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Nabil Karoui – Rached Ghannouchi, amis d’hier, adversaires d’aujourd’hui

Dans la soirée du mardi, 1er octobre 2019, Nabil Karoui, le candidat de Qalb Tounes, au deuxième tour de la présidentielle, actuellement en détention préventive pour des affaires de corruption financière, a adressé, depuis la prison, une lettre au président du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi, dans laquelle il répond aux déclarations récentes de ce dernier à son encontre, assurant qu’à la base, c’est lui qui refuse de s’allier avec le parti islamiste.

Par Cherif Ben Younès

Apparemment, rien ne va plus entre les anciens copains, Ghannouchi et Karoui, qui ont, chacun de son côté, découvert l’un chez l’autre, du jour au lendemain, tous les défauts du monde.

Deux jours après les déclarations du chef du parti islamiste, à l’encontre de Karoui, l’accusant implicitement de populisme («Nous, on n’a pas de pâtes à distribuer aux pauvres») et évoquant les soupçons de corruption qui l’entourent, afin de justifier le soutien officiel de son parti à l’autre candidat, Kaïs Saïed, hier, c’était au tour du fondateur de Qalb Tounes de répliquer…

«Votre position entre dans le cadre de votre politique de désinformation. La vérité est que c’est moi qui refuse de m’allier avec vous et votre parti, et le fait que je suis prisonnier, pour des raisons connues de tous, en est la plus grande preuve», a-t-il répondu.

Dans la suite de sa lettre, M. Karoui a relaté les raisons pour lesquelles il refuse cette alliance. Parmi celles-ci, il y a notamment le fait que le parti islamiste soit soupçonné d’être impliqué dans les assassinats de Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi et Lotfi Nagdh, entre autres. Implication découverte un peu tardivement par Nabil Kaoui, qui, jusqu’à la veille de son incarcération, était très proche d’Ennahdha et faisait même la com’ de son président (souvenons-nous de l’interview de Ghannouchi avec Nessma, en 2017, au cours de laquelle ce dernier a porté le costume cravate pour la première fois de sa vie, et ce sur le conseil de son spin doctor Nabil Karoui).

Nabil Karoui a, d’autre part, accusé Ghannouchi et Ennahdha, avec un certain retard tout de même, d’avoir contribué à envoyer des jeunes Tunisiens en Syrie, faisant d’eux des terroristes.

 

Nabil Karoui, faisant l’éloge de Rached Ghannouchi et d’Ennahdha, en 2017

D’un autre côté, le patron de Nessma a affirmé que ce parti est derrière l’amendement du code électoral, qui a failli l’éliminer de la course électorale, estimant que le président défunt, Béji Caïd Essebsi a intentionnellement refusé de le signer avant de mourir. «Par la suite, vous avez recouru à l’aile judiciaire de votre appareil secret pour m’arrêter, puis me garder en prison et m’exclure de la scène politique», a-t-il ajouté, mettant ainsi en doute l’indépendance de la justice, dont il faisait l’éloge il y a encore quelques jours.

Le patron de la chaîne de télévision Nessma a également mis l’accent sur les échecs d’Ennahdha, en tant que participant principal à la gouvernance du pays, sur les plans économique, politique et social, depuis la révolution de 2011 : «Je refuse de m’allier avec vous et votre parti, parce que vous êtes responsables de l’appauvrissement du peuple tunisien, alors que vous avez bénéficié des compensations, des postes, de l’Etat et de ses moyens»

«Je refuse de m’allier avec vous et votre parti car vous ne voyez ni embarras ni honte à parler de la révolution et de la résistance à la corruption, malgré toutes les accusations et les soupçons qui vous concernent, vous et votre parti, avec le témoignage de vos plus proches conseillers et des dirigeants les plus honorables de votre parti», a-t-il poursuivi.

Rappelons que le deuxième tour de l’élection présidentielle anticipée devrait avoir lieu le 13 octobre courant.

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