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‘‘Les derniers jours de Muhammad’’ : Enquête de Héla Ouardi

Hela-Ouardi

Ce texte a été présenté à la rencontre-débat avec Héla Ouardi qui s’est tenue à la Bibliothèque nationale, à Tunis, le vendredi 6 mai 2016.

Par Noura Borsali *

Héla Ouardi, dans les premières pages de l’ouvrage réservées au prologue, présente sa problématique et sa démarche. Les constats et les questions foisonnent à propos de la mort de Muhammad, de la cause de cette dernière et de son enterrement tardif laissant le prophète à l’abandon dans l’indifférence générale, de l’absence de Aïcha et de Abû Bakr et ‘Umar, les deux futurs califes, de l’empêchement de Muhammad d’écrire son testament… Et que de questions encore et encore…

Eclairer le «trou noir»

Cela révèle, d’une part, un grand «trou noir» dans la tradition et, d’autre part, une gestion peu reluisante de la fin de Muhammad. «Aucun livre de la tradition musulmane, écrit-elle à la p.14, ne donne la moindre information sur ce trou noir de deux jours au cours desquels le cadavre de l’Envoyé de Dieu est abandonné. La tradition, d’habitude si bavarde, si bien informée des moindres détails de la vie du prophète et de ses compagnons, devient à ce sujet brusquement amnésique et muette».

C’est pourquoi Héla Ouardi a entrepris une «enquête» (mot qu’elle prend soin de placer entre guillemets) sur cette page sombre d’un moment crucial de l’histoire de l’islam. Détrompons-nous, il ne s’agit pas ici d’une enquête policière même si la bande rouge de la couverture sur laquelle l’éditeur a inscrit «Enquête sur la mort mystérieuse du prophète» pourrait susciter un suspense digne d’un roman policier et ésotérique du romancier américain Dan Brown, auteur de ‘‘Da Vinci Code’’. Le mot «enquête» doit être pris dans son sens étymologique qui signifie «recherche». Il s’agit donc bien d’«un authentique travail de recherche scientifique, qui est sorti de mes notes de lecture», nous confie Héla Ouardi.

D’ailleurs, comme l’écrit le Marocain Abdesselem Cheddadi, historien et anthropologue, professeur à l’Université de Rabat, dans un excellent article intitulé «A l’aube de l’historiographie arabo-musulmane : la mémoire islamique» : «A l’époque inaugurale où nous nous plaçons (celle du père de l’Histoire Hérodote, entend-il), l’histoire se définit comme une enquête : on pose des questions, on cherche à recueillir des informations sur quelque chose qui, autrement, risquerait de se perdre dans l’oubli. Il s’agit, donc, par une démarche volontaire, de sauver de la mémoire», surtout quand les garanties de pérennité ne sont pas assurées, précise-t-il.

C’est ainsi que Héla Ouardi mène son «enquête» : avec beaucoup de questionnement et avec minutie et prudence. S’armant d’un matériau riche et diversifié, se référant au Coran et à diverses sources (comme le corpus de hadiths, les sira, les maghazi, etc…) et y puisant différentes versions et variantes présentées par des chroniqueurs et des historiens tels que Ibn Ishâq, Ibn Hisham, Al-Zuhrî, Tabari, Ibn Sa’ad, Boukhari, Muslim, Al-Waqidi, Baladhûri, Ibn Athir, et que sais-je encore…

Quand bien même des auteurs auraient pointé du doigt les limites des sources narratives islamiques, elle nous offre, de l’agonie de Muhammad, une reconstitution chronologique inédite basée sur une bibliographie solide, consacrant 120 pages – sur les 361 que contient l’ouvrage – aux questions historiographiques, aux sources et aux notes. Souci de précision, certes mais également de prudence qu’un tel sujet exige.

Un des intérêts de l’ouvrage est donc l’approche méthodologique qui concerne ses sources textuelles. Ces dernières sont parfois contradictoires et regroupent des versions différentes d’un tel ou autre événement. Le mérite de Héla Ouardi est d’avoir réussi à les juxtaposer jusqu’à établir, par exemple, une convergence des sources sunnites et chiites qui semblaient pour nous, jusque-là, divergentes, voire opposées.

