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La Cedeao compte adopter en 2020 l’Eco, sa monnaie unique : Quel impact sur la Tunisie?

Marcel de Souza, président de la Cedeao, reçu par Youssef Chahed, le 20 Novembre 2017.

La Tunisie a été admise comme membre observateur de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), depuis le 4 juin 2017. Or, ce groupement régional va adopter en 2020 sa monnaie unique, l’Eco. Quel impact aura l’Eco sur la Tunisie ?

Par Amina Mkada

La nouvelle monnaie de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) sera appelée Eco (nom dérivé de Ecowas, l’équivalent de Cedeao en anglais) et devrait être adoptée dès janvier 2020.  

Pour évaluer de plus près l’impact de l’Eco sur l’économie tunisienne en cas d’adhésion à la Cedeao (notre statut est encore celui d’observateur), nous avons parcouru plusieurs analyses en faveur et contre l’adoption de cette monnaie, et surtout l’impact sur le commerce inter-régional et continental qui pourrait affecter les entreprises économiques, dont celles de la Tunisie.

Une monnaie unique controversée et qui fait encore débat

Discutée depuis une trentaine d’années, cette monnaie unique est vue comme un pari risqué par certains analystes: l’Eco devait être lancée au moins 4 fois depuis 1983. Sera-ce respecté cette fois-ci en janvier 2020, date butoir?

L’Eco n’a pas à elle seule, comme monnaie unique, ce qu’il faut pour faire des affaires, plus facilement que ce n’est le cas en Afrique de l’Ouest actuellement, selon la BBC. Cela signifie que l’adoption de la monnaie unique ne stimulera pas, à elle seule, le commerce intra-régional, à fortiori à une échelle plus large au plan continental, comme cela pourrait être le cas pour les entreprises tunisiennes.

Les obstacles pouvant être créés par l’Eco ne sont pas négligeables, à commencer par l’abandon du Franc CFA arrimé à l’Euro par 8 pays sur les 15 que compte la Cedeao, dont le Sénégal et la Côte d’Ivoire, où des entreprises tunisiennes ont des intérêts assez importants, les 7 autres devant changer leur monnaie nationale.

Mais comme le commente le journal « Le Monde », «la création de l’Eco pourrait être une excellente nouvelle, pour ceux d’entre eux qui utilisent le franc CFA. Elle entraînerait de facto la fin de cette monnaie née pendant la période coloniale, et toujours placée sous la tutelle du ministère français des Finances, avec l’obligation pour les pays africains, de déposer la moitié de leurs réserves de change auprès du Trésor français, et la présence de responsables français dans les instances de leurs banques centrales»

Cependant, «une critique économique conséquente du franc CFA, se situant au-delà d’une critique politico-symbolique, montre que la monnaie unique de la Cedeao, telle qu’elle a été conçue jusqu’ici, ne constitue pas la meilleure voie à suivre», ajoute le journal

Faiblesse du commerce intra-régional de la Cedeao et de ses échanges avec la Tunisie

«Une objection importante contre le franc CFA, rapporte encore « Le Monde », est que les 2 blocs qui l’utilisent, à savoir l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), ne présentent pas les caractéristiques de « zones monétaires optimales ». Cela veut dire que leur existence ne se justifie pas économiquement: les inconvénients à partager la même monnaie, pour les pays membres pris individuellement, sont supérieurs aux avantages à la maintenir. Partant de ce fait, on peut difficilement concevoir qu’une union monétaire plus large, permettra d’inverser la tendance».

La Cedeao riposte à ces critiques, en affirmant qu’elle adopterait l’Eco graduellement, en commençant par les pays qui auront respecté les «critères de convergence», ce qui veut surtout dire la création de réserves de change pour couvrir au moins 3 mois d’importations, un déficit budgétaire ne dépassant pas 3% du PIB, ou une inflation de -10%. Les pays membres ont jusqu’au 29 octobre 2019 pour transmettre leurs programmes pluriannuels de convergence à la Commission de la Cedeao pour la période 2020-2024.

« Le Monde » explique également: «A supposer que l’Eco voie le jour, ses bénéfices risquent d’être limités au regard de la faiblesse du commerce intra-Cedeao (9,4 % en 2017). L’argument selon lequel l’intégration monétaire va changer la donne, est sujet à caution».

Les entreprises tunisiennes, dans un contexte d’adhésion à la Cedeao, auront été prévenues. Leurs engagements financiers auprès de leurs partenaires dans la région devront être bien calibrés pour ne pas avoir à faire face à des complications imprévues, en termes notamment de taux de change.

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