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Tunisie, un «génocide» en direct

Tant que les commanditaires des terroristes siègent au parlement et propagent leur idéologie à travers les médias, tant que les milices islamistes d’Al-Karama se pavanent dans les coulisses de l’Assemblée, tant que les égorgeurs de Daech sont en villégiature dans les prisons, en attendant la prochaine amnistie générale, tant que les zazous «droits-de-l’hommistes» se font défenseurs des enfants prodiges de retour de Syrie, tant que le droit à la vie est bafoué par les bras cassés du gouvernement et de l’administration, le génocide par Covid-19 interposé continuera à faire des ravages en Tunisie.

Par Mounir Chebil *

Onze millions d’habitants en Tunisie, c’est trop de bouches à nourrir. Surtout dans un contexte d’instabilité politique, de crise économique et d’agitation sociale. Alors, faut-il faire pression sur la démographie ? Nos gouvernants actuels n’ont pas les moyens d’engager des programmes pour diminuer de moitié la population du pays, comme le conseillerait Malthus. Une solution aussi radicale pourrait leur coûter les fauteuils douillets.

En 10 ans, 12 gouvernements, plus de 460 ministres et secrétaires d’Etat, 627 députés, sans compter les attachés de cabinets et les conseillers machin chouette, se sont succédé au pouvoir, coûtant aux contribuables les yeux de la tête. Ils sont issus de plus de 200 partis politiques, garnissant la scène démocratique tunisienne, qui se sont unis pour désespérer ce peuple, l’appauvrir et l’affamer.

Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, les Tunisiens ont résisté. Ils y étaient habitués depuis des siècles. Mais ils commencent à se révolter et leurs affameurs à trembler sérieusement. Et voilà que la pandémie de la Covid-19 a pointé son nez. Elle fauche entre 0 et 100 personnes par jour. On dénombre déjà 6.500 morts, sans compter ceux qui sont décédés de la Covid-19 chez eux, sans que leurs proches n’en soient conscients, et n’ont donc pas été comptabilisés par les statistiques officielles. Il faudrait donc compter 25% de décès supplémentaires, disent les spécialistes. Le nombre de décès par la Covid-19 représenterait de 11 à 12% du nombre global des décès, se situant autour de 70.000 par an, un pourcentage énorme, qui plus est appelé à être plus élevé car les décès par la Covid-19 sont appelés à augmenter d’une manière exponentielle.

Des responsables ou des criminels ?

Les affameurs se sont donc métamorphosés en criminels. Ils ont accueilli, à bras ouverts, la Covid 19, leur sauveur providentiel. Ils étaient même prévenants, en lui préparant le terrain pour qu’il les débarrasse du plus grand nombre de Tunisiens possible, surtout les retraités qui coûtent cher aux caisses de sécurité sociale. En 10 ans, ils ont détruit le système de santé. Les hôpitaux, devenus déjà des mouroirs, ne sont pas, actuellement, en mesure de prendre en charge convenablement les malades de la Covid-19. Par manque de moyens, le corps sanitaire est déjà contraint de faire le choix macabre entre qui soigner et qui laisser mourir.

Nous vivons un génocide presque cyniquement planifié. Au cours de la première moitié de 2020, plusieurs milliards de dinars, en crédit et en dons, ont renfloué les caisses de l’Etat à l’effet de faire face à la pandémie qui était alors maîtrisable. Tout cet argent s’est évaporé. Les responsables n’ont même pas pris la précaution d’inscrire à temps la Tunisie sur les listes d’attente pour l’acquisition des vaccins, alors qu’ils savaient tous que ces vaccins seraient prêts à vente dès la fin de 2020. Le coût des vaccins ainsi que celui de la logistique qu’ils nécessitent ne sont même pas provisionnés dans le budget de 2021. Comme si on voulait laisser la Covid-19 «s’occuper» des Tunisiens. Dans ce contexte, une seule prouesse est à mettre à l’actif de nos politiques : ils ont réussi à faire classer la Tunisie parmi les pays ayant le taux le plus élevé de morts par la Covid-19, par rapport au nombre d’habitants, et le second en Afrique, après l’Afrique du Sud.

Les vaccins entre fausses promesses et mensonges

Alors que de nombreux pays ont déjà commencé la vaccination à grande échelle, notre gouvernement nous gave de fausses promesses voire de mensonges. La Tunisie va recevoir début février une première livraison de 350.000 vaccins en dons de l’OMS. Puis, on nous annonce qu’un accord est conclu avec la société pharmaceutique américaine Pfizer, et ce, pour recevoir, dans le plus bref délai, deux millions de doses du vaccin Pfizer-BioNTech. Ce «bref délai», c’est quand à peu près? Au deuxième trimestre 2021, affirme-t-on. Et voilà que le ministre des Affaires étrangères, comme dans une sorte de «politique des restes», pour paraphraser le titre de la célèbre pièce d’Arthur Adamov, annonce que la Tunisie pourrait recevoir une partie des vaccins achetés par l’Algérie. Il s’ensuit des contacts avec la Russie et la Chine, dont les vaccins sont plus accessibles financièrement. Doit-on s’en féliciter ?

