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‘‘Barakah meets Barakah’’ : La face sombre de l’Arabie saoudite

‘‘Barakah meets Barakah’’, du jeune cinéaste saoudien Mahmoud Sabbagh, est une la comédie romantique, qui met en lumière la face sombre de l’Arabie saoudite.

Par Fawz Ben Ali

Ce film est sorti dans les salles tunisiennes le mercredi 8 février, après y avoir été représenté dans le cadre des Journées cinématographiques de Carthage (JCC 2016), dans la section «Première œuvre Tahar Chariaa».

Le film a eu un écho international suite à sa présence dans les festivals de cinéma les plus prestigieux du monde comme La Berlinale ou encore Le Festival international du film de Toronto.

A 33 ans, Mahmoud Sabbagh signe avec cette comédie romantique son premier long-métrage, qui se trouve être le deuxième de l’histoire du cinéma saoudien après ‘‘Wadjda’’ (2013) de Haïfa Al Mansour.

Deux jeunes saoudiens atypiques

Il faut dire qu’il existe en ce moment une vraie dynamique dans le cinéma arabe indépendant. Apprécié particulièrement des cinéphiles et représenté essentiellement dans les festivals, il commence, en Tunisie, à dépasser ce cadre restreint pour faire le tour des salles de cinéma longtemps dominées par les films commerciaux. Le grand public peut désormais apprécier le cinéma d’auteur, tout au long de l’année, et pas seulement lors des JCC.

Barakah Meets Barakah

‘‘Barakah meets Barakah’’ est avant tout une histoire d’amour entre deux jeunes saoudiens atypiques, autant dans leurs personnalités que dans leurs noms, en effet, ils s’appellent tous les deux Barakah.

Le jeune homme Barakah, interprété par Hicham Fageeh, est employé à la municipalité de Djeddah, son travail consiste à arpenter les rues de la ville pour chasser les comportements «inadéquats». Un jour, il tombe sur une séance de photos pour un magazine de mode, ayant pour model Bibi, la vedette du réseau social Instagram, dont le vrai nom caché est Barakah, jouée par Fatima Al Banawi.

L’espoir d’une nouvelle vie moins insipide

Barakah est vite épris de la belle blonde, qui, derrière ses airs de bimbo frivole, se cache une âme meurtrie par l’oppression de la société saoudienne et l’exploitation de sa famille adoptive. Elle trouve dans Barakah, ce jeune homme aussi naïf que doux, l’espoir d’une nouvelle vie moins insipide, Barakah est différent car l’ordre qu’il établit le jour, il l’enfreint le soir en jouant dans une troupe de théâtre amateur.

Face à une police religieuse qui les traque partout où ils se trouvent, les amoureux voient leur histoire vouée à l’échec avant même de commencer. En effet, l’Etat saoudien dispose d’un appareil policier puissant comme instrument de pression qui guette tous les faits et gestes afin de contrôler et de façonner à sa guise tout un peuple.

Le film nous fait découvrir le quotidien saoudien que l’on se contente jusque là d’imaginer. Il réussit à nous transmettre la sensation d’étouffement que vivent ces deux personnages drôles et attachants qui se débrouillent tant bien que mal pour sortir ensemble, se tenir la main ou même se voir le temps de quelques minutes dans l’épicerie du quartier. Mais tout cela est dangereux dans un pays où la police des mœurs est à l’image de «Big Brother», elle est partout et elle vous observe. «On est dans les limbes et on n’arrive pas à s’en sortir», constate Barakah.

On retiendra notamment cette scène absurde où le couple se donne rendez-vous à la plage, mais que Barakah est interdit d’y accéder pour la simple raison qu’il est célibataire et que s’il souhaite bénéficier de cet espace «public» en cette journée de canicule, il n’a qu’à venir avec sa famille.

Barakah Meets Barakah

La facette sombre de l’Arabie Saoudite

‘‘Barakah meets Barakah’’ repose sur une histoire accessible et un récit assez simple traité avec émotion et humour qui laisse subtilement un arrière-goût d’amertume face à cette facette sombre de l’Arabie Saoudite, le berceau du Wahhabisme où les droits les plus élémentaires sont bafoués, et notamment ceux des femmes.

Le choix de la comédie romantique pour traiter ce sujet est plutôt avisé car ce genre permet mieux que tout autre de critiquer la société ou encore mieux l’Etat pour les plus audacieux.

D’ailleurs le film nous rappelle la nouvelle vague du cinéma iranien tournant en dérision l’hypocrisie de l’Etat iranien et de ses codes religieux, à l’instar du fameux ‘‘Persepolis’’ de Marjane Satrapi (la chaîne Nessma avait été jugée pour «atteinte au sacré» suite à sa diffusion en octobre 2011)

A travers une histoire d’amour plutôt ordinaire, Mahmoud Sabbagh est arrivé à nous raconter une histoire plus grande, celle de son pays et de sa génération, tiraillé entre un environnement moyenâgeux et une aspiration à la modernité.

‘‘Barakah meets Barakah’’ est actuellement dans les salles Le Rio, Le Parasse, Amilcar et Mad’art.

Bande-annonce du film.

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