Mohamed Ali Nafti, Ministre des Affaires Etrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, a prononcé le discours suivant lors de la session de haut niveau de la 58e session du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, qui a débuté aujourd’hui à Genève :
« Monsieur le Président du Conseil des droits de l’Homme,
Mesdames et Messieurs,
En raison de sa profonde conviction en l’importance de l’action multilatérale et de son attachement aux valeurs et principes sur lesquels l’Organisation des Nations Unies a été fondée, organisation que nous célébrons cette année à l’occasion de son 80ème anniversaire, la Tunisie s’est engagée activement dans tous les efforts internationaux et onusiens visant à renforcer la sécurité et la paix, tant au niveau régional qu’international, et à promouvoir le développement pour tous.
Dans le cadre de cet engagement, la Tunisie a déclaré l’année 2025 Année de Renforcement de la Coopération Multilatérale et de Consolidation des Relations de Coopération avec le système de l’Organisation des Nations Unies, en accordant à la coopération avec les mécanismes régionaux et internationaux des droits de l’Homme l’attention qu’ils méritent, dans le cadre d’un dialogue constructif qui respecte la souveraineté de l’État et l’indépendance de sa décision, ainsi que les principes de neutralité et d’objectivité.
Il n’en reste pas moins que la Tunisie a ratifié la plupart des traités et conventions internationaux relatifs aux droits de l’Homme, abrite un bureau national du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme, et a lancé un appel ouvert aux mandats aux procédures spéciales des États, étant l’un des pays les plus accueillants pour les visites de ces mandats au cours des dernières années, en plus d’accepter la compétence de la plupart des comités contractuels internationaux et régionaux.
Fidèle à son engagement inébranlable en faveur de la pleine réalisation des droits humains au niveau national, qu’ils soient politiques, économiques, sociaux ou culturels, la Tunisie affirme son implication active dans diverses initiatives visant à promouvoir et à protéger les droits de l’Homme au niveau international et régional.
La Tunisie se prépare à présenter son rapport national et à le discuter devant le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale, après avoir examiné, au cours des trois dernières années, ses rapports nationaux dans le cadre de la procédure d’examen périodique universel, du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, et du Comité des droits des personnes handicapées.
M. le Président,
Notre pays poursuit avec une détermination sans faille son chemin réformiste entamé depuis le 25 juillet 2021, afin de renforcer les piliers de la démocratie, de consacrer l’État de droit, de promouvoir une bonne gouvernance, et de garantir le respect des droits et libertés de tous les Tunisiens, sans exception, tant au niveau institutionnel, législatif que pratique.
Nous avons veillé à respecter toutes les échéances électorales dans lesquelles le peuple, porteur de la souveraineté, a exprimé sa volonté, qu’il s’agisse du référendum sur le projet de Constitution du 25 juillet 2022, précédé d’une consultation nationale, des élections des membres de l’Assemblée des Représentants du Peuple, des élections des membres du Conseil national des régions et des districts, et enfin des élections présidentielles qui ont eu lieu le 6 octobre 2024. Nous avons également veillé à ce que toutes les étapes électorales soient une expression sincère de la véritable volonté populaire et qu’elles se déroulent dans le respect total des conditions et normes internationales d’intégrité et de transparence.
Notre profonde conviction que les droits de l’Homme ne peuvent être divisés et qu’il ne peut y avoir de compromis entre les droits et les libertés n’est égalée que par notre engagement à renforcer davantage les droits économiques, sociaux et culturels et à les développer afin de garantir les éléments essentiels d’une vie digne pour toutes les couches de la société et une coexistence pacifique entre ses divers composants.
Étant donné que la mise en œuvre de ces droits est indissociable du concept de justice sociale, les efforts étatiques sont axés sur l’examen des différents cadres relatifs à la sécurité sociale, aux contrats à durée déterminée et à la sous-traitance, considérée comme une forme déguisée d’esclavage et de traite des êtres humains, outre les mesures visant à promouvoir l’Homme en tant que cœur du processus de développement.
M. le Président,
Les migrants irréguliers sont des victimes d’un système économique mondial dont les pays de notre région, dont la Tunisie, ne sont pas la cause, mais ils font bien partie ses victimes. Toutefois, la Tunisie aborde ce phénomène conformément à son engagement au respect des lois internationales et de la dignité humaine de ces victimes de la traite des êtres humains.
Tout en soulignant la nécessité d’unir les efforts de tous pour démanteler les réseaux criminels qui se nourrissent des crises de la région et de la fragilité économique et sociale de ses citoyens, nous appelons à adopter une approche collective, solidaire et globale, dans le cadre d’une responsabilité partagée pour les questions de migration irrégulière, et à trouver des solutions structurelles aux causes profondes de ce phénomène, en établissant une coopération plus large et plus profonde entre les pays d’origine, de transit et de destination, dans le but de servir les intérêts communs de ces pays.