Enfin, on nous apprend que le gouvernement tunisien a signé avec différents laboratoires pharmaceutiques et la Covax, initiative de l’OMS pour distribuer équitablement 2 milliards de doses de vaccins d’ici la fin 2021, pour recevoir une première commande 10 millions de doses qui seront livrées progressivement. Les premières doses de vaccin sont attendues pour ce mois de février. Mais un retard ne sera pas surprenant au regard des difficultés rencontrées par les laboratoires pour honorer les commandes déjà payées rubis sur ongle.

L’objectif étant, dit-on, de commencer à vacciner 5 millions de citoyens, soit près de 50% de la population, selon les plans du ministère de la Santé, au moins 12.000 personnes seront vaccinées par jour, à partir du troisième semestre de cette année. Et nous sommes tenus de croire à ces balivernes !

Le 31 janvier, aux informations de 20 heures sur la chaîne nationale Watania 1, le ministre de la Santé a annoncé que l’OMS fournira à la Tunisie 94.000 doses avant la fin de ce mois de février et que d’autres quantités suivront au fur et à mesure. Combien et quand ? Il ne faut pas insister. Selon lui, il y a aussi un accord avec une firme anglaise pour la production sous licence de son vaccin en Tunisie : «Istanna ya djaja hatta yjik el kamh min Baja», dit le proverbe tunisien.

Un génocide par Covid-19 interposé

Pendant que cet écheveau de dates, de délais, de nombres de doses, de fournisseurs, de déclarations aussi imprécises que contradictoires les unes que les autres grossit, des Tunisiens continuent de mourir, au grand «soulagement» des caisses de sécurité sociale, souffrant de déficits astronomiques, sachant que le méchant virus fauche davantage les personnes de plus de 60 ans, celles qui coûtent le plus à ces caisses (pensions de retraite, assurance maladie…).

En attendant, Hichem Méchichi, tout en étant content d’avoir gardé (jusque-là) son poste de chef de gouvernement, grâce à son protecteur Rached Ghannouchi, le gourou de ses Frères musulmans, pourrait se frotter les mains. Et pour cause, avec les milliers de morts supplémentaires de la Covid-19, il aurait moins de problèmes pour clôturer le budget 2021. Avec une année 2022 encore plus performante en nombre de décès par la Covid-19, il pourrait même ambitionner de réaliser le défi de l’équilibre budgétaire, sans trop se fatiguer à chercher des solutions économiques que, du reste, il sera incapable de trouver et encore moins d’implémenter.

Mechichi est d’autant plus tranquille que les partis sont en guerre pour un meilleur positionnement sur l’échiquier politique et que l’opinion publique et les médias sont tenus en haleine par le cirque parlementaire et la guéguerre opposant Rached Ghannouchi à Kaïs Saïed. Les combats de coq, les empoignades et les engueulades au sein de l’hémicycle, maintenant à coup de haut-parleurs, ainsi que les commérages «politichiens» sont devenus le sport favori des Tunisiens dans ces olympiades de la décadence.

Le président de la république, dans sa bulle constitutionnelle, œuvre pour le blocage institutionnel et le pourrissement du climat politique afin de tout chambarder et mettre en route son projet conseilliste de démocratie participative. Démocrates libéraux et militants de gauche militent pour la révolution permanente, attisant les agitations sociales en espérant les instrumentaliser. Les voilà aujourd’hui à appeler, au nom des droits de l’homme, à la libération des casseurs arrêtés en flagrant délit de vols et de saccages des biens publics et privés, lors des agitations sociales de ces derniers jours. Comble du ridicule, le «génocide» en cours, par Covid-19 interposée, n’est même pas dans l’ordre du jour des défenseurs des droits de l’homme et de toute la classe politique, sans exception, alors que la crise sanitaire aurait dû être au centre de tous les débats. La plupart de nos partis ont les yeux rivés sur les sondages d’opinion et se félicitent des points gagnés à coup de démagogie et de scandales.

Tant que les commanditaires des terroristes siègent au parlement et propagent leur idéologie à travers les médias, tant que les milices islamistes d’Al-Karama se pavanent dans les coulisses de l’Assemblée, tant que les égorgeurs de Daech sont en villégiature dans les prisons, en attendant une prochaine amnistie générale, tant que les zazous «droits-de-l’hommistes» se font défenseurs des enfants prodiges revenant de la Syrie, tant que le droit à la vie est bafoué par les bras cassés du gouvernement et de l’administration, ce génocide par Covid-19 interposé continuera à faire des ravages.

* Ancien fonctionnaire à la retraite.

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