«Les nombreuses notes et sources dans mon livre, nous livre-t-elle dans un long entretien au quotidien ‘‘La Presse’’, sont le reflet de cette curiosité et de cette prudence. A cela s’ajoute évidemment l’esprit de rigueur et d’honnêteté scientifiques auquel j’accorde la plus grande importance aussi bien pour cet ouvrage que pour mes travaux académiques antérieurs».

C’est dire le travail acharné de l’auteur qui, bien qu’elle n’ait rien apporté de nouveau, comme elle le dira elle-même, a compilé – mais avec quelle maîtrise ! – des informations tirées et triées de différentes sources parfois divergentes, comme ces sources sunnites et chiites qui, après un recoupement minutieux, ont fini par converger à notre grand étonnement. Un «travail certes laborieux mais passionnant», dit-elle.

«Il n’y a pas de révélations dans mon livre puisque tout ce que je dis je l’ai trouvé dans les ouvrages de la Tradition. Tout est dit dans les livres de tradition – sous ce terme de ‘‘tradition musulmane’’ sont réunis les Hadiths (paroles attribuées au prophète) et la Sira (biographie de Muhammad). Je n’invente rien», précise-t-elle. «Par ailleurs, je suis consciente du caractère subversif de certaines informations qui figurent dans mon livre; il est important pour moi que le lecteur sache à travers les références aux sources de la Tradition que ces faits ne sont pas le fruit de mon imagination. Je n’invente rien. Je me considère moins comme auteure que comme compilatrice (le mot arabe est éloquent dans ce sens مؤلّفة) : je regroupe les textes et j’y mets de l’ordre.»

Certes, des polémiques théologiques ont existé autour de la mort du Prophète notamment entre les sunnites et les chiites, mais ce sont des polémiques dénuées de neutralité parce que «idéologiques articulées à la question de la légitimation du pouvoir», précise-t-elle.

Selon certaines sources, le traditionniste médinois Al-Wâqidi (m. 822) est censé avoir recueilli un ensemble de traditions relatives à la mort du Prophète (‘‘Kitâb wafât al-nabî’’), mais le livre a disparu et il ne subsiste que dans les œuvres de son élève Ibn Sa’d (mort en 845). Il existe certes le récit d’Ibn Ishâq (m. 767) et ceux attribués à Al-Zuhrî (m. 742), sur la mort et l’enterrement de Muhammad mais, pour certains historiens, ces sources poseraient problème. C’est à cette difficulté relative à l’authenticité des sources et à leur fiabilité que l’auteure comme tout chercheur, a dû être confrontée.

Substituer à l’épopée la tragédie

Livre inédit alors? Sans doute, toutefois en dehors du livre de Stephen J. Shoemaker, ‘‘The Death of a Prophet. The End of Muhammad’s life and the Beginning of Islam’’ (Philadephia, Université of Pennsylvania Press, 2012, 408 p.), car Héla Ouardi fait œuvre dans son livre de relecture-réécriture. Elle nous propose, en fait, une lecture nouvelle de ce corpus ancien dont dit-elle, elle réorganise chronologiquement les données suivant les règles de l’écriture historienne moderne. Et de s’interroger : «Comment l’Occident a-t-il fait sa ‘‘Renaissance’’? En relisant le corpus de l’Antiquité. Sans prétention aucune, je m’inscris, toutes proportions gardées bien sûr, dans cette démarche ‘‘humaniste’’ de relecture-réécriture.»

Une autre question que l’ouvrage a le mérite de susciter réside dans cette difficulté pour un historien ou un chercheur d’établir la biographie de Muhammad. Certains historiens considèrent que la surabondance des sources délivrant une foule de faits et de détails sur la vie de Muhammed est «trompeuse» (2), écrire la biographie de Muhammad relèverait de l’impossible (3) compte tenu des faits suivants. D’une part, les plus anciens textes sur la vie de Muhammad remontent à cent vingt-cinq ans après sa mort environ, et d’autre part, les sources ne sont pas toujours fiables mais plutôt largement apocryphes. Ce qui a fait écrire à Maxime Rodinson: «Une biographie de Mohammad, qui ne mentionnerait que des faits indubitables, d’une certitude mathématique, serait réduite à quelques pages et d’une affreuse sécheresse. Il est pourtant possible de donner de cette vie une image vraisemblable. Mais il faut, pour cela, utiliser des données tirées de sources sur lesquelles nous n’avons que peu de garanties de véracités.» (5) D’autant que «de Muhammad, Prophète de l’islam, n’existe pas le moindre document d’époque» et qu’«il est très peu présent sous son nom dans le texte du Coran (3, 144; 33, 40; 47,2; 48, 29; 61, 6», note Jacqueline Chabbi (4).

