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Présidentielle : Mehdi Jomaa déplore la situation économique de la Tunisie et promet du changement

A moins de deux semaines du jour de l’élection présidentielle anticipée, prévue pour le 15 septembre 2019, chacun des 26 candidats en lice est en pleine campagne électorale. Une campagne qui a commencé hier, le 2 septembre, et qui se poursuivra jusqu’au 13 septembre. C’est notamment le cas de Mehdi Jomaa, fondateur du parti Al Badil Ettounsi.

Par Cherif Ben Younes

A cet effet, le comité d’organisation de la campagne électorale de l’ancien chef du gouvernement provisoire (janvier 2014 – février 2015) a organisé aujourd’hui, mardi 3 septembre, une conférence de presse, à l’hôtel Novotel de Tunis, pour présenter le programme présidentiel de M. Jomaa.

«Le président et le chef du gouvernement doivent partager une même vision politique»

Se présentant en tant que «porteur de projet réformateur pour le pays», en collaboration avec une équipe «élargie et qui ne cesse de se développer», Mehdi Jomaa a d’abord indiqué que son programme présidentiel fait partie intégrante d’une vision globale, qui ne dépend pas que du poste du président de la république et qui nécessite une collaboration cohésive de toutes les institutions de l’Etat, en vue d’aller dans le même sens.

D’ailleurs, cette idée a été fondamentale dans le discours de M. Jomaa, qui a, à plusieurs reprises, exprimé son opposition à la dissociation qu’on fait, notamment dans les médias, entre le rôle du président de la république et celui du chef du gouvernement. Indiquant que pour lui, la seule chance dont dispose la Tunisie pour se remettre sur pied, socialement, politiquement et économiquement, passe forcément par une vision commune et une convergence complète entre les deux parties.

Pourtant, cette séparation entre les prérogatives du président et celles du chef du gouvernement n’a pas été inventée par la presse. Elle est même indiquée et développée dans la constitution du pays. Alors M. Jomaa tentera-t-il d’apporter les changements nécessaires à cette organisation politique s’il sera élu, et surtout, si son parti, Al Badil, pourra disposer de suffisamment de sièges parlementaires lors des élections législatives ?

Le candidat libéral n’exclut pas cette possibilité, mais il espère surtout avoir, dès maintenant, avec son parti, le contrôle sur les deux centres du pouvoir exécutif…

«Nous avons un même pays, un même Etat, les mêmes défis, et nous travaillerons sur un projet intégré et global. Un projet qui concerne le parlement et les deux têtes de l’exécutif. Et c’est pour cela que nous nous présentons non seulement à la présidentielle, mais également aux législatives, partout, avec 217 candidats pour autant de postes de députés», a-t-il assuré.

«Ça c’est notre approche. Après, s’il faut faire un ajustement du pouvoir pour mieux gérer les prérogatives, on le fera», a-t-il poursuivi, rappelant qu’en 2014, il était à la fois chef du gouvernement mais aussi de la diplomatie, un rôle qui fait aujourd’hui partie des responsabilités du président de la république.

«La situation économique du pays est le principal motif de ma candidature»

Outre ce point, M. Jomaa a particulièrement mis l’accent sur la situation économique difficile que connaît le pays, et sur son impact désastreux sur le citoyen Tunisien, qui «s’est appauvri, comme le pays, de 20%, lors des 5 dernières années», a-t-il estimé, et ce à cause notamment de la dégradation des indicateurs économiques, tels que la diminution du produit intérieur brut (PIB), de l’épargne nationale, des exportations et de la valeur du dinar, ainsi que l’augmentation du taux de chômage.

La triste conséquence de cette situation est que les ambitions des Tunisiens ont été revues à la baisse. «Avant, nos parents rêvaient de nous voir devenir des hommes influents dans la société. Aujourd’hui, ils rêvent de trouver le moyen de se procurer des médicaments», a regretté l’ancien ministre de l’industrie (mars 2013 – janvier 2014).

Mehdi Jomaa a, par ailleurs, pointé du doigt les politiciens au pouvoir de ces 5 dernières années (depuis les élections de 2014, ndlr), les considérant comme les principaux responsables de cet échec économique et déplorant leurs discours «pompeux et irresponsables», ainsi que leur volonté de demeurer au pouvoir, en se présentant aux élections de 2019.

