Le projet de loi controversé, proposé par la coalition Al-Karama, qui vise à amender le décret-loi n°116 relatif à la liberté de la communication audiovisuelle, a été approuvé aujourd’hui, mercredi 8 juillet 2020, par la commission parlementaire des droits et des libertés. Il sera soumis au vote prochainement lors d’une plénière.
Il aura fallu seulement un petit quart d’heure aux membres de ladite commission, composée principalement par les députés de la nouvelle troïka parlementaire (Ennahdha, Al-Karama et Qalb Tounes), pour approuver ce projet de loi qui menace sérieusement l’avenir du secteur audio-visuel en Tunisie, en prévoyant notamment l’annulation de l’autorisation de la Haica pour la création d’une chaîne de télévision.
Ce sont justement Ennahdha, Qalb Tounes et Al Karama qui ont voté pour, cumulant 11 voix, alors que le bloc démocrate (composé principalement par les députés d’Attayar et du mouvement Echaâb) et le Parti destourien libre (PDL) ont voté contre (3 voix), tandis qu le représentant du bloc de la Réforme s’est abstenu de voter.
Rien de surprenant puisque le projet de loi en question vise à contourner la loi actuelle selon laquelle les chaînes de télévision Nessma et Zitouna TV sont illégales. Deux chaînes dont les propriétaires appartiennent respectivement à Qalb Tounes et au courant islamiste du duo Ennahdha – Al-Karama.
En outre, ce projet de loi tente de politiser la Haica en renouvelant sa composition à travers l’élection de ses 9 membres par le parlement, à la majorité des voix.
Il va sans dire que l’objectif derrière cette manœuvre politique est de permettre à la troïka susmentionnée d’avoir la mainmise sur le secteur audiovisuel tunisien.
Rappelons que la Haica avait fermement condamné l’initiative d’Al-Karama, assurant qu’elle contredisait l’article 148 de la constitution qui lui donne le droit de continuer d’exercer avec les lois et la composition actuelles, jusqu’à la finalisation de la constitution de l’Instance de la communication audiovisuelle.
La Haica avait également souligné que le timing du projet de loi coïncidait, intentionnellement, avec la décision gouvernementale d’appliquer – enfin – des sanctions à l’encontre des médias audiovisuels qui diffusent dans l’illégalité.
L’ancien magistrat Ahmed Souab avait déclaré, dans le même cadre, en juin dernier, que les décrets-lois publiés sont considérés comme des lois à part entière et que la Haica doit poursuivre son travail jusqu’à la formation de l’instance définitive. Par conséquent, il n’est pas possible, d’un point de vue légal, selon lui, de la dissoudre ou de lui retirer ses prérogatives.
Cherif Ben Younès
Donnez votre avis