La crise de la Covid-19 a révélé les retards de la Tunisie en matière de santé publique en général et de sa numérisation rationnelle en particulier, et, par conséquent, les priorités et les urgences dans ce domaine afin de prévenir des nouvelles crises sanitaires, sociales et économiques pouvant tirer le pays vers la décadence au lieu du progrès.
Par Taoufik Halila *
Cela fait des années que plusieurs gouvernements tunisiens ont intégré, dans leurs programmes de développement du pays, des projets et des plans pour la numérisation des services publics de la santé. Il est décevant de constater qu’aujourd’hui, et malgré les budgets importants qui ont été alloués à ces actions de numérisation, nous sommes encore dans un stade qui ne répond pas aux aspirations et besoins du citoyen et de la société.
Des échecs sur toute la ligne
Les principales défaillances pour le déploiement d’une santé publique numérique productive et rationnelle en Tunisie peuvent être énumérées dans les points suivants:
– une gestion des médicaments avec une traçabilité qui devrait être analysée et améliorée;
– une faible culture de partage des compétences chez le corps médical (qualité très importante pour le développement de la santé numérique) et une résistance au changement;
– un manque de cadre juridique définissant et régissant clairement le dossier médical;
– un retard dans l’intégration des systèmes numériques des principaux acteurs de la santé en général, à savoir la CNAM, la Pharmacie centrale, les officines, les laboratoires d’analyses…
Il est important de signaler que, depuis 2017, il a été établi un cadre stratégique pour la modernisation du système d’information de la santé publique tunisienne, financé par l’Agence française de développement (AFD) pour un montant de 500 000 Euros, et dont le but était de faire émerger des projets d’investissement qui devaient démarrer à partir de 2018 et qui en principe devaient être financés par l’AFD ou d’autres bailleurs de fonds (le programme Tunisie digitale 2020 a programmé un montant de 70 millions de dinars pour le financement du programme de la santé numérique en Tunisie).
Malheureusement, on constate que ce programme d’investissement n’a pas donné les résultats escomptés, et qu’il est urgent de passer à de nouvelles stratégies et de nouveaux moyens pour mettre en œuvre cette action dans un délai rapide et imparti avec un partage des rôles bien établi entre tous les intervenants et responsables afin d’atteindre les objectifs d’une santé numérique inclusive pour toutes les composantes de la société tunisienne.
La crise de la Covid-19 pourrait être une chance pour rattraper les retards
La crise de la Covid-19 a mis à nu en Tunisie, le manque à gagner dû aux retards dans l’exécution de la numérisation de la santé publique, ce que suggère une analyse des causes de cette défaillance afin d’y remédier et d’écarter les responsables de cet échec pour ne plus répéter les mêmes erreurs, prémunir la nation contre les abus des incompétents et apporter au citoyen son droit à la santé qui est une condition sine qua non de son épanouissement et du développement du pays.
Pour revenir à l’histoire, il est clair que toute épidémie sanitaire offre l’occasion d’un changement politique et social qui touche à la stabilité de la société. Tout ce qui se passe actuellement en Tunisie répond tout à fait à cette réalité historique, ce qui nous impose de tirer des conclusions pour le développement du secteur de la santé publique en général et sa numérisation rationnelle en particulier et ce afin de prévenir des nouvelles crises sanitaires et sociales pouvant tirer le pays vers la décadence au lieu du progrès.
* Président de la chambre nationale des intégrateurs des réseaux télécoms.
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