Il y a certes la Sîra et les Hadiths (2e, 3e et 4e siècle de l’ère musulmane, correspondant aux IXe, Xe et XIe siècles de l’ère commune). Mais l’islam ne possède aucune trace écrite contemporaine à son avènement.

Ce que nous propose l’auteure, dans son ouvrage, c’est cette rupture avec certains écrits dogmatiques et idéologiques sur Muhammad. Il s’agit de rendre à Muhammad sa dimension humaine et historique : une manière de réécrire l’un des moments les plus importants de la mémoire de l’islam en libérant cette dernière des dogmes et de l’apologie. «Je me situe ainsi à l’extrême opposé de l’esprit dogmatique qui utilise une image figée et idéologisée du Prophète pour manipuler les musulmans et les pousser à commettre des meurtres. L’image humanisée de Muhammad proposée dans mon livre ne le sacralise pas mais ne l’amoindrit pas non plus; au contraire, elle essaye de créer avec lui une relation d’empathie et de proximité, en parfaite conformité avec le Coran», écrit Héla Ouardi.

Dieu ne dit-il pas à son Prophète : «Dis : je ne suis qu’un mortel semblable à vous?» (sourate 18 ‘‘La Caverne’’, verset 110). Verset que Héla Ouardi prend soin de mettre en exergue au début de son ouvrage. En fait, il s’agit, pour l’auteure, de substituer à l’épopée la tragédie. «Par la reconstitution des derniers jours de la vie de Muhammad, nous souhaitons extirper l’homme enseveli sous la légende héroïco-religieuse et le restituer à l’histoire. Cette démarche s’est imposée à nous comme une évidence», écrit-elle à la page 18.

Muhammad apparaît, avant sa mort, comme un être fragilisé, trahi par les siens et accablé de malheurs tel la perte de son fils Ibrahim. Le Marocain Abedesselm Cheddadi déjà cité écrit à ce propos : «Contrairement à ce qui se passe dans le christianisme avec Jésus, la vie de Muhammad n’est pas sacralisée. Son nom est mentionné dans la profession de foi (Shahâda), mais ni sa naissance ni les grands moments de sa mission ni aucun épisode de sa vie ne donnent lieu à un rituel, ne sont intégrés dans le culte. Certes, ajoute l’auteur dans sa note, à partir du XIIIe siècle, la naissance de Muhammad est célébrée par des cérémonies religieuses. Mais le chant et la musique associés à cette célébration ont été désapprouvés par un certain nombre de fuqahâ». Et Cheddadi de conclure : «La mémoire dont Muhammad est entourée est d’emblée une mémoire historique» (article déjà cité).

Comme elle s’inscrit en faux contre une légende qui fait de Muhammad un être illettré. Pour l’auteure, Muhammad aurait été un homme de l’écrit, «écrivant lui-même des missives et entouré de plusieurs secrétaires chargés de noter la Révélation au fur et à mesure qu’elle se produit», écrit-elle dans son ouvrage. Un tel constat détruit toute une légende.
Par ailleurs, l’auteure semble contester, dans son livre, que Muhammad soit une figure fondatrice. Quel serait alors son rôle? Se limiterait-il à la Révélation? D’autant qu’elle affirme plus loin que ce sont ses successeurs et surtout Abû Bakr qui ont édifié ce que Muhammad n’a pas réussi à faire, en donnant «un avenir» et «une carrière universelle» à la religion (selon ses propres termes). Pourtant, elle est loin d’être tendre avec les deux premiers successeurs de Muhammad et surtout avec ‘Umar qu’elle ne ménage guère.
Par ailleurs, l’auteure nuance, dans son ouvrage, l’affirmation de l’historien Hichem Djaït qui écrit dans la conclusion de son ouvrage ‘‘La vie de Muhammad’’ (Volume 3) (6) que «l’homme Muhammad, prophète et homme d’action, aura accompli une très grande œuvre… Il a posé partout, dans presque toute l’Arabie, les jalons d’un mouvement que ses successeurs, les deux premiers notamment, vont poursuivre et amplifier.» (p.308), ou encore ce passage de Djaït que cité à la page 81 de l’ouvrage: «A sa mort, le prophète a laissé une religion achevée et un Etat rayonnant sur toute l’Arabie, indissolublement liés». Pour Héla Ouardi, il y avait plutôt péril en la demeure, en cette fin de règne, avec d’«inquiétants mouvements de séditions» et d’apostasie ainsi qu’une course au califat avec les intrigues politiques que cela suppose.