L’approche tunisienne en matière de gestion de la migration irrégulière repose sur le respect des droits de l’Homme et le rejet de toutes formes de discrimination raciale et de discours de haine, conformément à nos engagements internationaux et à nos législations nationales. À cet égard, l’État tunisien déploie, dans la mesure de ses moyens, des efforts considérables pour sauver des vies, fournir les soins et l’accompagnement nécessaires à ceux qui en ont besoin, préserver leur dignité et les protéger contre l’exploitation par les réseaux de trafic et de traite des êtres humains.
Nous réaffirmons notre refus des tentatives désespérées de proposer ou d’imposer des projets de réinstallation déguisée des migrants irréguliers, ainsi que toutes les tentatives d’exploitation politique et médiatique de la situation des migrants et de leurs souffrances pour atteindre des objectifs politiques et servir des agendas particuliers.
M. le Président,
La récupération des fonds détournés à l’étranger est une revendication populaire toujours entravée, malgré les efforts considérables déployés par l’institution judiciaire et les démarches diplomatiques, au bout de plus d’une décennie après la chute des régimes corrompus dans notre région.
Nous insistons donc sur la nécessité de développer les outils de coopération internationale, tant bilatérale que multilatérale, afin d’accélérer le processus de la récupération des fonds détournés à l’étranger, ceux-ci étant un droit inaliénable et imprescriptible des peuples lésés.
Dans ce contexte, et en renouvelant son appel aux États membres du Conseil pour soutenir sa démarche dans la récupération de ses fonds détournés, la Tunisie souligne l’importance de soutenir le projet de résolution africain sur « l’impact négatif du non-retour des fonds d’origine illicite à leurs pays d’origine sur la jouissance des droits de l’Homme et l’importance d’améliorer la coopération internationale dans ce domaine », projet que la Tunisie co-parraine avec l’Égypte et la Libye lors de cette session, étant donné que la restitution de ces fonds est un droit fondamental consacré par le droit international, notamment par la Convention des Nations Unies contre la corruption, en particulier dans un contexte où de nombreux pays en développement sont contraints de recourir à l’emprunt extérieur, tout en étant incapables de récupérer leurs fonds détournés à l’étranger.
Dans ce même contexte, nous appelons à la nécessité d’entreprendre des réformes fondamentales du système financier international, de réexaminer le rôle des agences de notation internationales, de réduire le fardeau de la dette et du service de la dette pour les pays en développement, et de faciliter leur accès aux sources de financement pour le développement, afin qu’ils puissent couvrir les besoins de leurs populations et garantir leur droit fondamental et vital au développement.
M. le Président,
Ce que nous observons aujourd’hui, à savoir l’émergence d’une société humaine aspirant à un monde plus juste et capable d’agir face à l’incapacité de la société internationale traditionnelle à jouer pleinement son rôle, témoigne d’une nouvelle conscience des valeurs de justice et de dignité, ainsi que de l’inviolabilité de la personne humaine, indépendamment de son sexe, sa race ou son origine…
Et ce que nous voyons avec les manifestations populaires dans diverses parties du monde pour condamner ce que subit le peuple palestinien en termes de famine, de déplacement forcé, de nettoyage ethnique, de génocide et de menace de déplacement, n’est qu’une expression naturelle du rejet de l’injustice historique qui a duré si longtemps pour ce peuple de son droit à l’existence.
Les manifestations populaires à travers le monde dénonçant la diffamation, le déplacement forcé, le nettoyage ethnique, le génocide et la menace de déportation subis par le peuple palestinien ne sont qu’une expression légitime du rejet de l’injustice historique qui a duré si longtemps à l’encontre de ce peuple vulnérable, et de et de l’état de déni continu de son droit à l’existence.
Tout en saluant l’accord de cessez-le-feu à Gaza, la Tunisie réaffirme la nécessité de poursuivre les responsables de l’entité occupante pour les crimes de génocide et de persécution collective qu’ils ont commis contre le peuple palestinien confrère.
Tout en saluant les positions de la Cour pénale internationale concernant les crimes de guerre commis par l’entité sioniste, la Tunisie, réitère sa position ferme à l’encontre du refus de l’expulsion des Palestiniens, du droit du peuple palestinien à recouvrer son droit légitime récupérer son droit inaliénable à toute la Palestine et à établir son État indépendant avec Al Qods Al Sharif comme capitale. »
Communiqué
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