Entre mémoire et fiction | Amira Ghenim fait parler Habib Bourguiba

À l’occasion du 25e anniversaire de la mort de Habib Bourguiba, le 6 avril 2025, la romancière tunisienne Amira Ghenim a publié une œuvre audacieuse et poignante intitulée «العظماء يموتون في أفريل» (Les Grands meurent en avril), édité par Dar Meskeliani, qui avait édité son précédent roman à succès de «Trab Skhoune» (Terre ardente).

Dans ce roman, Amira Ghenim imagine un Bourguiba reclus, isolé dans sa résidence surveillée de Monastir, qui brise enfin son mutisme de treize années.

Loin du discours officiel, l’ancien président, destitué en 1987, livre un monologue intime dans lequel il relit sa vie, ses triomphes comme ses échecs, ses contradictions et ses blessures profondes. La romancière propose ainsi une seconde mort symbolique, celle d’un homme face à lui-même, à l’histoire et à l’oubli.

À travers ce récit fictif nourri de réalités historiques, Amira Ghenim interroge la nature du pouvoir, la fragilité de la mémoire et l’humanité derrière le héros national. Bourguiba n’est plus ici le père de l’indépendance, mais un vieillard tiraillé entre grandeur passée et fin tragique. Le texte navigue entre réalité et imagination, dessinant un portrait nuancé, complexe, parfois dérangeant, mais profondément humain.

Avec «Les Grands meurent en avril», la romancière signe une œuvre littéraire ambitieuse, où l’écriture devient un outil pour revisiter les silences de l’Histoire et redonner chair à ceux que les archives ont figés. Un roman qui bouscule, questionne, et surtout, invite à écouter ce que les figures du passé n’ont jamais pu dire.

Djamal Guettala  

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