émane d’un brillant analyste comme Fareed Zakaria – évacue l’essentiel du combat que la Tunisie a mené, et mène encore, contre l’installation islamiste dans le pays. C’est ainsi que l’on omet de dire que, pendant 2 années au moins, la Tunisie a lutté de toutes ses forces pour mettre Ennahdha hors jeu, pour le convaincre à s’asseoir à la table des négociations du Dialogue national et remettre les compteurs à zéro, avec la tenue de nouvelles élections – libres et indépendantes, elles aussi ! – qui ont redistribué les cartes politiques dans le pays.

De la résistance de la société civile à l’islamisation de la Tunisie, des assassinats politiques, des morts par plusieurs dizaines dans les rangs des forces de l’ordre, parmi les agents de la garde nationale et les soldats, des attentats terroristes, de tous ces crimes et de toutes les autres pertes encourues par la Tunisie sous les Troïkas 1 et 2, Rached Ghannouchi ne dira pas un mot – et sur tout cela, Fareed Zakaria n’interrogera pas le magicien nahdhaoui…

Le choix entre le mauvais et le pire

Le président d’Ennahdha falsifie la vérité pour vendre son produit «islamo-démocrate». Il offre à l’Occident de choisir entre le mauvais et le pire: «La seule manière de battre vraiment l’Etat islamique est d’offrir aux millions de jeunes musulmans un meilleur produit. C’est ce que nous faisons: nous leur proposons la démocratie islamique», insiste-t-il.

Ce «meilleur produit», Rached Ghannouchi ajoute, est «un système politique (…) qui accorde à l’islam et à ses valeurs un certain espace.»

Qu’est-ce donc cet «espace» que le président d’Ennahdha revendique? Est-ce celui que les Nahdhaouis ont cru bon réserver aux «enfants du Cheikh Rached» sur les hauteurs du Mont Chaâmbi pour qu’ils «s’oxygènent»? Est-ce l’espace de la Constituante où les députés d’Ennahdha ont tenté d’imposer la charia et «la complémentarité femme-homme»? Est-ce cet espace qui a permis aux dirigeants d’Ennahdha et leurs associés Cpristes de dérouler le tapis rouge aux illuminés proche-orientaux du wahabbisme et du salafisme pour qu’ils prêchent librement leur extrémisme religieux, appellent les jeunes au djihad et sèment les graines de la haine et de la discorde ?

En Tunisie, nous connaissons les réponses à toutes ces interrogations. L’expert en affaires étrangères du ‘Washington Post’ n’a pas posé ces questions — c’est bien dommage.

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