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Energies vertes : La Tunisie déterminée à rattraper le temps perdu

Longtemps accaparé par les «fossilistes», le secteur de l’énergie en Tunisie semble s’ouvrir de plus en plus aux énergies renouvelables. En témoignent la multiplication des projets d’investissement dans ce domaine et, surtout, la détermination du gouvernement à rattraper le temps perdu.

Par Khémaies Krimi

Après une visite en Allemagne, où il vient de conduire une importante délégation tunisienne au 4e dialogue de Berlin sur la transition énergétique (17-18 avril 2018), Khaled Kaddour, ministre de l’Energie, des Mines et des Energies renouvelables, fortement impressionné, semble-t-il, par les progrès technologiques et par la visite de mégaprojets d’énergies vertes en Allemagne, n’a pas tardé à annoncer d’importants investissements en Tunisie dans ce domaine.

Réalisation à court terme de 1000 mégawatts à partir des énergies vertes

Ainsi, le 27 avril , animant, à Monastir, un atelier de travail sur les préparatifs de la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (Steg) pour la période estivale 2018, a-t-il annoncé le lancement imminent (au cours de ce mois de mai) d’un appel d’offres international pour la réalisation, dans le cadre du partenariat public privé (PPP), d’un projet de production de 800 mégawatts d’électricité à partir des énergies renouvelables (solaire et éolienne), moyennant un investissement de 2400 millions de dinars tunisiens (MDT). Cette enveloppe permettra de financer des fermes solaires et éoliennes dans les régions de Kairouan, Tozeur, Kébili, Tatatouine et Sidi Bouzid.

Cet appel d’offres intervient après celui lancé en novembre 2017 pour la réalisation d’un projet moins ambitieux dans le cadre du «régime d’autorisations» qualifié par les experts d’«étape d’apprentissage». Il s’agit de réaliser 10 projets d’une capacité globale de 200 mégawatts d’électricité à partir des énergies vertes.

Ce régime d’autorisations a été fortement critiqué par les investisseurs étrangers et les bailleurs de fonds qui les soutiennent (notamment la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, Berd). Ces derniers estiment que les contrats concoctés par la Steg défavorisent les développeurs. Ils ont proposé, par l’intermédiaire de la Berd, des amendements qui auraient été acceptés.

Concrètement, le ministère de l’Energie, des Mines et des Energies renouvelables va lancer des appels d’offres pour la production de 1000 mégawatts sur un total de 1500 mégawatts prévus pour 2020, dans le cadre du plan dé développement (2016-2020).

Sur le long terme et conformément à la stratégie arrêtée à cette fin, d’ici 2030, la Tunisie va réduire de 30% sa production fossile et assurer à hauteur de 30% ses besoins en électricité générée par les énergies vertes.

Khaled Kaddour.

La subvention des énergies ira dorénavant aux énergies renouvelables

La deuxième bonne nouvelle annoncée par le ministre Kaddour, c’est l’étude par le gouvernement de la possibilité de transférer aux énergies vertes la subvention accordée, annuellement, dans le cadre du budget de l’Etat, aux hydrocarbures.

Cette subvention est estimée cette année à 3.000 MDT, soit le double de ce qui était programmé, en raison de la hausse du prix du baril qui a grimpé à 70 dollars, contre 54 prévus par la Loi de Finances 2018, sachant que toute augmentation du prix du baril d’un dollar coûte au trésor tunisien 121 MDT.

Au-delà ces bonnes nouvelles, le plus important réside manifestement dans la foi du gouvernement et du ministre Kaddour dans les énergies vertes, perçues désormais comme de sérieuses alternatives pour assurer la sécurité et l’indépendance énergétique du pays. Cette foi tranche avec le pessimisme et la mauvaise foi de ses prédécesseurs «fossilistes» (ministres, Pdg de la Steg et de l’Entreprise tunisienne des activités pétrolières, Etap) qui ont toujours douté de ces énergies, mettant en exergue leurs talons d’Achille: l’intermittence et le coût élevé de leur stockage.

Tout le monde se rappelle cette déclaration faite, en juin 2016, par Mongi Marzouk, le ministre nahdhaoui de l’Energie à l’époque, quant il avait dit que la «Tunisie n’a pas le même soleil et le même vent que le Maroc», insinuant que la Tunisie ne pouvait pas développer avec la rentabilité requise les énergies solaire et éolienne.

Des énergies vertes, on commence à y croire en Tunisie

Aujourd’hui, les choses sont heureusement en train de changer à travers cette nouvelle dynamique des investissements dans les énergies vertes. Mieux, la conjoncture internationale est très favorable aux financements de ces investissements.

Beaucoup d’atouts militent en faveur de la promotion des énergies alternatives en Tunisie. Outre la disponibilité des fonds de la COP 21 (Convention des Nations unies sur les changements climatiques), quelque 100 milliards de dollars à partir de 2020, des crédits fournisseurs japonais et allemands, des bailleurs de fonds comme la Berd, la Banque Mondiale, la Banque africaine de développement (BAD), la Banque européenne d’investissement (BEI), l’Agence française de développement (AFD), la Banque de développement allemande (KFW), ont fait état au gouvernement tunisien de leur disposition à financer sans limites les projets de développement des énergies vertes.

Au niveau de l’assistance technique, la Tunisie peut mettre à profit la visite que va effectuer, en septembre prochain en Tunisie, le ministre de l’Economie et de l’Energie allemand, Peter Altmaier, pour établir un fructueux partenariat entre les deux pays dans le domaine des énergies vertes, d’autant plus que l’Allemagne s’est forgée la réputation d’être un pays champion en la matière.

Anticiper en créant des établissements de formation spécialisés

En prévision de la création partout dans le pays de fermes éoliennes et solaires, le gouvernement tunisien se doit de faire comme le Maroc, en créant, en amont, des établissements de formation dans le domaine des énergies vertes.

Actuellement, seuls quelques sujets de mémoires de diplômes sont dédiés à ces énergies dans deux ou trois facultés d’ingénieurs en Tunisie (à Tunis et Monastir), outre, un centre de formation professionnelle à Tataouine.

À titre de comparaison, le Maroc, devenu en quelques années un champion continental en énergies renouvelables, notamment avec son complexe solaire de Ouarzazate, dispose de trois instituts de formation aux métiers des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (IFMEREE) à Oujda, Tanger et Ouarzazate.

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