Le prince William, prince héritier du Royaume-Uni, est sorti de sa réserve, mardi 20 février 2024, appelant à la fin de la guerre à Gaza et exprimant son inquiétude quant au lourd bilan humain causé par cette guerre qui dure depuis plus de quatre mois. Le même jour, les États-Unis ont usé pour la quatrième fois de leur droit de véto pour rejeter le cessez-le-feu.
Par Imed Bahri
Fait très rare, le prince de Galles a dérogé à la règle qui veut que les membres de la famille royale britannique ne s’expriment pas sur les sujets ayant trait à la politique qu’elle soit interne ou internationale. Fait encore plus rare, le prince héritier britannique exprime une position non conforme à celle du gouvernement du Royaume-Uni, qui est entièrement et clairement pro-israélienne.
Dans un communiqué diffusé par son bureau, il a considéré que «trop de gens ont été tués» dans cette guerre et appelle à la fin du conflit. Il déclare s’accrocher «à l’espoir qu’un avenir meilleur puisse être trouvé et je refuse d’y renoncer».
Le prince William se dit «profondément préoccupé par les terribles pertes humaines causées par le conflit au Moyen-Orient depuis les attaques du 7 octobre». Il poursuit que «comme beaucoup d’autres, je souhaite que les combats cessent le plus rapidement possible. Gaza a désespérément besoin d’une aide humanitaire accrue. Il est essentiel que l’aide soit acheminée et que les otages soient libérés». Et d’ajouter: «Parfois, ce n’est que face à l’ampleur de la souffrance humaine que l’on prend conscience de l’importance d’une paix permanente.»
Mettre fin à souffrance humaine
Kensington Palace où se trouve la résidence officielle et le bureau du prince de Galles a également annoncé qu’il allait prendre part à plusieurs événements afin de mettre en lumière la «souffrance humaine causée par ce conflit à Gaza, en Israël et au Moyen-Orient et sensibiliser à la montée de l’antisémitisme dans le monde. Le prince de Galles va ainsi prochainement rencontrer des bénévoles qui contribuent à apporter une aide humanitaire dans la région de Gaza afin d’entendre les récits de personnes qui sont sur le terrain. Il doit également assister à une réunion à la fin du mois dans une synagogue afin d’échanger avec de jeunes militants contre la haine et l’antisémitisme.»
En 2018, le prince William est devenu le premier membre de la famille royale britannique à se rendre en Israël et en Cisjordanie au nom du gouvernement britannique. Il avait rencontré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président palestinien Mahmoud Abbas.
Il est à indiquer également que depuis l’annonce du cancer de Charles III et depuis qu’il a commencé à recevoir son traitement, c’est le prince de Galles qui assure les activités officielles royales.
Au même moment à New York, les États-Unis ont bloqué pour la quatrième fois un projet de résolution au Conseil se sécurité de l’Onu pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza. Cette fois-ci, le projet de résolution a été proposé par l’Algérie. Treize pays ont voté en faveur du projet de résolution tandis que le Royaume-Uni s’est abstenu et Washington a voté contre en recourant à son droit de veto en tant que membre permanent du Conseil de sécurité.
Le projet de résolution algérien comprenait cinq points fondamentaux: un cessez-le-feu humanitaire immédiat et global, le respect des mesures provisoires réclamées par la Cour internationale de Justice, le 26 janvier, le rejet du déplacement forcé de la population civile palestinienne y compris des enfants et l’acheminement complet de l’aide humanitaire ainsi que l’accès rapide, sûr et sans entrave à toutes les parties de la bande de Gaza. Le projet prévoit également de fournir des approvisionnements urgents, durables et adéquats ainsi qu’une assistance humanitaire généralisée à la population civile palestinienne.
Le représentant permanent de l’Algérie aux Nations-Unies, Ammar Ben Jama a prononcé un discours expliquant la nécessité de voter en faveur du projet de résolution. Il a expliqué que son pays a donné une opportunité à ceux qui disent qu’il y a des négociations pour parvenir à un cessez-le-feu humanitaire et libérer les otages. Il a déclaré: «Combien de temps allons-nous attendre?», soulignant que le projet de résolution a fait l’objet de délibérations longues et détaillées avec tous les membres du Conseil. Il a considéré que «le Conseil de sécurité ne doit pas rester incapable d’assumer ses responsabilités» et a souligné que «ce projet renforce le Conseil de sécurité dans l’accomplissement de son mandat fondamental de maintien de la paix et de la sécurité internationales».
Ben Jama a déclaré qu’un mois après que la Cour internationale de Justice a pris des mesures urgentes, l’espoir est toujours absent: «Ce projet de résolution représente la vérité et la justice. Voter pour ce projet de résolution c’est voter pour le droit à la vie des Palestiniens. Voter contre, c’est aussi approuver la violence généralisée et les punitions collectives auxquelles ils sont soumis. Voter en faveur du projet de résolution signifie donner à des centaines de milliers d’enfants palestiniens une chance de retourner à l’école tandis que ceux qui votent contre votent en faveur de la destruction de leurs rêves d’une vie meilleure. Voter avec le projet de résolution signifie la solidarité avec les droits des femmes palestiniennes tandis que voter contre signifie soutenir ces mesures qui détruisent leur dignité. Voter pour le projet de résolution signifie soutenir le droit des Palestiniens à l’alimentation et à la santé tandis que voter contre signifie priver les Palestiniens de nourriture et de médicaments et détruire les hôpitaux.»
Ben Jama a appelé le Conseil de sécurité non seulement à cesser le feu mais aussi à respecter le droit international humanitaire en rappelant que le moment est critique. «Aujourd’hui, chaque Palestinien est une cible de mort et d’extermination. Nous demandons combien de personnes doivent être tuées pour qu’un cessez-le-feu ait lieu?», a martelé le représentant permanent de l’Algérie.
Ce plaidoyer algérien très lucide et basé sur la réalité tragique endurée par la population civile palestinienne n’a pas convaincu Washington toujours aux côtés d’Israël en dépit des crimes de guerre et du génocide qui se poursuivent depuis plus de quatre mois. La représente permanente des États-Unis au Conseil de sécurité Linda Thomas-Greenfield, championne des droits humains quand il s’agit des Ukrainiens mais qui ne l’est plus quand il s’agit des Palestiniens, à l’image de son président dont la mémoire ne flanche plus quand il s’agit de soutenir Israël, et qui était assise aux côtés du représentant algérien autour de la table du Conseil de sécurité, a déclaré en réaction au projet de résolution algérien : «Toute mesure prise par le Conseil doit soutenir ces efforts (libération des détenus israéliens dans la bande de Gaza qui constitue la priorité pour l’administration Biden, Ndlr) plutôt que les entraver et nous pensons que l’adoption de ce projet aura un impact négatif sur ces efforts. Appeler à un cessez-le-feu immédiat sans la libération des otages ne mènera pas à une paix durable et pourrait même prolonger le conflit entre le Hamas et Israël.» La représentante américaine a évoqué que le projet de résolution (ou de contre-résolution) américain qu’elle présentera aux membres du Conseil de sécurité «contient de nombreux détails réalistes sur la sortie de la crise actuelle».
La guerre peut donc se poursuivre, les États-Unis ne sont pas pressés de voir le génocide perpétré par Israël à Gaza prendre fin.
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