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Tarak Chérif : une voix juste dans la cohue… d’une économie en quasi-faillite

Les syndicalistes ignares en économie et les politiques carriéristes – godillots de l’UGTT – ont ravagé l’économie tunisienne. Heureusement qu’il y a encore des voix justes et courageuses, car apolitiques et libres, comme celle de Tarak Cherif, pour venir rappeler que l’intérêt général doit toujours prévaloir sur les intérêts particuliers, partisans ou corporatistes.

Par Imed Bahri

Pour Tarak Chérif, président de la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect), cité par l’agence Tap, «l’Etat ne peut continuer à fonctionner, en consacrant près de la moitié du budget à la masse salariale, et ce, au détriment du développement et de l’investissement».

M. Chérif a aussi critiqué la répartition du budget de l’Etat 2020, estimé à 47 milliards de dinars tunisiens (Mrd DT), faisant savoir que 40% de ce budget ont été alloués aux salaires et environ 9% à la compensation, alors que 8% seulement sont réservés à l’investissement.

Les dépenses salariales sont estimées, en 2020, à 19 Mrd DT, soit une hausse de 10,9%, en comparaison de 2019. Ces dépenses représentent 15,1% du PIB, l’un des taux les plus élevés au monde, ce qui a souvent provoqué les critiques du FMI et de la Banque mondiale et de tous les bailleurs de fonds de la Tunisie, puisque le plus gros des prêts alloués allant aux dépenses de fonctionnement, y compris les salaires, et non à l’investissement, le moteur dont l’économie a besoin pour se relancer.

Il faut dégraisser le mammouth de la fonction publique

M. Cherif, qui a été reçu avant-hier, dimanche 24 novembre 2019, par le chef du gouvernement désigné, Habib Jemli, à Dar Dhiafa, à Carthage (l’a-t-il vraiment écouté ?), a, par ailleurs, estimé, dans le même entretien avec la Tap, que «les mêmes causes produisent les mêmes effets la loi de finances initiale va nécessiter une loi de finances complémentaire, et ainsi de suite. Ce qui signifie davantage de crédits, d’endettement et la sortie sur le marché financier international». Et de poursuivre, «l’hémorragie de l’endettement, outre la masse salariale, réduit la marge de manœuvre du gouvernement, en matière de promotion du développement et de création d’emplois. De fait, les crédits consacrés dans le projet de la loi de finances 2020, aux investissements publics sont estimés à seulement 6 milliards de dinars».

Pour dégraisser le mammouth de la fonction publique qui emploie 800.000 agents, soit au moins 200.000 de plus que le nécessaire, et qui absorbe la plus importante partie du budget de l’Etat, M. Cherif a souvent préconisé la mise en place, sur 10 ans, d’une stratégie d’encouragement au départ volontaire de l’administration, en contrepartie d’avantages financiers et sociaux, des fonds d’investissement pouvant être créés pour aider les personnes qui partent de l’administration à créer des projets privés et à s’installer à leur propre compte.

«Cette mesure va contribuer à l’allègement des dépenses de l’Etat et, partant, lui permettre d’orienter les montants consacrés aux salaires, vers d’autres secteurs plus importants et rentables, dont notamment l’investissement, le développement, l’éducation, le transport et la santé, ainsi que la concrétisation des décisions relative à la numérisation de l’administration», estime encore M. Chérif.

La privatisation ne signifie pas la cession totale des actifs de l’Etat

Autre sujet tenant à cœur au président de la Conect : la réduction de la tutelle de l’Etat sur les entreprises publiques. En d’autres termes : le désengagement de l’Etat des entreprises publiques opérant dans des secteurs non-stratégiques (énergie, eau…) et concurrentiels et dont la plupart sont au bord de la faillite et vivent grâce à l’argent injecté régulièrement par le contribuable.

La situation actuelle des finances publiques ne permet pas à l’Etat de supporter les pertes annuelles continues des quelque 102 entreprises publiques. «L’Etat doit envisager un retrait ou une limitation de ses participations dans ces entreprises», préconise M. Cherif, sans craindre de heurter les dirigeants de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), férocement opposés à toute tentative de cession des parts de l’Etat dans les entreprises publiques, même celles au bord de la faillite, car le secteur public reste le fief historique du syndicalisme tunisien.

Tout en estimant que la réduction de la tutelle de l’Etat permettrait de diversifier l’offre, favoriser la concurrence et améliorer le niveau des services dans les différents secteurs, et en soutenant que «la privatisation vise à préparer les entreprises à opérer dans un climat concurrentiel, à même de dynamiser les activités économiques productives et assurer la complémentarité entre les secteurs public et privé», M. Cherif, conscient des résistances, prend soin de tempérer ses élans et de préciser : «La privatisation ne signifie pas la cession totale des actifs de l’Etat. L’Etat peut conserver la propriété et confier aux privés la gouvernance et la gestion de ces actifs, ce qui bénéficiera à toutes les parties».

Bref il ne s’agit pas de céder aux privés la propriété des entreprises publiques en difficulté, mais de réformer celles-ci, de moderniser leur gouvernance, de rétablir leurs équilibres financiers, de les rentabiliser davantage et, in fine, de les sauver d’une faillite annoncée et imminente.

Ces politiques à courte vue qui se prosternent aux pieds de l’UGTT

L’Etat a besoin d’investissement, car, on le sait, sans investissement, pas de croissance et sans croissance pas de création d’emplois et sans création d’emplois, chômage de masse et misère sociale. Mais allez-le dire à nos dirigeants syndicalistes qui ne comprennent rien à l’économie mais qui font subir leur diktat des augmentations salariales chaque année en faisant croire aux gens que cela améliorera leur pouvoir d’achat. Allez le dire aussi aux politiques qui vont se prosterner devant Noureddine Taboubi, le secrétaire général de l’UGTT et ses compères, et qui les supplient chaque fois d’intervenir dans la politique pour régler leurs comptes avec leurs adversaires du moment et qui n’ont pas le courage de dénoncer les errements de la centrale syndicale et son attitude hégémonique par pure carriérisme.

Nos syndicalistes ignares en économie et nos politiques – godillots de l’UGTT – ont ravagé l’économie du pays. Et heureusement qu’il y a encore des voix justes et courageuses, car apolitiques et libres, comme celle de Tarak Cherif, pour venir rappeler que l’intérêt général doit toujours prévaloir sur les intérêts particuliers, partisans ou corporatistes.

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