Soustraire l’histoire de l’emprise du dogme

Un autre aspect du livre que j’ai trouvé fascinant, c’est son style littéraire parfaitement travaillé, c’est cet art de la narration, c’est ce récit dont l’auteure a usé de toutes les caractéristiques, qui rendent sa lecture captivante.

Une intrigue autour d’un sujet enveloppé de mystère et renforcée par une enquête fouillée, un ordre chronologique sans failles, une confrontation méticuleuse de diverses sources, une caractérisation parfois métaphorique… N’est-ce pas là des empreintes littéraires qui laissent entrevoir, sans doute, une influence de sa formation littéraire et qui évitent à l’ouvrage de sombrer dans «une spéculation intellectuelle», selon sa propre expression, lassante et ennuyeuse.

De ce «plaisir du texte» – pour reprendre une expression chère au sémiologue français Roland Barthes –, surgit un désir d’esthétique dans ce petit bout de phrase titrant le prologue : «Dessine-moi un prophète» qui pose une question – ô combien périlleuse pour les sunnites que nous sommes ! –.

Simple provocation de la part de l’auteure? Loin de là car en lisant cette reconstitution narrative qu’elle nous livre, on a comme l’impression que Héla Ouardi y met une représentation esthétique des derniers jours de Muhammad, comme si elle voulait pallier à cette interdiction des sunnites de représenter le prophète contrairement aux chiites et aux Ottomans qui ornent certains de leurs manuscrits de miniatures représentant le prophète ou encore aux Iraniens chiites qui, tout récemment, en 2015, et par le biais d’un de leurs grands cinéastes Majid Majidi (59 ans), viennent de le représenter dans un film ‘‘Mahomet’’, une superproduction sur l’enfance du prophète pour en finir avec «l’image violente» de l’islam, souligne le réalisateur iranien. Ce film montre les premières années du prophète. De sa naissance jusqu’à ses 13 ans. En fait, dans le film de Majid Majidi, le visage du prophète n’apparaît jamais grâce à un jeu d’effets spéciaux. En revanche, on voit sa silhouette et son profil (7).

Pour Héla Ouardi, «pour que ce ‘‘dessin’’ soit esthétique, nous dit-elle, j’ai essayé de mettre en évidence l’aspect tragique qui caractérise la fin de l’existence de Muhammad et qui donne au personnage une dimension sublime, comparable à celle des héros de la tragédie grecque.»

En guise de conclusion, Héla Ouardi, par cet ouvrage important, a fait œuvre de «réappropriation de l’histoire», pour reprendre le titre d’un excellent ouvrage ‘‘Les Arabes et l’appropriation de l’Histoire’’ du Marocain Abdesselem Cheddadi (8). Alors, vouloir soustraire l’histoire de l’emprise du dogme et prendre sa distance avec la vision apologétique dominante dans la tradition, n’est-ce pas une aventure risquée? Et «vouloir traverser la vie avec une horde de mots. Et les mots ne sont-ils pas dangereux» (Tahar Ben Jalloun).

Si nous avons du mal à lâcher l’ouvrage, c’est parce que, par le truchement du récit littéraire, l’auteure a conclu son ouvrage avec un fameux «A suivre…» renforcé – de surcroît – par des points de suspension… Pour son second livre, c’est en effet un huis-clos qu’elle nous propose dans une nouvelle forme d’écriture, à savoir le théâtre. Pour Héla Ouardi, la littérature et l’Histoire font bon ménage.

