Le comportement génocidaire d’Israël vis-à-vis des Palestiniens, sur fond de la litanie «Il faut écraser le Hamas» qui tourne à vide, n’est pas sans rappeler la politique d’extermination de millions de juifs par les Nazis allemands, au siècle dernier. Sauf que pour l’Occident, les juifs d’hier sont remplacés aujourd’hui par les musulmans. (Ph. A Gaza, une mère portant sa fille morte sous les bombardements israéliens).
Jamila Ben Mustapha *

Sans préjuger de la date, impossible à deviner, de la fin de cette guerre entre Israël et le Hamas et qui a débuté le 7 octobre 2023, voilà donc un an et demi, de quelle façon peut-on considérer la situation actuelle au Moyen-Orient?
On pourrait dire qu’Israël a réalisé une victoire matérielle largement prévisible sur le parti islamiste, mais a subi parallèlement une grave défaite morale qui a abouti, pour la première fois avec autant d’intensité, à la sérieuse remise en question de son image dans le monde.
Et c’est l’inverse qui s’est produit pour le mouvement du Hamas dans cette lutte «entre le lion et le lapin», expression utilisée par Dominique Vidal , à savoir, un affaiblissement substantiel de ses capacités certes, mais la constatation qu’il a résisté comme il a pu contre un ennemi beaucoup plus fort que lui – armé qu’il est par les pays les plus puissants – sans avoir déclaré la défaite jusque-là, tel David contre Goliath sur la terre qui a donné naissance à ce mythe symbolique.
La défaite morale d’Israël
On se rappelle l’air assuré avec lequel Benjamin Netanyahu avait annoncé, au début du conflit, la destruction future qu’il présentait comme très rapide, de cette organisation politico-militaire qu’il n’avait pourtant pas réprimée, au début de son existence, rien que pour affaiblir et faire concurrence au Fatah de Yasser Arafat, selon le bon vieux principe du «diviser pour régner». Mais voilà que le nouveau-né devenu unique force politique en 2007 à Gaza, se dresse contre son ennemi complaisant du début, qu’il entreprend d’attaquer l’État qui ne s’était pas opposé auparavant à son financement par le Qatar et son armement par l’Iran.
La principale défaite morale d’Israël est d’avoir notablement allégé, sinon supprimé, le sentiment de culpabilité des pays européens né de l’extermination de millions de juifs par les Nazis allemands, au siècle dernier, et dont il avait amplement profité en prônant à tout-va, la redoutable accusation d’antisémitisme. Cette accusation, il l’a instrumentalisée et utilisée jusqu’à plus soif vis-à-vis de tout ennemi avec ou sans preuves, mais surtout contre les musulmans, eux-mêmes sémites pourtant, et voisins contraints et forcés de ce pays créé en 1948.
Après la Seconde guerre mondiale et l’extermination de Juifs en Allemagne, l’attitude occidentale était «Plus jamais ça». Or, voilà que leurs alliés israéliens, par ce qu’on pourrait interpréter comme un rappel du syndrome de Stockholm où la victime se rapproche de son bourreau, ne sont pas sans rappeler de façon lointaine et affaiblie ce dernier, vu leur comportement criminel et génocidaire vis-à-vis des Palestiniens, en s’engageant dans une attitude démente de destruction dans l’engrenage de laquelle ils se trouvent pris, sur fond de la litanie «Il faut écraser le Hamas» qui a l’air de tourner à vide.
L’Occident démasqué
Un autre aspect important de ce conflit a été une occasion de démasquer clairement un Occident qui, en réalité, n’affirme la nécessité de l’application des principes humains dits universels que pour ses populations, et n’hésite pas à réaliser les pires injustices et infractions à ces droits quand il s’agit de celles du reste du monde.
L’antisémitisme n’étant plus possible vis-à-vis des Juifs, son besoin de trouver un ennemi et un bouc émissaire, fait qu’on le voit se tourner contre d’autres sémites : les musulmans. Pourtant le rejet de ces derniers n’est pas vu comme une autre manifestation d’antisémitisme, terme que l’on veut réserver seulement aux Juifs, mais comme de «l’islamophobie».
On peut ainsi légitimement se demander si cet Occident est, en fin de compte, un promoteur des droits de l’homme comme il le prétend en théorie, ou un redoutable prédateur comme l’illustre dans les faits son Histoire, d’autant plus qu’actuellement, une véritable situation «expérimentale» s’est créée où, en Ukraine, il soutient le pays envahi, et en Palestine, il est du côté du pays envahisseur, ce qui montre nettement la contradiction entre les beaux discours portant sur les principes, et les actes permanents de domination et d’exploitation des pays faibles.
Mais les pays musulmans eux-mêmes étant bien loin d’être éloignés de toute critique, surtout par leur inaction scandaleuse vis-à-vis de l’extermination des Palestiniens, à part une opposition verbale et minimale au conflit pour calmer leurs populations, on peut considérer ainsi de façon schématique que la différence entre les pays du Nord et ceux du Sud est que les premiers exercent leur répression seulement à l’extérieur, démocratie oblige, sur les pays qu’ils peuvent dominer et exploiter, alors que les seconds n’ont le pouvoir de pratiquer cette répression que sur leurs propres citoyens.
* Auteure.
Donnez votre avis