Algérie : Sid Ahmed Ghozali, un homme d’État au parcours singulier

L’Algérie vient de perdre l’un de ses grands serviteurs. Sid Ahmed Ghozali, ancien chef du gouvernement et figure marquante de la scène politique, s’est éteint hier, mardi 4 février 2025, à l’âge de 88 ans. C’est sa sœur, Rachida Ghozali, qui a annoncé la nouvelle sur sa page Facebook.

Djamal Guettala

«C’est avec une tristesse immense que je fais part du décès de mon très cher frère et deuxième papa, Sid Ahmed, allah yarhmah. Une partie de moi s’en est allée pour rejoindre le Créateur», a-t-elle écrit. L’information a ensuite été confirmée par l’agence de presse officielle APS.

Homme de convictions et acteur de premier plan dans des périodes décisives de l’histoire du pays, Sid Ahmed Ghozali laisse derrière lui un héritage complexe, à l’image des défis auxquels il a été confronté.

De l’ingénierie à la politique

Né en 1937 à Tighennif, dans la wilaya de Mascara, Sid Ahmed Ghozali se distingue très tôt par ses capacités intellectuelles, qui le conduisent à l’École des Ponts et Chaussées de Paris. Ingénieur de formation, il mettra ses compétences au service de l’Algérie post-indépendance en prenant la tête de Sonatrach de 1966 à 1977. À la direction de ce mastodonte, il joue un rôle clé dans la structuration du secteur énergétique, véritable poumon financier de l’Algérie.

Son ascension politique ne tarde pas. Il occupe plusieurs postes ministériels stratégiques : l’Énergie et les Industries pétrochimiques, l’Irrigation, les Finances, et les Affaires étrangères. Ces fonctions lui permettent d’affiner sa compréhension des rouages de l’État et de s’imposer comme un acteur incontournable du paysage politique algérien.

Chef de gouvernement dans la tourmente

En juin 1991, dans un contexte marqué par des tensions croissantes, Sid Ahmed Ghozali est nommé chef du gouvernement, succédant à Mouloud Hamrouche. Il occupe cette fonction durant une période critique, marquée par la montée de l’islamisme politique et la suspension du processus électoral après la victoire du Front islamique du salut (FIS) au premier tour des élections législatives. Sous la présidence de Chadli Bendjedid, puis de Mohamed Boudiaf, il tente de maintenir un équilibre fragile entre réforme politique et stabilité sécuritaire.

Le 29 juin 1992, l’assassinat de Mohamed Boudiaf plonge le pays dans une crise profonde. Quelques jours plus tard, le 8 juillet 1992, Ghozali démissionne de ses fonctions, laissant place à Belaid Abdeslam. Cette période sombre, prélude à la décennie noire, reste l’un des épisodes les plus délicats de sa carrière politique.

Un héritage à revisiter

Malgré les turbulences de son passage à la tête du gouvernement, Sid Ahmed Ghozali est resté fidèle à ses principes de démocratie, de pluralisme et de modernité. Son influence dans le domaine de l’énergie et ses prises de position sur des sujets clés lui ont valu le respect de nombreux acteurs politiques, même au-delà des frontières algériennes.

Dans un message de condoléances, le président Abdelmadjid Tebboune a salué la mémoire d’«un homme d’État de grande envergure», soulignant que «l’Algérie perd avec Sid Ahmed Ghozali un homme visionnaire, qui a consacré sa vie au service de son pays. Sa mémoire restera vivante dans les cœurs des Algériens.»

Avec la disparition de Sid Ahmed Ghozali, l’Algérie tourne une page de son histoire politique récente. Sa carrière, marquée par des responsabilités de haut niveau et des décisions souvent controversées, reflète les défis d’un pays en quête de stabilité et de développement. Il appartiendra désormais aux historiens et aux citoyens de revisiter son héritage, en reconnaissant la complexité d’un homme qui, jusqu’au bout, a incarné la volonté de servir son pays.

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