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Accusé de harcèlement sexuel par des étudiantes de l’ENS de Tunis, un professeur rattrapé par des témoignages de ses camarades de l’ENS de Lyon

Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a ouvert une enquête, le 16 décembre 2019, sur un professeur de l’Ecole normale supérieure (ENS) de Tunis, accusé par des étudiantes de harcèlement sexuel. Les victimes présumées ont mené une campagne de dénonciation, et le professeur a été rattrapé par des témoignages de ses camarades de l’ENS de Lyon où il a fait ses études, il y a 10 ans…

Par Yüsra Nemlaghi

Tout a commencé au début de ce mois de décembre, quand une étudiante de l’ENS a témoigné sur le groupe du collectif #EnaZeda, luttant contre le harcèlement sexuel, le viol et les violences contre les femmes.

Elle a accusé son professeur (A. H.) de l’avoir harcelée. Un témoignage qui a fait boule de neige et plusieurs autres étudiantes ont rapporté avoir été, elles aussi, victimes des mêmes abus.

Une campagne a été lancée par les victimes présumées, soutenues par leurs camarades et par l’Association tunisiennes de défense des valeurs universitaires (ATDVU), pour appeler à l’ouverture d’une enquête, à exclure le professeur si les accusations sont vérifiées, et porter l’affaire à la justice.

La direction de l’université appelée à réagir

Depuis, les étudiantes ont aussi organisé plusieurs rassemblements à l’ENS et ont même boycotté les cours pour être entendues par la direction de l’université.

Hier, le président de l’ATDVU, Habib Mellakh, a appelé le ministère à dévoiler la vérité sur cette affaire et à prendre les mesures nécessaires.

Très vite, cette histoire a fait du bruit pour arriver aux oreilles d’anciens étudiants de l’ENS Lyon, qui disent avoir connu et même côtoyé A. H. lorsqu’il était lui même étudiant.

«Message aux anciennes normaliennes et aux anciens normaliens de l’ENS Lyon: vous vous rappelez un soi-disant « poète », accusé d’agressions sexuelles et de viols en série? Vous vous rappelez comment l’institution avait surtout étouffé l’affaire et comme nous-mêmes n’avions pas été toujours très brillants dans ce combat ? Bon, eh bien, j’apprends, 10 ans après, qu’il a bien entendu continué, qu’il continue, sauf que maintenant il est à un poste de pouvoir», a écrit Laelia Véron, qui se présente comme ancienne colocataire d’A. H. et qui appelle à soutenir les étudiantes de Tunis pour que la vérité éclate.

«Il y a 10 ans, ce prédateur faisait déjà de même à l’ENS de Lyon (j’y étais). Sauf que maintenant il est prof titulaire et il abuse de cette position de pouvoir. J’étais sa colocataire à l’ENS de Lyon (ce n’était pas une colocation choisie !). Je connais deux personnes qui l’ont accusé de viol (sans compter les multiples accusations de harcèlement et d’agressions)», a-t-elle encore déploré.

Témoignages d’anciens étudiants de l’ENS Lyon

Son témoignage a fait réagir d’autres anciens de l’ENS Lyon, qui semblent confirmer à leur tour ces mêmes accusations.

«Ancien étudiant en classes préparatoires à l’École normale supérieure de Lyon, où A. H. a notamment été accusé de viol et de harcèlement; aujourd’hui étudiant du Master Erasmus Mundus « EuroPhilosophie » à Wuppertal, je ne pouvais pas rester sans rien faire face à de pareils agissements scandaleux. Soutien total aux victimes. Puisse toute la lumière être faite au plus vite concernant cette affaire, et puissent les victimes obtenir réparation, même si une réparation est malheureusement toujours bien peu de choses face à des comportements aussi immondes», écrit à son tour Sylvan Brecht.

Un autre ancien étudiant a également témoigné sur l’expulsion de A. H. de la résidence de l’ENS-LSH, selon ses dires, après une plainte déposée par une étudiante anglaise à la suite d’une soirée et d’un rapport non consenti.

«Je l’avais même dépanné en l’accueillant chez moi, le temps qu’il s’installe en dehors du campus de l’ENS. A l’époque, j’avais fait jouer la présomption d’innocence. Mais j’ai vite appris qu’il était manipulateur et menteur et j’ai rompu avec lui. Il joue beaucoup de son charme et de son intelligence pour duper son entourage», a-t-il écrit, en ajoutant : «Je pourrais témoigner au besoin pour arrêter ce pervers. Plus il a du pouvoir, plus il en use pour écraser ses proies. Car c’est un véritable prédateur et un pervers narcissique».

On notera qu’une pétition et une collecte de témoignages ont également été mises en ligne par les étudiantes de l’ENS Tunis et les anciens de l’ENS Lyon, pour être transmises au ministère de tutelle, afin qu’il puisse prendre rapidement les mesures nécessaires contre le harceleur présumé.

D’autre part, l’Association des élèves et anciens élèves des ENS de Lyon, Fontenay-aux-Roses et Saint-Cloud a publié, hier, un communiqué pour condamner «ces agissements qui, s’ils sont avérés, sont totalement contraires aux valeurs qu’elle défend», et pour apporter son soutien «aux victimes de ces agressions et violences sexuelles».

L’Association dit aussi mettre à disposition des étudiantes de Tunis l’ensemble de ses outils, afin de leur permettre de rentrer en contact avec leurs camarades, invités à apporter des témoignages et des messages de solidarité.

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