La Tunisie a été profondément touchée par la Révolution du Jasmin de 2011 qui a renversé le président Zine El Abidine Ben Ali, et le pays ne s’est jamais remis économiquement. La situation a été exacerbée par la crise sanitaire déclenchée par la pandémie de Covid-19 et par les crises politiques que connaît le pays ces dernières années. Rapport de conjoncture de la Lloyd Bank.
Selon les estimations du FMI, la croissance économique devait s’établir à 1,3% en 2023 (contre 2,5% un an plus tôt) *, en raison de la baisse significative de la production de blé causée par l’insuffisance des précipitations. En 2024, la croissance continuera d’être limitée en raison d’un risque souverain élevé affectant l’environnement des affaires et la confiance des investisseurs, ainsi que d’une inflation élevée. En outre, l’effet d’éviction croissant sur le secteur privé dû aux besoins de financement substantiels du gouvernement contribuera à ces contraintes. Pour l’ensemble de l’année, le FMI prévoit une croissance à 1,9% [et la BAD 2,1%], avec une accélération à 2,3% en 2025.
La Tunisie a reçu une aide financière de plusieurs organisations internationales, telles que la Banque africaine de développement, le FMI et l’Union européenne (qui a décaissé 600 millions d’euros de prêts dans le cadre du programme d’aide d’urgence d’assistance macrofinancière). Le pays a également conclu un accord au niveau des services sur un programme de facilité de financement élargie (FEP) de 1,9 milliard de dollars sur quatre ans avec le FMI.
Déficit budgétaire, endettement et disparités régionales
Le budget 2023 a été modifié par le gouvernement, entraînant un déficit projeté révisé à 6,8% du PIB (dons compris), en hausse par rapport à l’objectif initial de 5%, après un déficit de 7,3% en 2022. L’augmentation du déficit résulte principalement d’une augmentation des subventions et des transferts aux entreprises publiques et un coût de la dette plus élevé par rapport au budget initial. Sur l’horizon de prévision, le déficit devrait diminuer progressivement (4% cette année et 3,2% en 2025 – FMI).
Dans le même temps, le ratio dette/PIB a diminué à 77,8 % (contre 79,8 % un an plus tôt) et devrait augmenter légèrement en 2024, à 77,1 % selon les prévisions du FMI. Cependant, la majorité de la dette extérieure élevée est publique ou garantie par l’État, ce qui peut susciter des doutes quant à la capacité du pays à assurer le service de sa dette.
Les pressions inflationnistes se sont nettement accrues et devraient rester élevées à court terme (9,4% en 2023 et 9,8% en 2024 selon le FMI). Parmi les politiques nécessaires pour restaurer la stabilité macroéconomique, le FMI souligne une réduction consciencieuse du déficit budgétaire grâce à une réforme fiscale équitable, un contrôle strict de la masse salariale du secteur public, des subventions mieux ciblées et des réformes en profondeur des entreprises publiques.
La Tunisie est confrontée à des disparités économiques croissantes qui favorisent ses régions côtières, qui représentent plus de 80% des zones urbaines et 90% de l’emploi global. Les taux de pauvreté les plus élevés se concentrent dans les zones rurales, notamment celles du nord-ouest et du sud-ouest du pays (dépassant souvent 33%). A l’inverse, c’est la grande région de Tunis qui présente les valeurs les plus faibles (Carnegie). Selon les derniers chiffres de l’Institut national de la statistique (INS), au deuxième trimestre 2023, le taux de chômage s’élevait à 15,6 %; néanmoins, le chômage des jeunes – à 38,1% – était particulièrement élevé. Par sexe, le taux de chômage reste nettement plus élevé pour les femmes (21,1%) que pour les hommes (13,2%).
Situation de l’agriculture et de l’industrie
L’agriculture est un secteur clé de l’économie tunisienne, représentant 9,8% du PIB et employant 14% de la main d’œuvre (Banque mondiale, dernières données disponibles). Le pays dispose de 9,7 millions d’hectares de terres agricoles, soit 62% de sa superficie totale (FAO). L’amélioration des méthodes de production ces dernières années a permis au secteur de se développer et de se moderniser (culture d’oliviers, d’arbres fruitiers et de palmiers) tout en permettant au pays d’atteindre un niveau de suffisance alimentaire. L’agriculture biologique est également en plein essor, la Tunisie étant l’un des pays les plus productifs d’Afrique. L’huile d’olive représente la plus grande part des exportations agricoles, suivie par les dattes, les olives et les fruits frais.
Selon les chiffres de l’Observatoire national de l’agriculture (Onagri), les exportations alimentaires tunisiennes ont connu une hausse remarquable de 21,3% en 2023, tandis que les importations ont connu une baisse de 6,2%. Cela s’explique principalement par la hausse des exportations d’huile d’olive (+52,4%) et la baisse des importations de céréales (-11,2%) et d’huiles végétales (-40%).
L’industrie représente 23,3% du PIB et emploie 34% de la population active. Les secteurs industriels du pays sont principalement orientés vers l’exportation. Parmi les secteurs en déclin figurent l’industrie du cuir et de la chaussure, le papier, le carton, le plastique et le bois. Les secteurs de la chimie, du textile et de l’habillement ont connu une croissance ces dernières années; cependant, la crise économique déclenchée par la pandémie de Covid-19 a touché surtout le secteur du textile et de l’habillement et les sous-secteurs de l’ingénierie mécanique et électrique, qui sont encore en phase de convalescence.
Dans l’ensemble, le secteur manufacturier est estimé à 15% du PIB (Banque mondiale) et est fortement connecté aux chaînes de production européennes. Selon les derniers chiffres de l’INS, l’indice de la production manufacturière s’est établi à 105,3 en 2022 (2010=100).
Traduit de l’anglais.
Source : Lloyds Bank.
* En fait, selon l’INS, la croissance économique s’est établie à 0,4% en 2023.
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