Depuis septembre 2024, l’attente d’un film maghrébin en France s’est intensifiée, et ‘‘La Mer au loin’’, sorti le 5 février 2025, a répondu à cette attente. On a eu l’opportunité de le découvrir, le 8 février 2025, à Marseille, grâce au cinéma Pathé, une expérience marquante avant le Festival Aflam, qui mettra à l’honneur la richesse du cinéma arabe contemporain et d’hier. Ce film d’une grande puissance émotionnelle, à la fois social et poétique, explore les thèmes de l’exil, de l’identité et des liens humains. Vidéo.
Guettala Djamal
‘‘La mer au loin’’ est le deuxième long-métrage du réalisateur Saïd Hamich Benlarbi, scénariste et producteur franco-marocain diplômé de La Femis. Après son premier film ‘‘Retour à Bollène’’, il confirme son talent avec cette œuvre émouvante et audacieuse.
Cette chronique romanesque nous immerge dans un univers où l’exil et les relations humaines s’entrelacent, tout en évitant les clichés habituels du cinéma social. Le film se distingue par une approche poétique de l’histoire de Nour, un migrant clandestin, et de ses rencontres qui bouleverseront sa vie.
Une histoire d’amour et d’identité
Nour, incarné par Ayoub Gretaa (Maroc), vit une existence marginale à Marseille, faite de petits trafics et de fêtes avec ses amis. Mais sa rencontre avec Serge, joué par Grégoire Colin, un policier complexe et imprévisible, ainsi que sa femme Noémie, interprétée par Anna Mouglalis, va transformer sa trajectoire. Ce film est bien plus qu’une simple histoire de migration. Il explore avec subtilité les dilemmes d’identité, l’espoir d’une vie meilleure et les sacrifices liés à l’exil.
Ayoub Gretaa livre une performance magistrale dans le rôle de Nour, un personnage tiraillé entre ses rêves et ses réalités. Son jeu nuancé et intense nous fait entrer dans l’univers de ce migrant aux espoirs brisés, mais en quête de sens. Anna Mouglalis, quant à elle, offre une Noémie d’une rare subtilité, oscillant constamment entre bienveillance et une dureté intérieure qu’elle parvient à transmettre avec aisance, évitant le pathos.
Le film est également enrichi par les performances de Rym Foglia (Algérie) et Omar Boulakirba (Algérie), qui apportent chacun une touche particulière au récit. Rym Foglia, dans le rôle de Fadhila, incarne un personnage complexe, à la fois doux et fort, qui accompagne Nour dans ses dilemmes intérieurs. Omar Boulakirba, quant à lui, interprète Houcine avec une présence émouvante, jouant un personnage aux multiples facettes, tiraillé entre son propre destin et celui des autres.
Poésie émouvante et propos exigeant
Ce film se distingue non seulement par sa richesse émotionnelle, mais aussi par son approche poétique de l’exil. Le réalisateur parvient à capturer la complexité des relations humaines avec une grande finesse. En évitant le misérabilisme, il nous livre une réflexion profonde et nuancée sur le sentiment de perte et de déracinement.
‘‘La Mer au loin’’ n’est pas simplement un film sur l’immigration, mais une œuvre sur l’identité, la nostalgie et les liens invisibles qui nous unissent.
La musique, notamment le raï, joue également un rôle central dans l’œuvre, apportant une respiration salvatrice et une forme de joie éclatante au milieu des difficultés. Elle incarne l’amour et le mal du pays, et participe à la puissance émotionnelle du film.
‘‘La Mer au loin’’ est sans conteste l’un des plus beaux mélodrames des dernières années. Il parvient à toucher profondément sans jamais tomber dans l’excès. Il propose une vision de l’immigration à la fois complexe et vivante, loin des clichés habituels. Ce film offre une exploration touchante de l’humain dans sa quête d’identité et de lien. Loin des stéréotypes, il donne une voix à des personnages réels, avec leurs rêves, leurs luttes et leurs contradictions.
Le film brille par la profondeur de ses personnages et la qualité de ses performances. Ayoub Gretaa, Omar Boulakirba, Rym Foglia, Grégoire Colin et Anna Mouglalis contribuent tous à cette œuvre captivante, qui nous rappelle que, même dans les moments de chaos, l’humanité peut émerger.
En attendant le Festival Aflam 2025, ‘‘La Mer au loin’’ reste un film à ne pas manquer, tant pour sa beauté que pour son message poignant sur l’exil et l’identité.
Interview du réalisateur.
https://www.youtube.com/watch?v=t2lpk3-I-jY
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