«Les Etats n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts», disait le Général de Gaulle. Depuis son retour à la Maison blanche, Donald Trump, homme d’affaires de son état qui cherche le gain partout, ne cesse d’appliquer cette règle vis-à-vis des pays amis historiques des Etats-Unis.
Ridha Kefi
Après l’Arabie saoudite qui doit passer à la caisse, l’Egypte et la Jordanie qui sont sommés d’accueillir les Palestiniens de Gaza sur leur sol, la galaxie Trump s’attaque aujourd’hui à la Tunisie en appelant à couper l’aide américaine à notre pays.
Cette fois ce n’est pas Donald Trump, mais le sénateur républicain Joe Wilson qui s’y attèle, en «exhortant» le Secrétaire d’Etat Marco Rubio de couper «toute aide américaine» à la Tunisie au prétexte que le président Kaïs Saïed est hostile aux Etats-Unis.
Les mots sont crûs, sans nuances ni fioritures diplomatiques : «J’exhorte @SecRubio de supprimer toute aide à la Tunisie dans le cadre de la révision de l’aide étrangère. Il n’y a aucune raison pour que les contribuables [américains] financent ce pays. Kaïs Saïed est un dictateur haineux anti-américain et a transformé une démocratie émergente en un État policier tyrannique. Trump va y remédier», a posté le sénateur sur son compte X, le 30 janvier 2025.
Le sénateur Wilson fait ici allusion à l’arrêt de pratiquement tous les programmes d’aide étrangère américaine en cours en attendant d’examiner s’ils sont conformes aux politiques du président Donald Trump. Cet arrêt a été ordonné par le secrétaire d’État américain aux Affaires Étrangères, Marco Rubio, à la demande du chef de la Maison blanche, qui veut conditionner cette aide à l’alignement total des pays bénéficiaires aux positions et aux intérêts états-uniens.
La Tunisie ne vit certes pas grâce à l’aide américaine et elle compte de nombreux autres partenaires à travers le monde, mais cette aide, surtout sur le plan militaire et sécuritaire, est assez importante pour notre pays.
Il reste à savoir si le Département d’Etat et le Pentagone, qui ont sans doute une appréciation plus nuancée que celle de Wilson, non seulement de la situation en Tunisie mais de l’intérêt qu’ont les Américains à poursuivre leur aide à un pays comme le nôtre qui a toujours compté dans les stratégies militaires des Etats-Unis, étant donnée sa position à la pointe de l’Afrique et au cœur de la Méditerranée, à un jet de pierre de l’Europe.
Les pyromanes qui entourent le président Trump peuvent certes influer négativement ses décisions, et on commence à «goûter» à ce que sera la politique étrangère américaine dans les quatre prochaines années, y compris à l’égard des alliés historiques et stratégiques de Washington comme le Canada et l’Union européenne, qui commencent à en baver.
On peut donc s’attendre à tout de la part du locataire de la Maison blanche, y compris et surtout au pire, mais on peut aussi espérer que, concernant la Tunisie, alliée historique des Etats-Unis dans la région, les «pressions amicales» suffiront pour remettre les pendules à l’heure et que l’on ne viendra pas à jeter le bébé avec l’eau du bain. Même si, à vrai dire, on voit mal la Tunisie «de» Kaïs Saïed rejoindre le club des pays arabes ayant noué des relations diplomatiques avec Israël dans le cadre des fameux «accords d’Abraham» promus par Trump lors de son premier mandat, et qu’il compte relancer à l’orée de son second mandat, pour en faire le point d’orgue de sa politique étrangère en direction du monde arabe. Avis de tempête…
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