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Les conséquences de la suspension de l’Accord de Carthage

Au terme de la réunion aujourd’hui, lundi 28 mai 2018, des signataires de l’Accord de Carthage, achevé sans accord, Saïda Garrach a déclaré aux médias que le président Béji Caïd Essebsi a décidé de mettre un terme à l’Accord de Carthage. 

Par Imed Bahri

Priée de préciser davantage les tenants et aboutissants de cette décision, la conseillère à la présidence de la république, a refusé d’en dire davantage, laissant la porte ouverte aux interrogations. S’agit-il d’une suspension provisoire, ce qui laisse entendre une reprise des négociations quand les positions des différentes parties se seront mieux rapprochées ? Ou s’agit-il d’une suspension qui équivaut à une annulation définitive d’un processus qui a abouti à une impasse ? C’est ce scénario qui nous semble le plus plausible…

Ce qu’il faut retenir, cependant, c’est que les négociations des termes de l’Accord de Carthage 2, au point où elles se sont arrêtées, sont terminées et qu’il n’y a plus de débat sur le départ ou pas du gouvernement d’union nationale présidé par Youssef Chahed.

Nidaa Tounes et Ennahdha rejetés dos-à-dos

En d’autres termes, le président Caïd Essebsi a rejeté dos-à-dos Nidaa Tounes et l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), d’un côté, qui sont favorables au changement de gouvernement, et de l’autre Ennahdha, qui plaide pour le maintien du gouvernement, gage de stabilité politique, surtout aux yeux des partenaires internationaux de la Tunisie.

Qu’il l’ait voulu ou qu’il y a été acculé, le président Caïd Essebsi a, par cette décision, infligé une gifle à son propre fils, Hafedh Caïd Essebsi, directeur exécutif de Nidaa Tounes qui était fortement opposé au maintien de Chahed. Et qui, hier soir, avait invité les ministres issus de Nidaa Tounes, pour faire pression sur eux et les contraindre à démissionner pour créer un vide au sein du gouvernement et obliger, par ricochet, Chahed, à démissionner à son tour. Ce scénario est donc tombé à l’eau.

En conclusion, on peut dire que le chef de l’Etat a compris que son initiative a aggravé la crise, alors qu’elle était censée aider à la résoudre, puisque l’accord en question s’est révélé impossible à obtenir, surtout en ce qui concerne son 64e point, relatif au départ ou au maintien du gouvernement. Le retour à la case départ est donc apparu, à ses yeux, comme un moindre mal: il remet les choses au point où elles étaient avant l’annonce de sa malencontreuse initiative.

Indécision présidentielle et persistance de la crise

Reste que cette indécision présidentielle, qui est caractéristique du style Caïd Essebsi, et qui a fini par déteindre sur tout le pays, va créer de nouveaux problèmes et exacerber les divergences voire les conflits entre les différents partenaires politiques, et notamment entre Nidaa Tounes et Ennahdha, censés être alliés au sein du gouvernement d’union nationale, et entre l’UGTT et ce gouvernement.

D’autant que ce dernier va se sentir les mains libres pour mettre en route les réformes restées bloquées jusque-là à cause de l’intransigeance de la centrale syndicale et du manque de coopération des différentes corporations professionnelles, réformes que soutiennent fermement les bailleurs de fonds de la Tunisie, notamment de Fonds monétaire international (FMI), dont une équipe est actuellement en visite de travail à Tunis, et l’Union européenne (UE), qui participe, à partir d’aujourd’hui, au palais de gouvernement de la Kasbah, au second cycle de négociations de l’Accord de libre échange complet et approfondi (Aleca), qui va se traduire par davantage de libération de l’économie tunisienne, notamment l’agriculture et les services.

La décision du président Caïd Essebsi annoncée aujourd’hui ne doit pas être séparée de ce contexte, qui engage les intérêts extérieurs de la Tunisie, notamment la possibilité de continuer à émarger sur les aides de ses partenaires, dont elle a vivement besoin, aujourd’hui plus que jamais, alors qu’elle a du mal à boucler son budget de l’Etat pour l’exercice en cours.

 

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