La Tunisie va de mal en pis

Ce n’est pas un scoop, mais un rappel utile : la situation économique de la Tunisie est «difficile», a déclaré le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Marouane Abassi, lors d’une conférence de presse tenue, mardi 4 janvier 2023, au siège de la BCT, à Tunis. «Difficile» est un euphémisme, eu égard le tableau plutôt sombre que notre argentier national a brossé.   

Par Imed Bahri

La Tunisie doit faire face aux déficits jumeaux, budgétaire et commercial, qui continuent d’escalader l’Everest, alors que le taux de croissance prévu en 2023, en l’occurrence 1,8%, demeure faible et ne permettra pas de résoudre les problèmes, d’autant que le pays fait face à un recul de l’investissement et de la production dans des secteurs stratégiques comme le phosphate, a aussi souligné M. Abassi, dont la récente décision de relever à nouveau le taux directeur de 75 points de base (0,75%) à 8% ne va pas beaucoup aider à la relance économique, au contraire ! Cette mesure est censée ralentir la hausse de l’inflation, estimée actuellement à 10,5%, et qui est en grande partie importée, disent les experts.

D’ailleurs, M. Abassi affirme que le taux d’inflation tangible ou perceptible est actuellement à deux chiffres, ajoutant que les mesures inscrites dans la loi de finances pour l’année 2023, notamment la décision de lever progressivement les subventions, entraînera une hausse remarquable des prix et donc de l’inflation.

Des constats en attendant les solutions

Cette situation est d’autant plus inquiétante que le secteur agricole, qui représente à lui seul 8% du PIB, souffre aussi de difficultés, en raison des changements climatiques et du déficit pluviométrique, a aussi déploré M. Abassi, qui, en termes de constats, répète ce que nous écrivons depuis plusieurs semaines voire plusieurs mois, mais qui, en termes de solutions, n’apporte pas grand-chose pour aider à sortir le pays de l’ornière de la crise.

Evoquant la situation des finances publiques, autre plaie ouverte, le gouverneur de la BCT a indiqué que le déficit budgétaire sera de l’ordre de 7,5% en 2022, tandis que le déficit courant atteindra 8,7% et que celui d’inflation pourrait dépasser 11% en 2023. Et pour apporter le coup de grâce à tous nos espoirs, M. Abassi a cru devoir prévenir qu’«en l’absence d’un accord avec le Fonds monétaire international (pour un financement de 1,9 milliard de dollars en quatre ans, Ndlr), la situation sera encore plus difficile pour le pays», car sans cet accord la Tunisie ne pourra pas mobiliser les autres financements extérieurs dont elle a besoin pour financer son budget pour l’exercice en cours.

Pas de plan B

Encore heureux que l’examen du dossier de la Tunisie par le conseil d’administration du FMI, qui était déprogrammé le 19 décembre dernier par la faute du gouvernement tunisien, pas encore prêt, a seulement été reporté, a assuré M. Abassi. Mais s’il était carrément annulé, que ferait la Tunisie ?

Là, ni M. Abassi ni les membres du gouvernement ni le président Kaïs Saïed – qui, de toute façon, ne comprend rien à la finance – n’ont la moindre idée de ce qu’ils pourraient faire pour mobiliser les financements nécessaires au paiement des salaires, des pensions de retraites et des autres dépenses de l’Etat. «Nous n’avons pas de plan B», avait lancé il y a quelques jours le ministre de l’Economie et de la Planification, Samir Saïed.

Le cauchemar absolu, en somme, et nous sommes censés être contents du rendement du plus faible gouvernement que la Tunisie ait connu au cours du dernier demi-siècle !

 

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