La scène médiatique algérienne est secouée par une nouvelle controverse majeure. Mohamed Amine Belghit, historien et professeur d’université à Alger, a été placé en détention provisoire par le tribunal de Dar El Beïda suite à des accusations graves d’atteinte à l’unité nationale. Ces poursuites font suite à des déclarations controversées, considérées comme racistes à l’égard des Amazighs, tenues sur Sky News Arabia.
Djamal Guettala *
Lors de son intervention sur la chaîne émiratie, Belghit a affirmé que «l’amazighité est une création de l’Académie berbère», remettant ainsi en question l’une des trois constantes nationales consacrées par la Constitution algérienne aux côtés de l’islamité et de l’arabité. Ces propos ont suscité une vague d’indignation, notamment parmi les communautés kabyles et amazighes, qui les perçoivent comme une négation flagrante de leur identité millénaire.
Une réaction judiciaire rapide et ferme
Conformément aux articles 79 et 97 bis du Code pénal algérien, Belghit est poursuivi pour «atteinte à l’intégrité du territoire national» et «atteinte à l’unité nationale par des moyens de propagande». Le fait que ces propos aient été diffusés sur un média étranger, en l’occurrence émirati, aggrave la situation, le dossier pouvant être interprété comme une tentative de porter atteinte à la cohésion nationale par voie externe.
Dans la foulée de cette polémique, des militants kabyles proches du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) ont réagi vigoureusement. Par le biais de communiqués diffusés sur les réseaux sociaux, ils ont dénoncé un «système hostile à l’existence, à la langue et à l’histoire kabyles» et ont réitéré leur appel à l’indépendance de la Kabylie. Ces réactions montrent que l’affaire dépasse le cadre judiciaire pour toucher à des sensibilités politiques et identitaires profondes.
Un procès à forts enjeux
Mohamed Amine Belghit encourt de lourdes peines. En vertu des qualifications retenues, il risque entre 5 et 20 ans de prison assortis d’amendes importantes. Ce dossier pourrait marquer un précédent en matière de traitement des discours publics en Algérie. Il met en lumière l’équilibre délicat entre liberté d’expression, protection de l’unité nationale et reconnaissance de la diversité culturelle. Le procès en vue sera scruté de près, tant en Algérie qu’à l’international.
Longtemps marginalisée après l’indépendance de l’Algérie en 1962, l’amazigh n’a été reconnu officiellement qu’en 2002 comme langue nationale, puis en 2016 comme langue officielle aux côtés de l’arabe. Cette reconnaissance visait à apaiser les tensions identitaires, notamment en Kabylie. Cependant, les débats autour de l’identité, de la langue et des appartenances culturelles restent vifs et sensibles, alimentant régulièrement des crispations politiques.
Affaire à suivre.
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