Tout cela en attendant bien sûr la publication en arabe de son présent ouvrage qui a un dernier mérite, et non des moindres : celui de stimuler le débat historiographique relatif aux débuts de l’islam.

Sources bibliographiques :
(1) Présentation du livre de Stephen J. Shoemaker par Hassen Bouali, Archives de sciences sociales des religions, 2014/4 (no 168), éditions de l’EHESS.
(2) Jacqueline Chabbi, ‘‘Mohammed et la naissance de l’islam’’, article publié le 18/6/2015.
(3) Jacqueline Chabbi, ‘‘Le seigneur des tribus. L’Islam de Mahomet’’, Noêsis, Paris, 1997.
(4) Maxime Rodinson, ‘‘Mahomet’’, éditions du Seuil, 1962, P.12 .
(5) Jacqueline Chabbi, ‘‘Mohammed et la naissance de l’islam’’, article publié le 18/6/2015.
(6) Hichem Djaït, ‘‘La vie de Muhammad’’ (Volume 3), Cérès éditions, 2012.
(7) RFI, 27-08-2015 : ‘‘Mahomet’’: Majid Majidi veut rompre avec «l’image violente» de l’islam.
(8) Abdesselem Cheddadi, « Les Arabes et l’appropriation de l’Histoire », Sindbad, 2004.

Bio-express de Héla Ouardi :
Héla Ouardi n’est pas historienne des religions. Elle n’est pas non plus islamologue, ni anthropologue ni philologue… Elle est spécialiste de littérature et de civilisations françaises et enseignante-universitaire à l’Université Tunis El Manar, à l’Institut supérieur des sciences humaines. Auteur d’une thèse de doctorat en littérature française intitulée : «La littérature au miroir dans l’œuvre romanesque de Queneau», qu’elle soutient brillamment, en 2001, à l’Université de Paris III-Sorbonne Nouvelle, mention très honorable, et avec félicitations du jury, après avoir obtenu en 1994, toujours aussi brillamment, son Diplôme de maîtrise en littérature française à l’Université du Centre – Faculté des Lettres de Sousse, Prix présidentiel. En 2006-2009, elle a occupé le poste de directrice du Département scientifique de l’Académie tunisienne des Sciences, des Lettres et des Arts, Beït el-Hikma. Elle a des écrits publiés dans sa spécialité. Après avoir soutenu son habilitation à diriger des recherches, elle se lance un véritable défi, en réorientant ses recherches vers l’histoire et l’historiographie des débuts de l’islam. Elle a alors intégré en tant que membre associé le Laboratoire d’études sur les monothéismes, Groupe du Centre d’études des religions du Livre (CERL) du CNRS, Équipe 1 : “Livres sacrés : Canons et Hétérodoxies”, pour «apprendre le métier», nous dit-elle. A propos de cette «conversion», elle dira dans un entretien qu’elle m’a gentiment accordé et dont j’ai cité quelques passages dans ma présentation : «Je crois que beaucoup de chercheurs ont connu comme moi ce moment excitant de ‘‘bifurcation’’ dirait Borges.»
Dans son nouveau domaine de l’Orientalisme et islamologie, elle a publié en 2012 un article intitulé «De l’autorité en islam» dans la revue française Le Débat (2012/4, n° 171, Gallimard); en 2011 «Islam d’Etat : Etat islamique ou islam étatique?» dans le magazine ‘‘Réalités’’ (Tunis, novembre 2011) =; en 2009 «Malaise dans la civilisation islamique», Publications du Collège international de Tunis (novembre 2009) et enfin en 2008, Réédition critique de la Chrestomathie arabe d’Antoine-Isaac Silvestre de Sacy, Presses Universitaires de France.
Et nous voilà en 2016, avec la publication, cette fois, d’un ouvrage intitulé ‘‘Les derniers jours de Muhammad’’ paru chez Albin Michel, en mars dernier. Ce livre est, sans conteste, l’événement éditorial de l’année 2016. En dépit de son prix élevé (entre 44 DT à Sousse, sa ville d’origine, et 48,750 DT à Tunis, sa ville d’adoption), il est épuisé en quelques jours.

* ‘‘Les derniers jours de Muhammad’’, Héla Ouardi, éd. Albin Michel, Paris, mars 2016.

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