Tunisie, ses «choix nationaux» et les «diktats étrangers»

En rencontrant, jeudi 25 avril 2024 au palais de Carthage, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Fathi Zouhair Nouri, le président de la république Kaïs Saïed a réitéré son rejet des «diktats étrangers», dont sont souvent assortis les prêts des bailleurs de fonds internationaux. Et réaffirmé son attachement au respect de ce qu’il appelle les «choix nationaux».

Latif Belhedi     

Selon un communiqué de la présidence de la république, la réunion d’hier a discuté des résultats de la récente participation d’une délégation tunisienne à la réunion ordinaire du Groupe de la Banque Mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), ainsi que des rencontres tenues avec un certain nombre de représentants de pays et d’institutions financières régionales et mondiales.

Le président Saïed a salué «le respect dont jouit désormais la Tunisie», affirmant que «notre pays, toujours ouvert à la coopération, insiste fermement pour que cette coopération s’inscrive dans le cadre de ses choix nationaux et non soumise à des conditions ou des diktats, comme ce fut le cas dans le passé».

Les «choix nationaux».

Si l’on veut traduire la déclaration présidentielle en termes moins ambiguës et plus claires, on dirait que la Tunisie n’a pas abandonné sa demande d’un prêt de 1,9 milliards de dollars – à laquelle le FMI a donné un accord de principe au niveau des experts depuis octobre 2022. Elle voudrait cependant, en tant qu’emprunteur, imposer ses propres conditions, celles qui préservent la paix sociale, étant donné que les conditions convenues dans les engagements initiaux de notre pays risquaient d’être très douloureuses sur le plan social, notamment celles relatives à l’abandon des subventions aux produits de première nécessité et à la restructuration/privatisation des entreprises publiques déficitaires.

M. Zouhair Nouri ne nous a pas rassurés sur ce point, à savoir l’acceptation des «conditions de la Tunisie» par ses partenaires étrangers. Il ne nous a pas non plus rassurés sur la disposition du FMI à rouvrir le dossier du prêt de la Tunisie et sur une éventuelle reprise de la négociation à son sujet.   

Des flux illicites

Sur un autre plan, le chef de l’Etat a souligné la nécessité pour la Commission d’analyse financière (CTAF), relevant de la BCT, de redoubler d’efforts pour mettre fin aux financements illicites qui profitent aux entités «ayant choisi de s’allier avec ceux de l’étranger qui cherchent à porter atteinte à la stabilité en Tunisie», selon ce qui est rapporté par le communiqué du Palais de Carthage.

Kaïs Saïed laisse ainsi entendre que la Tunisie reçoit des flux financiers illicites et que l’Institut d’émission ne fait pas assez pour les identifier et les traquer, ce qui constitue un reproche adressé à M. Zouhair Nouri, comme il l’avait déjà été à son prédécesseur au poste, Marouane Abassi. Mais ni l’un ni l’autre n’ont cru devoir éclairer l’opinion publique, nationale et internationale, sur la réalité de ces flux, leur nature, leurs origines et les parties qui en ont bénéficié. Une conférence de presse de M. Zouhair Nouri à ce sujet ne serait pas inutile, encore faut-il qu’il ait des choses concrètes à nous rapporter, et non de simples supputations ou présomptions du genre auquel nous avons eu droit jusque-là et qui nous laissent sur notre faim.  

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