Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste Ennahdha et président de l’Assemblée, a appelé à des changements au niveau de la composition de la coalition gouvernementale : «La situation actuelle n’est pas naturelle. Un gouvernement doit être soudé et ses membres doivent avoir la même vision», a-t-il dit, lors d’une interview, ce soir lundi 8 juin 2020, sur Nessma TV, la chaîne de Nabil Kaoui, président de Qalb Tounes.
Le chef islamiste estime que les membres du gouvernement doivent avoir les mêmes orientations, c’est-à-dire, dans son esprit, celle d’Ennahdha, et a rappelé que Tahya Tounes et Al-Chaab ont soutenu l’opposition en votant, le 3 juin dernier, pour la motion relative au rejet de toute intervention étrangère dans les affaires internes en Libye, considérée comme visant Ennahdha et son président.
«La coalition gouvernementale ne représente pas la majorité parlementaire, or elle doit être formée de partis qui se soutiennent. Le premier parti aux élections est au pouvoir (Ennahdha, Ndlr), alors que le 2e ne l’est pas (Qalb Tounes). Cette situation n’est pas ordinaire et nous devons parvenir à un consensus et être ouverts à tous ceux qui veulent participer au gouvernement», a-t-il insisté, en ajoutant : «La confiance en certains partis a sans aucun doute été affectée. Voir Al-Chaab s’aligner sur Abir Moussi est juste désolant».
Rached Ghannouchi a aussi estimé que «la coalition doit logiquement être composée des 3 ou 4 partis vainqueurs des élections (notamment Qalb Tounes et aussi Al-Karma, ex-croissance d’Ennahdha) qui se réuniraient autour d’un programme commun pour le bien de la Tunisie», a-t-il dit.
Traduire : le parti islamiste continue à mettre la pression sur Elyes Fakhfakh, pour intégrer Qalb Tounes. Ce qui n’est pas une surprise, car c’est ce que cherche Ennahdha à faire depuis la formation du gouvernement Fakhfakh, après que son candidat, Habib Jemli, ait échoué à former un gouvernement.
Or Elyes Fakhfakh, chef du gouvernement choisi par le président de la république et qui avait obtenu la confiance du parlement, avait dès le début choisi de former une coalition n’incluant pas le parti présidée par Nabil Karoui. Et la raison, non invoquée ouvertement, est que le président de parti est poursuivi dans plusieurs affaires de corruption financière, d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent et qu’un gouvernement qui se donne pour principale mission de combattre la corruption ne peut se permettre de compter dans ses rangs un parti qu’entourent de lourdes suspicions et dont le président peut, à tout moment, être appelé à comparaître devant les juges.
Bien sûr, M. Fakhfakh et les chefs des partis composants sa coalition gouvernementale sont cohérents. Ce n’est pas le cas le M. Ghannouchi et des islamistes qui, eux, sont fâchés avec les principes et toujours animés par une logique de pouvoir : un bon gouvernement pour eux c’est un gouvernement à leur ordre. Or, ce n’est pas (encore ?) le cas de celui de M. Fakhfakh.
Y. N.
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