En Tunisie, tous les clignotants sont au rouge. Si la gouvernance frileuse actuelle se poursuit, on peut prévoir un effondrement de l’économie nationale et un soulèvement populaire.
Par Mohamed Chawki Abid *
Aujourd’hui, en Tunisie, toute personne ayant le moindre pouvoir, en abuse sans modération : exécutif, judiciaire, législatif, administration, douane, fisc, gendarmerie, médias, syndicats, clubs sportifs, corporatocratie… Ils arrosent leur gazon, alors que le feu ravage la maison.
Conséquence : la Tunisie poursuit sa chute libre sans soucier ses princes: son PIB dégringolant de 46 milliards USD en 2011 à 32 milliards USD en 2017, soit un affaissement de -30% sur 6 ans, soit une décroissance annuelle moyenne de – 4%, en raison du glissement continu du dinar par rapport aux principales devises (USD et Euro). Son classement mondial du PIB passe de 78e en 2011 à 92e en 2017. Par tête d’habitant, son classement empire en reculant de 93e en 2011 à 108e en 2017.
Des dysfonctionnements en cascade
Les conséquences des dysfonctionnements en cascade sont dramatiques : l’économie se désindustrialise, les PMI se fragilisent, la production de paralyse, les emplois stables se précarisent, le déficit commercial explose, les réserves en devises s’évaporent, l’endettement extérieur explose, l’économie souterraine se revalorise, et le banditisme se généralise.
En outre, les indicateurs socio-économiques sont de plus en plus catastrophiques : chômage, pouvoir d’achat, inflation, injustice sociale, iniquité fiscale, déficit budgétaire, récession économique, ralentissement de filières de production, désinvestissement productif, désertification industrielle, importations abusives, déficit commercial, déficit des paiements extérieurs, surendettement extérieur, etc.
Comme conséquence directe à ce chaos, le Tunisie a été marquée par une dégringolade du 1er au 3e tiers au tableau mondial de compétitivité (Forum économique mondial de Davos).
Pire encore, la Tunisie est blacklistée dans plusieurs domaines : paradis fiscal, blanchiment d’argent, financement du terrorisme, évasion fiscale, fuite de capitaux, mortalité routière, corruption et diverses malversations, économie souterraine, etc.
Une gouvernance frileuse et complaisante
Malheureusement, les princes, qui se relayent aux commandes du pays depuis 7 ans, ne cessent de tourner le dos aux plans de sauvetage salutaire qui leur ont été proposés et argumentés par grand nombre de nos éminents experts et initiés (pourtant programmables et exécutables).
Soit ils sont frileux quant à l’application des réformes requises et la restauration de l’autorité de l’Etat; soit ils sont des opportunistes cherchant à satisfaire les uns et les autres non sans compromettre les chances d’assainissement et de redressement.
Dans chacun des deux cas, ils sont pernicieux pour le pays et devraient être poursuivis pour leurs prestations. On a comme l’impression, pour ne pas dire la certitude, qu’ils préfèrent se conformer aux feuilles de route qui leur ont été filés par des groupes d’intérêts multicolores, afin de conserver leurs postes et bénéficier de golden parachute en cas de crash d’avion.
Si cette gouvernance nonchalante et complaisante, quand elle n’est pas criminelle, se poursuit dans les prochains mois, baignant dans un environnement de plus en plus dominé par la corruption et toutes les formes de malversation, le bon sens nous conduit à prévoir un effondrement peu réversible de l’économie nationale et un soulèvement peu clément de la majorité des concitoyens indignés.
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