De nombreuses incertitudes planent encore sur le sort que réservera la plénière de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) à l’équipe composée par Habib Jemli, le chef de gouvernement désigné d’Ennahdha. Des retouches, des changements, s’avèrent nécessaires avant le vote de confiance de vendredi. L’avis et, certainement aussi, l’appui, de Kaïs Saïed sont indispensables, à la veille de cet examen de passage décisif.
Par Marwan Chahla
A trois jours de la tenue de la plénière de l’ARP qui sera appelée à accorder –ou non- sa confiance au gouvernement formé par Habib Jemli, le chef de gouvernement désigné par Ennahdha, le chef de l’Etat Kaïs Saïed s’est entretenu avec Rached Ghannouchi, le président de l’ARP et président du parti islamiste.
Dans la soirée d’hier, lundi 6 janvier 2020, le site de la présidence de la République a posté un enregistrement de la déclaration de Rached Ghannouchi, à sa sortie de l’entretien qu’il a eu avec le locataire du palais de Carthage: un bref résumé de moins de trois minutes qui laisse comprendre que le président de la République a perdu patience face à la très longue perte de temps qu’a subie la direction des affaires du pays. Près de trois mois depuis les élections générales (législatives et présidentielle) et près de deux mois depuis le choix d’Ennahdha de confier à Habib Jemli la tâche urgente de former une équipe gouvernementale qui doit se mettre au plus vite au travail et relever les défis colossaux auxquels est confrontée la Tunisie.
Un «gouvernement de compétences» qui ne convainc pas
Tant de temps, donc, à arrondir les angles, à inventer tous les arrangements possibles et imaginables, et à finir par la proposition d’«un gouvernement de compétences» -qui, de toute évidence, ne convainc pas suffisamment.
Certes, le gourou de Montplaisir trouvera la formule «magique» qui garantira au protégé d’Ennahdha les 109 voix nécessaires à l’obtention de la confiance parlementaire: les Nahdhaouis sauront faire une petite offre par-ci et une petite promesse par-là pour débloquer la situation à l’ARP, lors de cette première épreuve de ce nouveau quinquennat 2019-2024.
Cependant, même si l’affaire paraissait réglée, il restait peut-être aux stratèges islamistes quelques rectifications à apporter qui ont valu à Rached Ghannouchi, très certainement en tant chef du parti islamiste, ce déplacement à Carthage.
Une si improbable «ceinture politique»
Il s’agissait pour Ennahdha, conscient du fait que certains des noms proposés par Habib Jemli «posent problème», de s’assurer auprès du constitutionnaliste chef de l’Etat que la liste qui lui a été soumise et qu’il a transmise à l’ARP pour vote est rectifiable. D’une part, Rached Ghannouchi cherche, ici, l’avis de l’expert en droit constitutionnel, mais également -et peut-être surtout- tente dans une certaine mesure d’«impliquer» Kaïs Saïed dans cette formation d’un gouvernement Jemli, aujourd’hui décrié de partout et isolé…
C’est toujours autour de cette impossible «ceinture politique» que les Nahdhaouis s’agitent et qu’ils n’arrivent pas à obtenir…
Trois ou quatre groupes parlementaires ont clairement fait savoir qu’ils refusent de donner leur aval à Habib Jemli. Ennahdha joue son va-tout de dernière minute en essayant de convaincre Kaïs Saïed et, par là, les «forces de la Révolution» qui l’ont porté au pouvoir.
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