Ces dernières semaines, Israël a étendu son occupation du sud de la Syrie commencé dès les premières heures de la chute du régime du président Bachar Al-Assad. L’État hébreu cherche à étendre son contrôle sur les zones frontalières, notamment Quneitra et Deraa. Il a mené des frappes aériennes et des incursions terrestres qui ont fait des victimes civiles, déplacé des centaines d’habitants, tué de nombreux agriculteurs et cherché à semer la discorde au sein du tissu social syrien notamment entre les Druzes et le reste de la population.
Imed Bahri
Le média israélien 972 Magazine a consacré une enquête aux opérations militaires israéliennes menées en Syrie et surtout dans le sud. L’enquête revient également sur la résistance de la population locale notamment dans les zones rurales.
Le journal rappelle d’abord qu’Israël a mené 600 attaques au cours des huit premiers jours de ses opérations militaires contre la Syrie, ciblant d’anciennes positions de l’armée syrienne ainsi que des villes à travers le pays, de Lattaquié et Homs à la campagne de Damas. Les forces terrestres ont également avancé de 20 kilomètres à l’intérieur du territoire syrien, établissant neuf bases militaires et des infrastructures dans les territoires occupés.
Les forces israéliennes ont commencé à occuper la ville de Rasm Al-Rawadi dans la campagne de Quneitra le 8 décembre 2024, le jour même de la chute de Bachar Al-Assad, prenant d’assaut des maisons, détruisant certaines d’entre elles et forçant des centaines d’habitants à quitter leurs domiciles.
Ali Al-Ahmad, un ancien du village âgé de 65 ans, a rapporté que les soldats ont défoncé des portes, fouillé des maisons et en ont démoli certaines puis ont rassemblé de nombreuses familles dans une école abandonnée. Ces pratiques militaires israéliennes se sont poursuivies au cours des quatre derniers mois et le nombre des habitants déplacés du village est estimé à environ 350 personnes. Les forces israéliennes ont également saisi leurs terres à des fins militaires.
Israël prêt à rester en Syrie indéfiniment
L’enquête du média israélien note que malgré les déclarations de l’armée selon lesquelles sa présence en Syrie est temporaire, les faits sur le terrain indiquent le contraire. Il y a une intention de maintenir cette occupation. Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a même déclaré que l’État hébreu était prêt à rester en Syrie indéfiniment.
L’avocat Mohammed Fayyad, un militant des droits de l’homme arrêté et agressé par les forces israéliennes en janvier pour avoir révélé leurs opérations, a déclaré: «Les responsables militaires israéliens pénètrent souvent dans les villages dans des véhicules civils blancs pour collecter des données et mener des enquêtes statistiques sous prétexte de fournir une aide humanitaire».
Il a également révélé les pratiques pernicieuses israéliennes: «Ils nous offrent de la nourriture, des médicaments, de l’électricité et du travail après nous avoir tout pris. Ces derniers mois, ils ont proposé à plusieurs reprises aux habitants locaux au moins 75 dollars par jour pour construire des infrastructures pour les bases militaires mais les habitants rejettent toute intervention visant à diviser la Syrie».
Dans le village d’Al-Rafid, près de Quneitra, les habitants ont été confrontés à des actes de violence répétés de la part des forces israéliennes. Ils ont déraciné des arbres de plus de 100 ans, ouvert le feu sur quiconque tentant de s’approcher d’un terrain saisi et tué deux jeunes hommes conduisant une moto et portant un pistolet pour protéger le bétail.
Bader Safi, enseignant et habitant du village a déclaré à 972 Magazine: «Les soldats attaquent nos terres plusieurs fois par jour et les saisissent de force. Mon ami a perdu ses terres et vit maintenant chez moi. Je l’entends pleurer tous les jours parce qu’ils lui ont volé ses terres, sa maison et tout ce qu’il possède».
Les druzes rejettent «l’aide» israélienne
Évoquant le rejet de l’occupation par les habitants, Cheikh Abu Nasr, 70 ans, originaire de la ville d’Al-Rafid, a dit: «C’est notre terre. Nous y cultivons des vignes et des figues et nous ne reconnaissons pas l’État occupant. Les nouvelles forces gouvernementales syriennes ne sont pas venues à notre secours et nous sommes seuls ici mais nous resterons sur nos terres même si quelqu’un d’autre nous gouverne».
Israël a cherché à exploiter la présence de la communauté druze dans la ville de Jaramana, dans le sud de la Syrie, pour justifier son intervention militaire d’autant plus que certains membres de la communauté servent dans l’armée israélienne.
Cependant, l’avocat Makram Obeid, a nié les déclarations de l’armée israélienne selon lesquelles le gouvernement syrien avait attaqué la communauté et a assuré au journal israélien que les incidents étaient des affrontements individuels et non liés à une menace directe du gouvernement.
De son côté, la communauté druze a rejeté l’aide israélienne, estimant que l’intervention d’Israël vise à inciter à la discorde entre les composantes de la société syrienne. L’universitaire Farid Ayash de Damas a expliqué que l’intervention d’Israël élargit le fossé entre les Druzes et les autres Syriens et accroît les troubles dans les pays voisins, ce qui sert ses intérêts.
972 Magazine conclut que les Syriens sont unanimes dans leur résistance à la présence israélienne rapportant les propos de Mohammed Fayyad: «Le sud de la Syrie préservera sa dignité et nous avons des principes clairs. Nous ne voulons pas une répétition des événements de 1967 et nous ne voulons pas abandonner nos maisons et nos terres».
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