La situation économique actuelle est donc la raison principale pour laquelle il se présente à la présidentielle, a-t-il avancé. Avant d’ajouter que l’autre motif important émane de l’expérience qu’il a acquise lorsqu’il a exercé les fonctions de chef du gouvernement en 2014, estimant que celle-ci est nécessaire pour aspirer à devenir président, taclant, par la même occasion, ses concurrents qui n’ont pas eu cette chance auparavant, à l’exception de Hamadi Jebali et Yussef Chahed, qui ont passé plus de temps que lui au Palais de la Kasbah, siège de la primature.

La sécurité, la technologie, la dignité citoyenne et le libéralisme économique sont au cœur du programme présidentiel de Jomaa

Le programme présidentiel de Mehdi Jomaa s’articule, quant à lui, autour de 3 axes. Le premier est la souveraineté nationale. Cela concerne toute forme de sécurité de la nation, qu’elle soit militaire, alimentaire, écologique ou économique, et implique la préservation des frontières tunisiennes, de nos richesses agricoles, de nos écosystèmes, notre faune et notre flore, du pouvoir d’achat et de la monnaie nationale. L’objectif étant d’avoir un Etat juste, fort et implacable quant au respect de la loi par et pour tous.

Le deuxième axe concerne les enjeux nationaux et internationaux. «Le monde est en pleines mutations, technologiques avec les ramifications de la révolution numérique, et géostratégiques avec la modification et la volatilité des équilibres. La Tunisie se doit de préserver ses intérêts nationaux tout en s’inscrivant dans cette nouvelle marche du monde», lit-on dans le dossier de presse relatif à la conférence de presse.

Afin de saisir les opportunités qu’offre cette nouvelle révolution technologique, Mehdi Jomaa estime que nous avons l’obligation de nous y adapter rapidement et de nous orienter vers une économie «de la connaissance et du savoir». Cela donnerait naturellement lieu à de grands chantiers de réformes structurelles et nécessiterait une diplomatie internationale au service de ces intérêts stratégiques nationaux. Et c’est justement ce que promet l’ingénieur de formation.

Le troisième axe est l’unité nationale. Celle-ci serait d’abord fondée sur le respect des libertés, notamment de créer, inventer et entreprendre. «Des libertés qui se trouvent aujourd’hui entravées par la culture de notre Etat contrôleur», a regretté M. Jomaa, qui propose de mettre en place un «Etat stratège».

Cette unité nationale est également tributaire de la dignité des citoyens, selon le candidat à la présidentielle. Une dignité qu’il considère actuellement «bafouée», d’où la nécessité pour l’Etat de «créer un environnement d’équité sociale et de mettre en place des politiques sociales actives et viables». À cet effet, parmi les réformes prioritaires que M. Jomaa promet de mettre en avant, il y a celle du régime foncier, et ce conformément à la constitution qui garantit l’accès à la propriété.

Le nouveau pacte social préconisé par Mehdi Jomaa comporte aussi des réformes de la justice et de l’orde : «Lorsque la dignité sera recouvrée et que la justice sera rendue avec célérité et équité, l’ordre public sera bien plus facile à assurer».

Mehdi Jomaa s’est, par ailleurs, engagé à mettre en place 10 mesures précises en cas de victoire à la présidentielle : exploiter la technologie moderne pour renforcer la sécurité et diminuer le taux de criminalité, abolir les lois bloquant l’investissement numérique, entreprendre les négociations diplomatiques afin d’assouplir les lois relatives à l’attribution de visas pour l’Europe, garantir les droits des retraités dans les secteurs public et privé, interdire les écoles privées dans l’enseignement primaire et de base, annuler le fonds d’indemnisation, rétablir la situation immobilière des habitants des quartiers populaires, créer 100.000 emplois, assouplir le contrôle fiscal tout en privilégiant une administration moderne et annuler les licences de travail préalables.

Né le 12 avril 1962 à Mahdia, Mehdi Jomaa est marié et père de 5 enfants. Il a obtenu son diplôme d’ingénieur principal de l’École nationale d’ingénieurs de Tunis (Enit) en 1988, suivi d’un DEA en mécanique, calcul et modélisation des structures, en 1989. Il a, par ailleurs, suivi plusieurs formations en management dont un business skills developement en 2007 et en business plan, stratégie et marketing en 2009.

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