Dans ‘‘ Protectorat 1881 ’’, le jeune réalisateur Tarek Ibrahim revisite période ayant précédé la colonisation française en Tunisie, en se basant sur une documentation riche et fouillée.
Par Fawz Ben Ali
‘‘Protectorat 1881’’ est le fruit d’une collaboration inédite entre le producteur Mohiedine Temimi, le scénariste Hichem Jerbi et le réalisateur Tarek Ibrahim. Il s’agit d’un documentaire moyen-métrage de 50 minutes avec des fragments de fiction.
Pour ne pas oublier
Une projection réservée à la presse a eu lieu le mardi 10 mai 2016 à la salle Amilcar, à El- Manar, après deux rendez-vous inédits avec le public : l’ouverture du Festival international du film pour l’enfance et la jeunesse (Fifej), et la clôture du festival Doc à Tunis, où le film avait suscité un grand intérêt notamment chez les jeunes, première cible du documentaire, «car les nouvelles générations ont tendance à ignorer l’histoire de leur pays», explique le réalisateur.
Loin de l’ennui des livres d’histoire et des archives délaissées, Tarek Ibrahim nous embarque, à sa manière, dans un voyage dans le temps, vers un moment crucial de notre histoire moderne qu’on connait peu ou mal, à savoir les conditions dans lesquelles s’est installé le protectorat français.
Le film cite en exergue un extrait du célèbre essai ‘‘Discours sur le colonialisme’’ d’Aimé Césaire, et nous plonge dès lors dans la fin du XIXe en Tunisie, avant la signature du traité du Bardo, le 12 mai 1881, par le gouvernement français et le pouvoir beylical en la personne de Sadok Bey. La Tunisie tombe alors sous la coupe de la France, après avoir longtemps fait l’objet de rivalités européennes.
L’équipe du film.
L’idée du film est partie d’un constat, c’est que nous ignorons, en tout cas la majorité d’entre nous, que la résistance à la colonisation avait commencé bien avant le mouvement national tunisien des années 30. En effet, quand l’armée tunisienne était de marbre face à l’arrivée des Français, il y avait une vraie résistance populaire et spontanée, menée notamment par les tribus montagnardes du Kef.
Etablir un lien entre le passé et le présent
Le film a le mérite de porter une charge aussi bien historique que contemporaine, car il nous informe, nous éclaire, mais surtout nous questionne sur notre présent qui a l’air étrangement lié à une période si lointaine qu’est le protectorat de 1881.
«Sommes-nous en train de vivre un nouveau protectorat?»; «La Tunisie risque-t-elle de perdre de nouveau sa souveraineté?» : tels sont les questions que le cinéaste laisse entendre tout au long du film, surtout à travers le personnage de Soufia, incarné par la danseuse et comédienne Sondes Belhsan.
Tarek Ibrahim.
Soufia est un trait d’union entre le passé et le présent, elle commente les faits historiques avec un recul de 135 ans et apporte un brin d’humour et de fraîcheur au documentaire.
Des chorégraphies minutieusement étudiées pour illustrer les propos du personnage font partie du choix esthétique du film pour plus de vie et de modernité au milieu d’une documentation riche et fouillée, certes, mais qui aurait pu tomber dans la lassitude des documentaires informatifs classiques, piège que le réalisateur a su éviter. Et ce n’est son moindre mérite.
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