En cas de reprise de l’épidémie du coronavirus (Covid-19), il faudrait se concentrer sur les moyens d’empêcher la super-propagation en détectant très vite les foyers, en isolant les individus contaminés sans mesures radicales pour l’ensemble de la population. Apprendre à vivre avec cet ennemi est aussi une stratégie de guerre, en attendant d’obtenir de meilleures armes.
Par Pr Faouzi Addad *
Finalement, l’une des questions clés de cette pandémie du coronavirus et qui pourrait nous aider à mieux gérer la fin de la partie, c’est de savoir qui sont ses «super-propagateurs».
Le cas récent de la jeune fille Covid-19 positif qui a quitté l’hôtel pour aller avec son fiancé déjeuner dans un restaurant de la ville, puis participer à un mariage à Menzel Temine (Nabeul) et enfin être en contact avec un nombre important de policiers, qui l’ont arrêtée, pourrait peut-être confirmer ce qui semble se confirmer, c‘est qu’une grande partie d’individus ne transmettent pas le virus. Il sera important d’attendre les tests des 80 personnes confinées suite au contact avec cette personne pour encore confirmer cette hypothèse.
20% des gens contaminés à l’origine de 80% des contaminations
Nous avions déjà parlé du cas du patient de Boumerdes (Mahdia) et de celui d’un chef de service qui était au contact de tous les membres de son équipe sans en infecter aucun.
Il semble aujourd‘hui largement admis que 10 à 20% seulement des personnes sont à l’origine de 80% des transmissions et que plus de 80% des autres personnes infectées ne transmettent pas le virus et restent même totalement asymptomatiques.
La stratégie serait donc d’établir le portrait-robot du «super-propagateur» afin de le neutraliser. Le problème, c’est que les experts n’ont toujours pas d’éléments cliniques ni biologiques pour identifier ce profil.
Il est donc plus judicieux d’identifier les situations qui favorisent la super-propagation plutôt qu’identifier les patients potentiels. D’ailleurs, ce fameux facteur R0 a progressivement disparu de nos écrans pour être remplacé par le facteur K (ou facteur de dispersion).
Eviter les espaces fermés où s’entassent les foules
Aujourd‘hui le virus se propage très peu avec un facteur K très faible. Il faut donc éviter les «trois C» qui sont des situations pouvant augmenter ce facteur K. Il faut éviter les espaces fermés (closed spaces) surtout les endroits mal ventilés, les contacts étroits (closes contacts), comme dans les salles de fêtes ou les boîtes de nuit fermées et puis les foules (crowed places).
On peut aussi émettre l’hypothèse que le fait que nos hôpitaux se soient vidés de patients durant l’épidémie a joué un rôle dans le contrôle du coronavirus. En effet, les hôpitaux peuvent être classés parmi les «3C», car ce sont des espaces fermés (surtout l’hiver), où des foules sont en contact étroit (urgences et consultations).
Cette notion permettrait d’envisager des stratégies de lutte contre l’épidémie totalement différente du confinement prolongé aux conséquences sociales et économiques importantes.
En cas de reprise de l’épidémie, il faudrait se concentrer sur les moyens d’empêcher la super-propagation en détectant très vite les foyers, en isolant les individus contaminés sans mesures radicales pour l’ensemble de la population. Apprendre à vivre avec cet ennemi est aussi une stratégie de guerre en attendant d’obtenir de meilleures armes.
* Professeur en cardiologie.
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