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Tunisie : Pourquoi Ennahdha craint-il «l’instrumentalisation de la justice» par le président Kaïs Saïed ?

Le mouvement Ennahdha, dont plusieurs dirigeants sont soupçonnés d’implication dans des affaires de terrorisme et/ou de corruption, semble craindre au plus haut point l’instrumentalisation du pouvoir judiciaire par le président de la république Kaïs Saïed, qui en a pris récemment le contrôle à travers la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et son remplacement par un Conseil supérieur provisoire de la magistrature (CSPM) constitué par décret présidentiel.

Le parti islamiste tunisien, dont les dirigeants sont souvent accusés par leurs opposants, et notamment les partisans du chef de l’Etat, d’avoir été mêlés à des affaires en lien avec les réseaux terroristes (assassinats politiques, envoi de jihadistes aux zones de conflits…) ou de corruption (financements politiques douteux, contrebande, blanchiment d’argent…), ne cesse de dénoncer la dissolution du CSM, qu’il qualifie de «constitutionnel» et d’«élu» par un CSPM «désigné»… par le président Saïed.

Ce sont là les termes utilisés par le mouvement Ennahdha, dans un communiqué publié aujourd’hui, vendredi 11 mars 2022, où il a aussi déploré l’annulation de la loi organique portant création du CSM et le recours à un décret pour désigner une instance de remplacement, ce qui, selon ses termes, «porte atteinte à l’indépendance de l’autorité judiciaire et la transforme en un outil aux mains du pouvoir exécutif.»

Ennahdha qui ce cesse d’appeler à «lutter contre toute déviation ou instrumentalisation de la justice» a cependant du mal à faire partager ses inquiétudes par les Tunisiens, qui, dans leur écrasante majorité, appuient la démarche du président et les mesures qu’il a prises pour assainir le système judiciaire afin qu’il puisse assumer sa mission au service d’une démocratie réelle respectueuse du droit.

Beaucoup de Tunisiens pensent en effet que la justice, qui était instrumentalisée par l’ancien régime de Ben Ali, s’est mise, à partir de la révolution de 2011, au service du mouvement Ennahdha. Ils pensent aussi que la dissolution du CSM par le président Saïed s’inscrit dans la volonté de ce dernier d’instaurer une justice réellement indépendante des partis et respectueuse du droit.

Imed Bahri

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