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L’antibiorésistance : la menace qu’il faut cesser de négliger

L’antibiorésistance est la capacité d’une bactérie à résister aux antibiotiques. Un problème qui prend de l’ampleur et préoccupe les spécialistes en Tunisie, et ailleurs… L’ordre des pharmaciens tire la sonnette d’alarme.

Par Cherif Ben Younès

Que faut-il faire lorsque l’on tombe malade? La réponse semble évidente : consulter un médecin. Seulement, pour des raisons diverses, particulièrement lorsqu’il s’agit d’une maladie bénigne et assez connue, ou du moins lorsque l’on pense que c’est le cas, on opte, à tort ou à raison, pour l’automédication.

Diminuer l’automédication est plus que recommandé

Cette pratique est parfaitement justifiable si on n’y recourait qu’une fois de temps en temps, pour apaiser un mal de tête passager par exemple. Toutefois, la réalité en Tunisie est différente, car l’automédication est en train d’y devenir LA règle, surtout en ce qui concerne les maladies dites «courantes».

L’automédication peut s’avérer dangereuse lorsqu’elle fait l’objet d’une erreur de diagnostic : n’étant pas spécialiste, le risque de se tromper est toujours présent, ce qui en engendre celui de passer à côté de quelque chose de grave. Mais cette pratique contribue surtout à l’aggravation de ce qu’on appelle «antibiorésistance», qui consiste en la capacité d’une bactérie, en tant qu’agent de maladie infectieuse, à résister aux effets des antibiotiques.

Les bactéries sont dotées de ce mécanisme biologique de défense grâce à la sélection naturelle, qui leur permet de développer une faculté d’adaptation envers certains stress, tels que le froid, la chaleur et le rayonnement ultraviolet, et également envers des molécules toxiques, comme les métaux lourds et les substances antibiotiques sécrétés par des êtres vivants pour leur propre défense, et dont sont issus la plupart médicaments antibiotiques.

L’automédication peut s’avérer dangereuse.

Une campagne de sensibilisation destinée aux citoyens et aux spécialistes

Or, l’excès dans l’usage de ce type de médicaments, qui est particulièrement enregistré en Tunisie, est susceptible de rendre cette résistance plus accrue. Une situation qui a même incité le Conseil national de l’ordre des pharmaciens de Tunisie (Cnopt) à tirer la sonnette d’alarme, en janvier dernier, en lançant une campagne de sensibilisation à la rationalisation de l’utilisation des antibiotiques.

Cette campagne ne concerne pas seulement les citoyens usant de l’automédication, mais également les médecins, dont certains ont tendance à prescrire «trop facilement» et sans réelle nécessité, des antibiotiques. Les pharmaciens doivent, de leur côté, faire preuve de plus de responsabilité, étant donné qu’environ 40% des citoyens Tunisiens s’y adressent pour leur demander conseil, notamment en ce qui concerne les maladies qu’ils ont déjà eues, selon les estimations du président du Cnopt. Enfin, Les biologistes et chimistes qui fabriquent les médicaments sont également concernés par cette sensibilisation.

Le Cnopt a insisté, à cet effet, sur la nécessité de mettre en place, et de promouvoir l’établissement de protocoles organisant le traitement des maladies infectieuses, que les médecins devraient appliquer lorsqu’ils prescrivent des médicaments, tout en rationalisant les circuits de distribution de ceux-ci.

L’excès dans l’utilisation des antibiotiques commence par entraîner une diminution progressive de leur efficacité, et finit par créer de sérieux problèmes dans le traitement des maladies infectieuses, d’autant plus que la fabrication de nouveaux types d’antibiotiques est en train de stagner dans les laboratoires.

Un autre aspect particulièrement préoccupant en Tunisie, consiste en la résistance aux antibiotiques vétérinaires, utilisé dans la médication des animaux, où, en plus des lacunes observées dans ce domaine, l’aggravation de la contrebande de ces produits favorise leur utilisation abusive.

La situation est préoccupante à l’échelle internationale

Le problème de l’antibiorésistance ne concerne pas seulement la Tunisie, puisqu’environ 700.000 personnes sont décédées, chaque année, dans le monde, suite à des maladies provoquées par les bactéries multirésistantes, c’est-à-dire ayant développé un endurcissement par accumulation de résistances acquises à plusieurs familles d’antibiotiques, ne les rendant plus sensibles qu’à un nombre très limité de ceux utilisables en thérapie.

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