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Sur les traces d’Abdelwaheb Meddeb à Marrakech et Tanger

La galerie de l’Institut français de Tunisie (IFT) accueille en ce moment une exposition photographique de Jellel Gasteli en hommage à l’écrivain Abdelwaheb Meddeb.

Par Fawz Ben Ali

Cette exposition intitulée «Les carnets de Marrakech et de Tanger» est un hommage que l’artiste photographe a souhaité rendre à son défunt ami, écrivain, poète et animateur de radio (1946-2014).

Connu pour être un fervent défenseur de l’islam libéral, en rappelant toujours que l’intégrisme est une ‘‘Maladie de l’islam’’, titre de l’un de ses plus célèbres ouvrages, Abdelwaheb Meddeb était certes un penseur engagé mais aussi un grand amoureux d’art et de voyage. C’est d’ailleurs cet axe là de sa personnalité qu’on a mis à l’honneur à travers cette exposition dont la genèse est née en novembre 2015 suite à un entretien fortuit entre Jellel Gasteli et Amina Meddeb, l’épouse de l’écrivain franco-tunisien.

Jellel Gastelli parle de son amitié avec Abdelwaheb Meddeb

Jellel Gastelli évoque son amitié avec Abdelwaheb et Amina Meddeb.

Textes transfrontaliers nourris de cultures hétérogènes

Les différents supports et traces que cet homme de l’écrit a laissés constituent une œuvre polymorphe où il a toujours tenu à mettre à l’honneur ce qu’il appelait sa «double généalogie» française et arabo-musulmane avec des textes transfrontaliers nourris de cultures hétérogènes.

Amina Meddeb (décorée de l’ordre de commandeur de l’ordre de la république par le président de la république Béji Caïd Essebsi en 2015) a pris la décision de faire sortir certains écrits de l’ombre. Il s’agit des carnets de voyage d’Abdelwaheb Meddeb portant sur différentes villes (Tunis, Marrakech, Tanger, Fès, le Caire, Jérusalem…). «Ces manuscrits étaient des textes préparatoires à des livres à venir», dit-elle.

Matériaux incontournables, ces carnets représentaient un véritable compagnon de voyage dont Abdelwaheb Meddeb ne se séparait quasiment pas lors de ses expéditions pour y verser ses états d’âme, ses vives impressions et ses intuitions passagères. «Le temps passe et m’emporte sans que je vive la conscience de son cours. C’est dans cette éternité de l’instant que je séjourne», écrivait-il.

Poussé par la curiosité de lire «cette accumulation de plusieurs carnets et cahiers colorés» laissés dans un coin de l’appartement d’Amina Meddeb à Marrakech, Jellel Gasteli prend l’initiative de faire connaître ces perles manuscrites au grand public, sous la bénédiction de leur gardienne.

Amina Meddeb, Olivier Poivre d'Arvor et Jellel Gastelli.

Amina Meddeb, Olivier Poivre d’Arvor et Jellel Gastelli. 

Ensemble, ils entament ce projet de reconstitution sur les traces des mots d’Abdelwaheb Meddeb, en se focalisant sur ses voyages au Maroc, pays où ses aïeuls avaient trouvé refuge avant de s’établir à Tunis. Marrakech était une ville qui lui tenait particulièrement à cœur, «cette contrée africaine trafiquant entre la montagne, le désert et l’océan», écrit-il.

Un écho photographique personnel

Tout comme son grand ami, Jellel Gasteli porte dans son œuvre sa double appartenance culturelle franco-tunisienne où il charge les images d’impressions de voyage et de points de vue intimistes sur les hommes, les passages et les territoires qu’il traverse.

Grâce aux longues réflexions et aux percutantes descriptions des écrits retrouvés, l’artiste photographe a su trouver sa matière première pour proposer une lecture très personnelle et faire un brillant écho photographique, avec liberté et beaucoup de respect vis-à-vis de l’esprit du texte et sans aucune prétention.

Jellel Gastelli

Le résultat est une série de 15 photographies en grand format prises à partir de février 2016 aux alentours de la ville rouge, en guise de retranscription des mots en images et de l’imaginaire en palpable.

Des gros plans pimentés de couleur ocre où l’instinct du photographe prend le soin de s’attarder sur les détails qui font toute la différence (minarets, pierres, murs…), rien n’a semblé échapper à l’œil averti de Jellel Gasteli.

«Si Abdelwaheb avait été présent, nous aurions trouvé matière à dialogue à partir de son point de vue d’esthète érudit. Le regard que la photographie permet de porter sur la perception du monde favorisait entre nous cette forme de partage des émotions et nous liait», témoigne-t-il.

Jellel Gasteli et Amina Meddeb comptent travailler sur de nouvelles expositions portant sur d’autres villes traversés par Abdelwaheb Meddeb.

L’exposition ‘‘Les carnets de Marrakech et de Tanger’’ se poursuit jusqu’au 11 juin 2017 à la galerie de l’IFT, au centre-ville de Tunis.

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