La mairie de Paris a inauguré, mercredi 4 décembre 2024, une plaque commémorative rue de Laghouat, dans le 18e arrondissement, pour rendre hommage aux milliers de victimes du massacre de Laghouat, en Algérie, perpétré en 1852 par l’armée coloniale française. L’événement marque un tournant dans la reconnaissance de ce crime de guerre. Mais pas dans les relations franco-algériennes qui sont aujourd’hui à leur plus bas niveau.
Djamal Guettala
La rue Laghouat, nommée au XIXe siècle pour célébrer la prise de cette ville algérienne par les troupes coloniales, change aujourd’hui de symbolique. Désormais, elle commémore aussi la mémoire d’un massacre qui a coûté la vie à plus de 2 500 habitants, soit les deux tiers de la population de cette ville du sud algérien.
La plaque a été dévoilée en présence d’une élue de la ville de Paris, et de plusieurs figures engagées dans le devoir de mémoire, notamment Pierre Mansat, porte-parole du comité Laghouat France, et Raphaëlle Primet, élue du Parti communiste français (PCF).
Une tragédie coloniale méconnue
En novembre 1852, la ville de Laghouat, un carrefour stratégique de commerce transsaharien où cohabitaient musulmans et juifs, est assiégée par une armée française de 6 000 hommes sous les ordres de trois généraux, dont le tristement célèbre général Aimable Pélissier. L’offensive, menée pour écraser un soulèvement, s’est soldée par un véritable massacre. Près de 2 500 habitants, hommes, femmes et enfants, furent tués.
Des récits historiques rapportent l’utilisation de tactiques d’une violence extrême, notamment l’asphyxie des civils réfugiés dans des grottes. Ces méthodes ont depuis été qualifiées de crime de guerre par des historiens et des militants de la mémoire.
L’initiative, soutenue par le comité Laghouat France et le groupe PCF de Paris, s’inscrit dans un travail plus large de restitution mémorielle. Outre l’inauguration de cette plaque, le comité demande également la restitution de la clé de la cité et des étendards des résistants, actuellement conservés au musée de l’Armée à Paris.
Pour Lazhari Labter, cette cérémonie est une victoire symbolique : «Nous honorons aujourd’hui les martyrs de Laghouat et rétablissons une vérité historique trop longtemps occultée. Cette plaque témoigne de notre engagement à ne pas oublier.»
Raphaëlle Primet, élue PCF, a, quant à elle, souligné l’importance de ce geste : «La reconnaissance de ces crimes est une étape nécessaire pour construire une mémoire commune et apaiser les relations franco-algériennes.»
Un devoir de mémoire en marche
La mairie de Paris, avec ce geste fort, se positionne en faveur d’une réflexion critique sur l’histoire coloniale française. Anne Hidalgo a insisté sur le rôle des institutions dans ce travail : «Paris, ville ouverte et solidaire, se doit d’affronter les pages sombres de son histoire. Cette plaque est une étape essentielle pour construire une mémoire juste et partagée.»
La cérémonie s’est achevée par une minute de silence en hommage aux victimes et un appel à poursuivre ce travail de reconnaissance historique. Désormais, la rue Laghouat ne sera plus seulement un nom sur une carte, mais un témoignage vivant du devoir de mémoire et de justice.
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