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La Tunisie cherche des aides internationales désespérément

Les responsables tunisiens négocient dans les bureaux du FMI à Washington.

Financièrement au bord du gouffre, la Tunisie doit rembourser plus de 4 milliards d’euros cette année pour faire face à ses échéances. Alors que les caisses de l’Etat sont vides. Face à cette situation, la recherche des aides financières multiples, en pleine période Covid, s’avère une urgence pour éteindre les foyers d’incendie.

Par Amine Ben Gamra *

La Tunisie négocie avec le Fonds monétaire international (FMI) un prêt de quatre milliards de dollars (11 milliards de dinars tunisiens) sur trois ans pour la troisième fois depuis la révolution de 2011. Mais même si le Fonds consent à lui accorder ce prêt, du reste accord conditionné par un ferme engagement à mettre en route des réformes économiques plus douloureuses les unes que les autres, le montant promis ne suffira pas à couvrir les dépenses prévues pour le remboursement des anciennes dettes arrivées à maturité en 2021. 

Officiellement, l’Etat doit mobiliser de 22 à 23 milliards de dinars d’ici la fin de l’année pour pouvoir boucler son budget pour l’année en cours, alors que le spectre de la cessation de paiement, agité par les experts, n’a jamais été aussi présent dans l’esprit des hauts responsables, alors que l’endettement extérieur atteint le taux critique de 100% du PIB. C’est une situation inédite dans l’histoire de la Tunisie depuis la proclamation de la république en 1957.

Un pays de plus en plus vulnérable aux chocs extérieurs

Objectivement, la Tunisie est, sans conteste, vulnérable aux chocs exogènes, principalement aux risques de change, en raison de la forte concentration de la dette extérieure dans la dette totale.

Il est grand temps de renégocier avec les bailleurs de fonds internationaux pour renforcer les opportunités de croissance des PME tunisiennes à travers un nouveau programme d’appui à l’exportation pour améliorer leurs compétitivité, productivité et capacité d’exportation en les aidant à croître à l’échelle internationale et à accéder à de nouveaux marchés. Cela peut booster l’économie du pays, lui garantir des ressources extérieures, réduire ses vulnérabilités et redonner confiance aux entrepreneurs étrangers.

Paradoxalement et alors même que l’État a besoin plus que jamais d’afficher un minimum d’unité nationale, les querelles politiques sans fin divisent la nation et créent une scission profonde entre les partis, dont les chefs veulent tous être «calife à la place du calife», tout en oubliant l’essentiel, à savoir que le pays qu’ils ambitionnent de gouverner est au bord de la banqueroute. Or, on le sait, face à la crise, l’intérêt général doit primer et l’unité, fut-elle de façade, doit être clairement affichée. 

Dans tout ça, la population, prise en otage, traverse une grave période de difficultés dues à la mauvaise gouvernance dont ont fait preuve tous les gouvernements post-2011. La vie coûte toujours plus cher et les salaires, s’ils bougent sans cesse, grâce aux augmentations régulières, sont rognés par une forte inflation et une baisse du pouvoir d’achat.

La peur de prendre des décisions est omniprésente

À toutes les strates de la société, la peur de prendre des décisions et d’aller de l’avant est omniprésente, alors que l’envie de travailler davantage pour aider à sortir la nation du pétrin n’est plus au rendez-vous. Pire encore, les manifestations, sit-in et arrêts du travail se multiplient pour un oui ou pour un non, bloquant encore davantage la machine de production, notamment dans les secteurs stratégiques : phosphates, énergie…   

Et pour ne rien arranger, la crise politique dans laquelle est plongé le pays depuis de nombreuses années mine tous les jours un peu plus l’espoir d’y voir naître une vraie démocratie, principale promesse de la révolution de 2011 dont la réalisation est devenue hypothétique. 

* Expert-comptable, commissaire aux comptes, membre de l’Ordre des experts comptables de Tunisie.

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