Où sont passés les deux milliards de dollars d’aide financière du Qatar à la Tunisie dont ont parlé les collaborateurs de Rached Ghannouchi, président du parti islamiste Ennahdha, et, accessoirement, de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), à l’issue de la visite de ce dernier à Doha, début mai dernier ?
A l’époque, souvenons-nous, le conseiller politique de Ghannouchi, Riadh Chaïbi, pour justifier cette visite effectuée secrètement et sans en informer les membres de l’Assemblée, a parlé, d’une mission visant à demander au Qatar d’apporter son soutien à la Tunisie pour l’aider à sortir d’une crise financière étouffante.
M. Chaïbi a même cru devoir détailler les termes d’un accord préliminaire passé par le chef islamiste avec les autorités qataries, alors que tout le monde sait que, lors de son court séjour à Doha, Ghannouchi n’a été reçu par aucun haut responsable de ce pays et qu’il y était parti pour sonder l’évolution de la position de ses hôtes vis-à-vis des Frères musulmans, dont il est l’un des dirigeants, et qui ont été lâchés par leurs soutiens habituels dans la région, la Turquie et le Qatar, au profit d’un rapprochement stratégique avec leurs irréductibles ennemis, l’Egypte et l’Arabie saoudite.
M. Chaïbi avait parlé, entre autres générosités dont le Qatar allait gratifier la Tunisie grâce à l’entregent d’un magicien appelé Ghannouchi, d’une aide de 2 milliards de dollars, somme qui serait déposée, selon lui, à la Banque centrale de Tunisie (BCT) pour soutenir les équilibres de la balance extérieure de notre pays et éviter l’effondrement annoncé de sa monnaie, le dinar. M. Chaïbi avait même parlé, entre autres «cadeaux», d’un don qatari de 2 millions de doses de vaccins pour contribuer à la campagne tunisienne de vaccination contre la Covid-19.
Or, non seulement nous attendons toujours la finalisation du fameux accord préliminaire, dont le chef du gouvernement Hichem Mechichi a évité de parler à l’issue de sa visite officielle à Doha, les 31 mai et 1er juin derniers, se contentant d’évoquer une «visite fructueuse», mais, aux dernières nouvelles, Doha demande le paiement d’un prêt antérieur de 500 millions de dollars qui est arrivé à maturation et dont le début de remboursement intervient en ce mois de juillet 2021, au moment même où la Tunisie négocie avec le Fonds monétaire international (FMI) un nouveau prêt de 4 milliards de dollars (soit 11 milliards de dinars) sur trois ans et a besoin de mobiliser 22 à 23 milliards de dinars, sur les marchés intérieur et extérieur, pour boucler son budget de l’année en cours et assurer le paiement des salaires, des pensions de retraite, des remboursements de ses dettes antérieures et de celle des entreprises publiques.
Alors, quid des promesses qataries dont Ghannouchi s’était fait l’écho ? La réponse, on l’empruntera à Henri Queuille, président du Conseil sous la IVe République en France : «Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent».
Imed Bahri
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