Tunisie : Kaïs Saïed et les «milliards de milliards» spoliés au peuple

Kaïs Saïed continue de fulminer contre «ceux qui ont volé l’argent spolié au peuple» et de les menacer de poursuites judiciaires s’ils ne se résolvent pas à le restituer. Ce sera le remboursement ou la prison, ne cesse-t-il pas de menacer, lui qui avait fait de cette «réconciliation pénale» l’un des points importants de son projet politique. Aussi, et à l’approche de la présidentielle, prévue à l’automne prochain, une avancée dans ce dossier sera un atout de taille pour appuyer son éventuelle candidature à un second mandat.

Par Imed Bahri  

Le président de la république a réitéré ces menaces en recevant, mardi 2 avril 2024, au Palais de Carthage, la nouvelle présidente de la Commission nationale de la réconciliation pénale (CNRP), Mechket Slama, lui rappelant, au cas où elle l’aurait oublié, que «la reddition des comptes est une revendication populaire» et qu’il n’y aura «aucune tolérance ni complaisance envers l’argent volé du peuple, au millime près», laissant ainsi entendre que les anciens membres de ladite commission n’ont pas fait preuve de la rigueur et de la fermeté qu’on attendait d’eux dans le traitement des dossiers qui leur ont été confiés, ce dont témoigne l’insignifiance des montants collectés auprès des hommes d’affaires ayant bénéficié des générosités de l’Etat par complaisance ou de manière illégale.

Une ultime chance

Mme Slama sait donc ce qui l’attend : elle devra être ferme envers ceux qui montrent encore une certaine réticence face à la réconciliation pénale et qui, selon les termes du président, «continuent à user de moyens dilatoires et de subterfuges, comme celui des expertises à répétition, afin de faire baisser la valeur des montants à payer.»

«C’est leur ultime chance avant de se faire traîner en justice et se voir ainsi endosser la pleine et entière responsabilité de leurs actes», a prévenu Saïed, laissant entendre que les hommes d’affaires ayant bénéficié indument de sommes d’argent de la communauté nationale doivent les rembourser sans procrastination au risque de se retrouver en prison.

«Quiconque emprunte volontiers la voie de la réconciliation, n’a qu’à manifester sa volonté sincère», a fait savoir le chef de l’Etat, assurant que celui-ci «aura droit à reprendre ses activités sans crainte de subir le chantage de quelque partie que ce soit.» En revanche, a-t-il souligné, «quiconque prétend pouvoir encore bénéficier de l’impunité, et ne pas rendre des comptes de ses abus, se fera traîner immanquablement devant la justice», ajoutant, sur le même ton menaçant, qu’aucunepartie, à l’intérieur et à l’extérieur, ne pourra lui être d’un quelconque secours pour échapper à la justice.

Des «milliards de milliards»

L’amendement de la loi portant création de la CNRP, en vue de faciliter son travail et de lui éviter les pièges juridiques et les chausse-trapes bureaucratiques, ainsi que la révision de sa composition, sont censées aider à accélérer son travail et à lui permettre d’obtenir de meilleurs résultats en termes de collecte de fonds, condition sine qua non d’une réconciliation effective, les Tunisiens attendant depuis la révolution de 2011 la restitution de l’argent qui lui aurait été spolié sous l’ancien régime par des hommes d’affaires véreux disposant d’appuis au sein de la nomenklatura au pouvoir. Espérons qu’ils n’auront pas à attendre encore longtemps et que les sommes qui seront finalement collectées seront à la hauteur de ses attentes.

Le président Saïed avait estimé ces montants à des «milliards de milliards», selon ses termes, sans préciser l’unité de mesure qu’il emploie, s’agit-il de dinars ou de millimes, mais les experts, eu égard la taille de l’économie tunisienne, ne pensent pas que ces sommes dépasseront, quelques dizaines de millions de dinars, ou dans le meilleur cas, quelques centaines, somme qui, de toute façon, ne risque pas de transformer radicalement le quotidien des gens dans les régions intérieures défavorisées où elles devront être dépensées. Aussi faut-il chercher pour cela d’autres solutions, fondées sur le travail, l’effort et la production des richesses…

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