Ennahdha tire sa bonne santé apparente de la faiblesse criarde des partis libéraux et de centre-gauche, plus divisés que jamais.
Par Mohamed Chawki Abid *
Viendra-t-il ou ne viendra-t-il pas ? Certains de ses proches lui auraient déconseillé d’assister à l’ouverture du 10e congrès du mouvement Ennahdha, hier soir, à Radès. Le suspense aura finalement été mince. Le président de la république Béji Caïd Essebsi a peut-être bien fait d’y aller, pour contribuer à la production d’une belle photo, l’image d’un pays uni et indivisible, malgré la pluralité de ses familles politiques.
Naturellement, Rached Ghannouchi, l’inamovible président d’Ennahdha, malin comme il est, en a tiré grand profit. Et on ne peut raisonnablement le lui reprocher. Son mouvement, hier encore voué aux gémonies, accusé de tous les maux de la société tunisienne et éjecté du pouvoir suite à un mouvement de protestation massive, retrouve une santé de fer.
Dé-islamisé (du moins en apparence) et reconfiguré (selon ses propres dires), Ennhadha semble gagner en crédibilité populaire, non pour ses qualités propres (il a montré l’ampleur de son incompétence dans la conduite des affaires publiques), mais en raison de la médiocrité des prestations de son adversaire d’hier, Nidaa Tounes, durant 18 mois de gouvernement, de ses conflits fratricides de très bas niveau et de son échec cuisant dans la traduction de son programme socio-économique en actions gouvernementales.
Même si les récents sondages révèlent que 73% des Tunisiens sont pour une séparation entre la religion et la politique, le parti islamiste prospérera davantage pendant les 10 années à venir, si les partis libéraux et de centre-gauche ne révisent pas de façon constructive leurs politiques fondées sur les querelles de leadership et les luttes fratricides.
Lors des prochaines municipales, prévues en mars 2017, on peut parier que la plupart des municipalités seront raflées par le Néo-Ennahdha qui est censé sortir du 10e congrès, prélude à son retour au pouvoir par la grande porte.
* Ingénieur économiste.
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