Le Covid-19 est-il finalement une maladie des riches ? Le Top 15 des pays avec la plus forte mortalité sont les pays les plus riches. Les pays les plus pauvres s’en sont finalement miraculeusement bien sortis. À un tel point que nous sommes, en Tunisie, en train de nous demander si le pic épidémique ne se serait pas passé finalement en décembre ou en janvier derniers.
Par Pr Faouzi Addad *
Certes, plusieurs symptômes compatibles avec le Covid-19 sont rapportés, après coup, par de nombreuses personnes, mais la faible contagiosité sur le personnel de santé ne plaide pas en faveur de cette possibilité évoquée par certains praticiens ayant eu à examiner des radios thoraciques de ces personnes, en décembre et janvier derniers. D’autant que le nombre de personnel de santé contaminé, en Tunisie, entre le 2 mars et le 19 avril, est de 90, malgré les mesures de protection. Cela aurait donc été plus sévère si le coronavirus était parmi nous depuis le mois de décembre ou de janvier, sans que nous le sachions.
Par ailleurs, les épisodes grippaux de l’été dernier étaient peut-être une autre «version chinoise» du Covid-19 car très peu contagieuse mais sûrement pas le Covid-19 actuel.
En attendant que les radiologues et immunologues se prononcent, cette hypothèse me semble peu probable.
Nous avons évoqué la vaccination du BCG qui est une piste intéressante pour une moindre sévérité de la maladie mais nos pourcentages de mortalité et d’hospitalisations, en Tunisie, sont, statistiquement, dans les normes.
Et si la pollution jouait un rôle essentiel dans la diffusion du Covid-19 ?
Je pense qu’il y a 2 explications plausibles : tout d’abord, la pollution joue un rôle essentiel dans la diffusion de la maladie. En effet, les virus peuvent être portés par les particules aériennes, qu’elles soient solides ou liquides.
Les chercheurs italiens ont montré la corrélation entre le nombre Covid-19 et la pollution par la teneur atmosphérique en PM10. Le nord de l’Italie étant plus pollué que le sud. Et d’ailleurs, le confinement marche non seulement par la distanciation sociale mais aussi par la baisse drastique de la pollution, réduisant, au passage, pas mal d’autres maladies (allergies, asthme, infarctus, accidents cérébraux, problèmes de la peau…).
Les Américains n’ont-ils pas montré, à ce propos, que plus les gens étaient exposés aux particules fines pendant 15 à 20 ans plus ils ont un risque de mourir (tempête cytokinique) ? Cela veut dire que, sur un plan statistique, plus on vit dans une grande ville plus on risque de développer des formes sévères. Ainsi les villes les moins pollués et les moins industrialisés sont les moins touchées par l’épidémie.
Le second point à signaler dans ce contexte c’est l’arrivée tardive de ce virus en Tunisie (le premier cas ayant été dépisté le 2 mars), dans une saison relativement sèche, or le coronavirus adore le froid et l’humidité. Sa contagiosité a naturellement été atténuée par un climat moins propice (le climat tempéré de la Méditerranée?).
Moralité de l’histoire : prenons soins de notre nature et elle nous protégera.
Et si le Covid-19 était aussi dans notre ventre ?
Une autre piste est à étudier : et si l’élément manquant au puzzle pour mieux comprendre ce virus était dans notre ventre?
Notre intestin héberge quelques 100.000 milliards de bactéries et renferme 80% de notre système immunitaire. Ces bactéries peuvent être classées en 3 écosystèmes différents : les Bactéroïdes, les Prevotellas ou les Ruminococcus.
Des travaux récents viennent de mettre en évidence la présence du coronavirus à l’intérieur de la bactérie Prevotella. Ce virus serait donc bactériophage, c’est à dire capable d’infecter des bactéries. Il essaierait en quelque sorte de se cacher dans ces bactéries, ce qui pourrait expliquer la longue période d’incubation, les signes digestifs, les faux négatifs, sa présence dans les selles et sa réapparition après un certains temps.
L’infection de ces bactéries par le virus les rendraient particulièrement virulentes et à l’origine d’une tempête inflammatoire parfois fatale. Une forte relation entre l’augmentation des interleukines 6 et la présence du Prevotella chez les diabétiques de type 2 a été prouvée par des études publiées. Plusieurs de ces études ont montré le rôle de cette flore intestinale dans l’apparition de certaines pathologies, entre autres l’obésité, les maladies chroniques inflammatoires du tube digestif ou auto-immunes.
Des chercheurs de l’université de Pennsylvanie avaient montré que l’écosystème Prevotella serait plus favorisé par une alimentation riche en sucres.
On comprend finalement que le Covid-19 peut être parfois une simple maladie virale ou une véritable maladie bactérienne selon notre flore, les obèses et les diabétiques étant particulièrement vulnérables.
Le bénéfice rapporté par de nombreux chercheurs sur la prescription des antibiotiques prendrait aussi tous son sens, de même que le recours au zinc, efficace contre cette bactérie. Le rôle de la chloroquine dans la polyarthrite rhumatoïde peut aussi passer par là. Toutes ces avancées scientifiques pourraient aboutir à de nouvelles stratégies thérapeutiques.
En attendant que cette théorie soit confirmée ou au contraire rejetée, il est du bon sens d’éviter les sucreries dans la période du mois de ramadan, qui commence cette semaine et qui est souvent caractérisée par une hausse de la consommation alimentaire et, notamment, des sucreries.
Que Dieu protège notre pays !
* Professeur de cardiologie.
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