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Livre: « Soleil Géante Rouge » ou l’islamisme sans stéthoscope

La science évolue grâce à la critique, la religion est immuable et l’exclut. Tenter de les associer aboutit inévitablement à une imposture. Et c’est sur cette imposture que s’est développé, en Tunisie, à partir des années 1970, l’islam politique et son incarnation partisane, le mouvement Ennahdha qui, au terme de dix ans de pouvoir, a amplement prouvé son incompétence.

Par Dr Mounir Hanablia *

Le Soleil est-il une géante rouge? non ! mais il le sera dans quelques 80 milliards d’années quand il aura épuisé ses réserves d’hélium et d’hydrogène grâce auxquelles par le biais des réactions thermo-nucléaires il assure le rayonnement indispensable pour la vie sur terre. A ce moment-là, sa force gravitationnelle ne pourra plus compenser celle des gaz désormais moins chauds de sa surface et ceux-ci en se dilatant finiront par couvrir un espace englobant l’orbite terrestre et au-delà. Autrement dit, le Soleil finira par se dilater pour devenir une géante rouge et la planète Terre sera entièrement calcinée par le flux de feu issu de sa surface, sans aucune possibilité pour que la vie terrestre, basée sur le métabolisme du carbone et de l’eau liquide, puisse en réchapper. 

Cette évolution vers le gigantisme rouge est d’ailleurs commune au groupe des étoiles de taille moyenne et celle autour de laquelle les planètes du système solaire gravitent en est une. Le phénomène serait plutôt de prétendre faire de cela un événement dont l’évocation par les ou des Livres sacrés prouverait leur caractère quasi divin. Mais attention! Un livre sacré peut en cacher un autre, et en rappelant comme préambule les déboires de l’Eglise avec la science, ce sont les Évangiles et la Torah qui se retrouvent d’emblée exclus de la Vérité. Et on ne pense pas que l’Avesta ou les Vedas puissent avoir suscité suffisamment de curiosité pour entraîner des recherches sur les vérités scientifiques qu’elles eussent englobées.

L’islamisme et le créneau de la foi conforme à la science

En procédant par élimination, c’est donc le Coran dont on veut démontrer la conformité à la science et ce faisant, le caractère sacré. La méthode n’est pas nouvelle. L’émergence de l’islamisme dans les années 70 s’était accompagnée de la publication d’un livre par le Dr Maurice Bucaille, intitulé « La Bible, le Coran, et la Science », qui concluait que plusieurs des informations rapportées par ces livres ne faisaient pas partie des connaissances de l’époque et ne seraient validées scientifiquement que bien plus tard. Et les prédicateurs islamistes, à commencer par Rached Ghannouchi, dans la revue « El Maarifa« , ne s’étaient pas faits faute d’utiliser ce genre d’ouvrages dans leur propagande appelant à la fondation d’une société basée sur la chariâ, selon eux conforme à la science, et à la volonté divine, afin d’aspirer à un futur digne d’un glorieux passé.

Plus tard le propagandiste frère musulman Youssef Qaradawi, grâce à son émission La science et la vie sur la chaîne Al- Jazeera du Qatar, gagnerait la notoriété nécessaire pour ouvrir des antennes de l’Association internationale  des ulémas musulmans dans plusieurs pays arabes, à commencer par la Tunisie.

Le résultat de tout cela, on l’a déjà expérimenté en Tunisie avec dix années de régime du parti islamiste Ennahdha et il serait vain d’y revenir. Néanmoins il semble que le créneau de la foi conforme à la science soit toujours porteur, et pas seulement dans l’espace arabo musulman.

On peut donc s’étonner qu’un cardiologue de renom qui n’a plus rien à prouver sur le plan professionnel ou social, se lance grâce à la publication d’un livre intitulé « Soleil Géante Rouge », consacré à l’astronomie, sur un chemin parsemé d’épines, au moment même où le pays peine à se débarrasser des séquelles d’un islamisme moribond. Que voulait-il prouver?

L’astrophysique et la foi peuvent-elles vraiment se rejoindre ?

En outre, présenter l’ouvrage comme le fruit de vingt années de recherches, ainsi que La Presse s’en fait l’écho, semble plutôt inapproprié, puisqu’il n’est ni astrophysicien ni théologien. En outre, avec l’ampleur de ses tâches professionnelles, on peine à croire qu’il ait trouvé le temps matériel ne serait-ce que de réfléchir sur ces questions, pour ne pas dire les développer.

Le Dr Mohamed Faouzi Drissi, puisqu’il s’agit de lui, a consacré sa vie à la médecine et non à l’astrophysique ou la théologie. Il aurait pu faire réfléchir, ou rêver, grâce à un ouvrage autobiographique, les jeunes tentés par la cardiologie. Il est vrai que dans le champ de la médecine libérale, susciter des vocations professionnelles ne constitue en général pas la vocation primordiale. Certes, je reconnais ne pas avoir lu l’ouvrage de mon collègue et n’avoir commenté qu’à la lumière des réactions glanées sur les réseaux sociaux et dans la presse; dans le domaine de l’astrophysique ou dans celui de la foi, il n’aurait tout simplement rien à m’apprendre.

Pour conclure, la science évolue grâce à la critique, la religion est immuable et l’exclut. Tenter de les associer aboutit inévitablement à une imposture.

* Cardiologue.

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