Tunisie : les «entreprises dormantes» dans le collimateur du RNE

Le Registre national des entreprises (RNE) a soumis à la présidence du gouvernement une initiative législative lui permettant de prendre les mesures administratives nécessaires contre des dizaines d’entreprises dormantes qui n’ont pas été dissoutes et qui peuvent être utilisées à des fins de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.

Le but de cette initiative, selon Adel Chouari, directeur général du RNE, qui parlait dans un entretien avec l’agence Tap, mardi 23 avril 2024, est de permettre au RNE d’intervenir et de prendre des mesures administratives à travers des mécanismes juridiques.

Le responsable a expliqué que ces sociétés sont considérées comme inactives parce que leurs propriétaires n’ont pas réussi à les dissoudre à l’amiable ou par décision de justice en raison d’un litige et ont choisi de les laisser en veille ou de créer d’autres sociétés.

Dans le cadre de son rôle de lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, le RNE s’emploie à maîtriser ce phénomène en modifiant les statuts du registre pour favoriser l’intervention administrative une fois les mesures prises, une solution déjà utilisée à l’international.

Les données relatives à la croissance du nombre d’entreprises immatriculées au RNE révèlent une croissance sur base annuelle de 7% à fin février 2024. Cela laisse présager une reprise de la croissance économique en Tunisie, a indiqué le directeur général du RNE, ajoutant que le nombre d’entreprises enregistrées en janvier et février 2024 a dépassé la barre des 7 000. Cette liste comprend des entreprises, des travailleurs indépendants, des coopératives et des sociétés communautaires. A la fin de l’année 2023, environ 23 923 entreprises de toutes sortes, professions et associations, ont été enregistrées.

Les entreprises représentent environ 13.403 immatriculations, sachant que 93% d’entre elles sont individuelles et 3% des SA (sociétés anonymes).

Pourquoi s’inscrire au RNE

L’immatriculation des entreprises est une obligation légale. L’obtention du numéro d’identification fiscale (NIF) n’implique pas la création de l’entreprise elle-même, a indiqué le directeur général du RNE, invitant les professionnels à enregistrer leurs informations au registre du commerce.

Chouari a souligné la confusion entre l’obtention du NIF et l’inscription au RNE, ajoutant que les personnes exerçant des professions non enregistrées n’ont pas de statut juridique et pourraient être confrontées à des conflits avec d’autres entreprises.

Il a également abordé la question des entreprises non enregistrées, affirmant qu’aucune entreprise ne peut fonctionner légalement sans être inscrite au Registre national du commerce.

D’un autre côté, il a souligné que l’enregistrement n’est pas la première étape pour créer une entreprise. La première étape consiste à obtenir un NIF, puis à accomplir les démarches d’inscription au registre du commerce.

Chouari a souligné que l’existence juridique d’une entreprise commence à compter de la date de son immatriculation au RNE, soit à ses bureaux, soit à travers la plateforme électronique. Il a souligné que les entreprises sont passibles de sanctions en cas de retard dans l’enregistrement ou la mise à jour de leurs données.

Il a ajouté que tout salarié souhaitant vérifier l’existence juridique d’une entreprise peut consulter la plateforme du RNE accessible au public.

La digitalisation en marche  

La digitalisation des services fournis par le RNE devrait atteindre 90% d’ici mi-2025, a annoncé Chouari, expliquant qu’un certain nombre de services ont été entièrement numérisés, tandis que d’autres sont soit en phase expérimentale, soit en phase finale, et certains le seront d’ici deux mois.

Chouari a souligné que le RNE, qui a hérité du ministère de la Justice d’un registre et d’une base de données sur papier des sociétés commerciales, a été créé à une époque où le pays se concentrait sur la numérisation.

«Certains services ne nécessitant pas une visite personnelle du bénéficiaire ont déjà été numérisés depuis la création du RNE, qui a adopté une politique de numérisation progressive selon le calendrier défini», a expliqué Chouari.

Le RNE se concentre actuellement sur la numérisation de la constitution légale des sociétés, à commencer par les personnes physiques, après obtention du NIF. Cette expérience devrait être étendue aux sociétés à responsabilité limitée (SARL), aux sociétés par actions (JSC) et aux sociétés communautaires avec des spécificités telles que le cahier des charges.

Il a souligné que le projet de numérisation du dépôt des comptes des entreprises, considéré comme le projet phare de son institution, sera achevé dans deux mois. Le RNE proposera ce service à moitié prix par rapport à la version papier.

Chouari a souligné que le RNE travaille également au développement d’un système numérique de dépôt des statuts des sociétés, qui devrait être lancé d’ici la fin de l’été.

Ce système permettra la rédaction des principaux contrats d’entreprises et même d’associations, en évitant les erreurs de rédaction liées à l’utilisation de lois pré-écrites, a-t-il précisé, ajoutant que la plateforme impliquera une préparation juridique, y compris le capital et les actionnaires, rationalisant ainsi l’accès à l’information pour les actionnaires, les administrations et les banques.«Lun des avantages de la numérisation est que les changements requis par les entreprises peuvent être introduits à temps», a souligné le premier responsable du RNE, lequel travaille également sur un autre projet de numérisation des contrats et documents, notamment ceux relatifs aux assemblées générales, ce qui fera gagner du temps aux entreprises. Ce projet est cependant entravé par les mesures relatives aux signatures électroniques.

Les travailleurs vulnérables

Sur un autre plan, près d’un million 200 000 personnes travaillant dans les secteurs vulnérables bénéficieront de la plateforme dédiée à l’emploi indépendant qui sera lancée fin septembre, a indiqué Chouari, ajoutant que cette plateforme, destinée aux groupes vulnérables travaillant dans divers secteurs (travailleurs domestiques, coursiers et autres), leur assurerait une protection sociale, surtout en l’absence actuelle d’un cadre juridique pour ces secteurs.

La plateforme, qui sera pilotée par le RNE, aura non seulement des objectifs économiques, mais jouera également un rôle social auprès des groupes vulnérables en créant une base de données générale, a expliqué Chouari, précisant que l’enregistrement se fera progressivement.

Concernant les principaux messages adressés aux opérateurs économiques, Chouari a souligné qu’il existe une relation complémentaire entre eux et le RNE, qui leur offre un mécanisme de protection. Le facteur confiance entre les deux parties reste primordial.

«Tout investisseur à la recherche d’un partenaire en Tunisie doit s’adresser au RNE», a conclu Chouari, ajoutant que les entreprises ont intérêt à mettre leurs données à disposition du RNE, où elles seront protégées.

D’après Tap.

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