Aux dirigeants israéliens : les Palestiniens resteront sur la carte, quoi que vous fassiez !

Trois mois après la guerre, la question israélienne du «lendemain» a commencé à se concentrer sur la bande de Gaza. Depuis le 7 octobre, la plupart des Israéliens ont préféré repousser ce moment où ils doivent trouver une solution au sort de plus de 2,2 millions de personnes, car qui se soucie de la bande de Gaza si elle ne représente aucune menace? Mais face à la pression internationale et aux répercussions humanitaires dévastatrices, cette question est devenue plus urgente, et Israël sera tôt ou tard contraint d’y répondre.

Par Jack Khoury *

Pendant ce temps, Netanyahu et son gouvernement tentent de contourner cette question. Il dit ce qui ne devrait pas être, ni le «Hamastan» ni le «Fathistan». Il recherche plutôt des dirigeants locaux pour assurer l’administration civile pendant que l’armée continuera de faire son travail.

En pratique, Netanyahu veut appliquer le modèle de la Cisjordanie à la bande de Gaza : une Autorité palestinienne faible qui dépend d’Israël sur le plan économique et sécuritaire et qui gère les affaires civiles dans la bande de Gaza. Cette formule donne à Israël la liberté d’action militaire et garantit une faible surveillance internationale qui n’affecte pas la politique israélienne ni ne ralentit le projet de colonisation.

Attendre encore 30 ans ?

Israël voit dans cette formule la meilleure solution que Netanyahu et le gouvernement israélien tiennent à préserver pendant des années, avec l’aide directe et indirecte de l’Autorité palestinienne elle-même. Il est presque certain que l’Autorité palestinienne réfutera cette approche. Mais en pratique, c’est ce qui se passe. Un règlement politique peut attendre indéfiniment : si «Oslo» a duré 30 ans, alors nous pouvons attendre encore 30 ans.

Israël estime qu’il peut vivre éternellement avec cette formule, mais la réalité est en train de changer dans la pratique, et ce qui s’est produit en Cisjordanie au cours des trois derniers mois n’est pas seulement une réponse au 7 octobre. Il ne faut pas oublier que la menace immédiate à la sécurité d’Israël existait en Cisjordanie jusqu’au soir de samedi dernier. Le camp de réfugiés de Jénine se trouve au centre, tout comme Naplouse.

Le public israélien a davantage entendu parler des Brigades de Jénine et de Tulkarem et de la Fosse aux lions (1) que du Hamas et des Brigades Al-Qassam. Le chef adjoint du bureau politique du Hamas, Saleh Arouri, qui dirigeait la branche militaire du Hamas en Cisjordanie et qui a été assassiné la semaine dernière, était considéré comme plus dangereux que Yahya Sinwar. La principale crainte concernait l’explosion en Cisjordanie. Parce qu’Israël estimait que la bande de Gaza avait peur.

La question du lendemain

Depuis le 7 octobre, les événements en Cisjordanie se succèdent et s’aggravent. Des civils sont asphyxiés semaine après semaine. La non-sortie des travailleurs [Palestiniens, Ndlr] pour travailler en Israël, et la non-entrée des citoyens arabes israéliens exacerbent les difficultés économiques. La poursuite des attaques des colons et la division de la Cisjordanie avec des barrières attisent le feu. Israël doit comprendre que le modèle qui existe actuellement en Cisjordanie ressemblera au modèle qui se développera dans la bande de Gaza, mais d’une manière plus dure. Tant qu’Israël continuera à considérer les Palestiniens comme des «animaux qui doivent être apprivoisés» par la force ou par la fourniture de nourriture ou qui doivent être entourés de murs, la question du lendemain restera sans réponse satisfaisante.

Israël a peut-être liquidé Arouri, humilié Mahmoud Abbas, confisqué les fonds de l’Autorité et emprisonné Marwan Barghouti jusqu’à sa mort, et peut faire pression sur des milliers de Palestiniens pour qu’ils émigrent, réoccuper le Goush Katif (2) et annexer la zone C (3), mais les gouvernements israéliens, qu’ils soient dirigés par Netanyahu, Gantz ou leurs descendants, seront obligés d’affronter la question du lendemain, dans la bande de Gaza et en Cisjordanie également, car les Palestiniens sont également sur la carte. La réponse à la question frontalière doit être trouvée sur cette carte, même après le 7 octobre.

Source : Haaretz.

* Journaliste basé en Israël.

Notes :

1- Groupe armé palestinien opérant en Cisjordanie occupée par Israël.

2- Regroupement de colonies israéliennes au sud de la bande de Gaza, qui s’étendait sur une douzaine de kilomètres, du nord de Rafah et au nord-est de Khan Younès.

3- Division administrative de la Cisjordanie, en Palestine, entièrement sous occupation israélienne.

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