Les scandales des enregistrements fuités se poursuivent en Tunisie. Ce mardi, 6 avril 2021, le député Rached Khiari en a mis un nouveau en ligne, qui date de plusieurs mois et qui est extrait d’une conversation entre l’avocate et journaliste, Maya Ksouri, et, vraisemblablement, un haut responsable au sein de la présidence de la république.
Dans l’enregistrement fuité, Maya Ksouri suggère à son interlocuteur (qui serait la cheffe de cabinet du président Saied, Nadia Akacha) le limogeage de l’ancien chef de gouvernement, Elyes Fakhfakh, étant «en train d’adopter la même politique que son prédécesseur Youssef Chahed», selon ses paroles.
«Il nomme chaque jour 100 nouvelles personnes [à des postes-clés de l’État] et veut accomplir le mouvement des gouverneurs que Chahed lui a préparé», a-t-elle expliqué.
«Donc on a réfléchi, et on pense que le président doit le mettre à l’écart. Après on mettra quelqu’un du gouvernement à son poste, par intérim. On a pensé à Hichem Mechichi (le ministre de l’Intérieur de l’époque, ndlr) parce que c’est le seul qui nous est acquis à 100%», a-t-elle poursuivi.
Et d’ajouter : «Mechichi sera presque un homme de paille. Il s’occupera de son ministère [de l’Intérieur] et en ce qui concerne la présidence du gouvernement, c’est le palais [présidentiel] qui dirigera les choses. Par-derrière».
La date de l’enregistrement n’a pas été précisée, mais il est clair qu’elle précède le scandale du conflit d’intérêts qui avait pesé sur Fakhfakh qui l’a finalement contraint à démissionner.
Les choses ne se sont donc pas déroulées exactement de la façon conçue par Ksouri (et ses collaborateurs qu’elle nomme pas dans l’enregistrement), puisque la démission de Fakhfakh ne semble pas avoir été orchestrée par le président de la république, Kaïs Saïed, et qu’après cette démission, c’est Fakhfakh lui-même qui avait assuré «l’intérim», jusqu’à la nomination de son successeur par le chef de l’État, qui n’était autre que… Hichem Mechichi.
Ce dernier était-il donc la suggestion de Maya Ksouri à travers Nadia Akacha ? Cela paraît très probable, et lancera surtout une nouvelle polémique autour du rôle que jouent ces intrus (représentés par Maya Ksouri) dans la gestion des affaires de l’État.
Le choix Mechichi qui semblait être arbitraire était donc probablement celui des personnes qui gouvernaient dans l’ombre et qui auraient manipulé Saïed. Mais quoi qu’il en soit, c’est à ce dernier qu’est revenu le dernier mot et c’est lui le premier responsable de sa gestion du dossier du chef du gouvernement. Une gestion pour le moins catastrophique, aussi bien pour lui (car Mechichi s’est très vite rebellé contre lui) que pour le pays, au vu des conflits politiques indénombrables qui s’en sont suivis.
Cherif Ben Younès
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