Le roman de Aziz Didi ‘‘L’homme qui voyait loin’’ (éditions Arabesques, Tunis, 2024, 78 pages) possède les qualités d’un premier roman : l’ambition, la conviction et la volonté de s’attaquer aux gros problèmes de l’humanité. Il en a aussi les défauts : la grandiloquence que nourrissent l’inexpérience et la naïveté.
C’est l’histoire d’un jeune homme, ingénieur chimiste, brillant mais frappé d’une maladie handicapante, l’épilepsie. Au fil de ses crises répétitives, qui l’empêchent de vivre pleinement sa jeunesse, il découvre en lui un don rare : il voit les choses avant qu’elles ne surviennent. Même l’amour qui le liera bientôt à une jeune fille qui partagera ses secrets, ses peurs et ses ambitions.
Tout cela est passionnant et aurait pu donner lieu à un récit, des atmosphères et des situations romanesques dont rêveraient tout auteur, mais Aziz Dridi ne s’attarde pas sur les motivations de ses personnages et leurs ressorts psychologiques les plus profonds. Il semble plutôt soucieux de déployer son récit et d’aller directement au but, quitte à brûler les étapes et à laisser le lecteur sur sa faim.
Nous ne raconterons pas toute l’histoire pour préserver le suspense de la narration et laisser aux lecteurs le plaisir de la découverte. Nous dirons simplement que Paul Lassale, notre «héros», voit venir une catastrophe atomique et, avec l’aide de sa dulcinée, Jeanine Dubois, pénètre dans la centrale nucléaire où le pire devrait advenir.
L’histoire ainsi esquissée aurait pu servir de canevas pour un excellent roman de science fiction, mais Aziz Dridi, par manque de souffle et d’endurance, ne se donne pas le temps de dérouler patiemment son récit, d’inventer des intrigues, de multiplier les pistes et de mener son lecteur par le nez vers l’issue la plus invraisemblable, comme l’aurait fait un auteur expérimenté. Mais on lui pardonnera ces faiblesses, car ce petit roman, écrit par un jeune homme de 20 ans, étudiant en chimie industrielle à l’Insat, à Tunis, annonce peut-être la naissance d’un futur écrivain dont on ne manquera pas de parler à l’avenir.
Imed Bahri
Donnez votre avis