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Progressistes tunisiens et socialistes français : la même erreur à 90 ans d’intervalle

Béji Caïd Essebsi / Léon Blum.

Dans ses relations avec les islamistes en général et ceux d’Ennahdha en particulier, l’élite laïque et progressiste tunisienne à commis la même erreur que les socialistes français des années 1935-1940, dans leur mangue de fermeté face au nazisme.

Une centaine de députés socialistes avaient, à l’époque, voté les pleins pouvoirs au Maréchal Philippe Pétain, qui a signé l’armistice du 22 juin 1940 avec le Troisième Reich. Marcel Deat, Jacques Doriot et Pierre Laval, anciens socialistes et communistes, étaient devenus les meilleurs collaborateurs de l’Allemagne nazie. Même Léon Blum avait cru jusqu’à 1939 à «plutôt une mauvaise paix, qu’une bonne guerre…» On connaît la suite… Il sera emprisonné par le régime de Vichy, traduit en justice lors d’une parodie de procès à Riom en 1942, puis déporté à Buchenwald.

Jusqu’à 1939, 90% des socialistes français étaient pacifistes, et pétainistes après… Ils seront partisans de la guerre d’Algérie… plus tard. Ce n’est pas un page glorieuse de leur histoire.

En comparaison, et malgré les circonstances différentes, dès 2011, les laïcs et progressistes tunisiens ont composé avec les islamistes. Nous voyons aujourd’hui le résultat : le parti Ennahdha, filiale des Frères musulmans, avec lequel ils ont cru pouvoir s’allier pour gouverner les à tous laminés… et pour longtemps. Le cimetière des partis progressistes est plein à craquer : Ettakatol, Al-Moatamar, Nidaa Tounès ont presque disparu de la scène. Afek, Tahya, Attayar, Echaâb, Qalb Tounes sont en réanimation… Et on n’a cité que les plus importants d’entre eux.

Pire encore, les dirigeants de ces partis payent aujourd’hui pour leurs mauvais choix d’hier : les Tunisiens leur font assumer la responsabilité de la faillite actuelle de leur pays et de la profonde crise financière, économique et sociale dont il a du mal à se remettre. C’est ce qui explique leurs très mauvais résultats aux élections de 2019 et le mal qu’ils éprouvent à figurer encore dans les sondages d’opinion.

Et c’est ce qui explique aussi, a contrario, la première place dans ces mêmes sondages du Parti destourien libre (PDL) et la montée irrésistible de sa tonitruante présidente Abir Moussi, qui ont toujours refusé tout dialogue avec les islamistes dont ils rendent responsables de la situation catastrophique actuelle en Tunisie. Et, à y voir de près, sans calculs opportunistes, ils n’ont pas tort.

H. J.

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